Sur les
sommets
L’été, il y a les fanas de la mer, de la plage et du soleil,
mais il y a aussi des amoureux de la montagne et des sommets qui n‘ont de cesse
de s’aventurer toujours plus haut, comme s’ils étaient possédés d’un
irrépressible besoin de se rapprocher du ciel. Macron, dans sa duplicité
congénitale, en baptisant sommet (du G7) la rencontre de quelques puissants du
monde à Biarritz, en bordure de l’océan, est fidèle à son image et à sa courte
histoire de magicien de pacotille, capable de mettre la mer à la montagne et la
montagne à la mer. Et nous allons voir que dans l’actualité internationale,
nationale, régionale et ultra-locale, les abuseurs de son espèce sont légions.
Ce sera l’occasion de relancer une humeur que les vacances avaient sans doute
assoupie.
Le sommet de la
montagne à la mer
Regarder la magie du
sommet de Biarritz. Ils ne sont d’accord sur rien, si ce n’est faire
suer le burnous aux peuples et remplir les poches de leurs copains capitalistes
et ils s’entendent comme larrons en foire pour faire bombance et disserter sur
des thèmes qui visiblement leur sont totalement étrangers, en particulier celui
des inégalités. Ils veulent faire croire que les inégalités vont bientôt
appartenir au passé, que les pays riches qu’ils dirigent vont participer dans
un élan de générosité irrépressible à une redistribution des richesses qui fera
en sorte que les pèquenauds d’ici et d’ailleurs sans vivre dans l’opulence,
certes, auront de quoi satisfaire leurs besoins. Fini donc la mendicité au coin
des rues, les sdf par milliers, la précarité généralisée, l’exclusion sociale
comme norme intangible. Les mêmes depuis des années ont fait tout le contraire
et ont fait exploser les inégalités. Nous prendraient-ils pour des
imbéciles ? Mais oui ! Bien sûr !
Et la seule chose importante du dernier weekend en pays
basques fut le contre-sommet qui a dénoncé la supercherie, qui a rappelé les
véritables exigences écologistes, qui a renvoyé tous ces tartuffes à leurs
mensonges, qui a ouvert la voie au rassemblement de ceux qui résistent.
L’unité passe par des
sommets escarpés
Encore que le rassemblement, c’est rarement simple. Pour le
réussir il faut le plus souvent être unitaire pour soi, bien sûr, mais aussi
pour tous les autres qui arguent parfois de l’unité pour mieux s’asseoir dessus
et tirer les marrons du feu. Mon expérience syndicale m’a donné des convictions
en la matière que les aléas de la vie sociale, politique me font quotidiennement
vérifier. Prenons la bataille nationale sur les retraites, chacun y va de sa
détermination, de son rejet, de la nécessité de mobiliser, mais chacun y va de
sa date, de sa stratégie, de son indépendance, comme si c’était là l’essentiel.
On atteint des sommets d’atermoiements, au détriment de l’efficacité immédiate.
Celui qui se contentera de prôner l’unité et d’accepter les compromis qu’elle
suppose passera pour un couillon, au pire comme un traitre. Ne pas avoir pris
conscience qu’une telle démarche est avant tout improductive (c’est un
euphémisme) me donne le sentiment que le mouvement social n’a pas atteinte des
sommets. Nous faisons avec. L’épisode gilets jaunes l’a compliqué un peu plus.
Un sommet de solitude
A l’ultra-local, c’est pareil. Suivez les péripéties que
doit affronter l’hypothèse d’une liste de gauche aux prochaines municipales de
Perpignan. Pas dans 15 ans, dans quelques mois. Une possibilité existe
d’affronter un second tour avec quelques chances. Entre la droite, éclatée
(jusqu’à quand ?), l’extrême droite maquillée BCBG, les marcheurs en
embuscade et les carences des sortants qui se lisent sur les murs, une soif de
changement est indéniable. Les partisans de l’union sont nombreux, Ils ont déjà
travaillé ensemble, dressé quelques perspectives. Il y a là des gens d’horizons
différents, avec carte, sans carte, avec des passés militants ou sans,
avec une détermination qui a fait ses
preuves, des anciens et des nouveaux, tous ancrés bien à gauche. Et puis il y a
quelques zozos qui pensent qu’ils vont pouvoir grâce à un pouvoir extralucide
et des chevilles qui enflent réinventer une gauche pur jus, tellement pur jus
qu’elle ne doit pas tomber dans n’importe quelle main impure. Ils savent eux
seuls où est la pure pureté. Ils se répandent en tentant de casser ce qui se
construit, en disant du mal de tout ce qui est impur et qui n’est pas eux, eux
et eux, comme s’ils se préparaient à un sommet de solitude durable. A nous la
dégringolade ! Ils oublient les autres, le monde, la ville, le rassemblement
et la seule voie possible pour sortir de l’ornière. Il n’y a pas que Macron qui
nous prend pour des imbéciles.
Jean-Marie Philibert