Les
surprises de l’été
Tous les étés offrent des surprises : comme si
l’actualité profitait de ce temps de latence pour rattraper les occasions
manquées, les occasions tragiques, comme toutes celles qui le sont moins, pour
nous confronter à des situations inédites. L’été 2021 ne déroge pas à la règle
qui n’est écrite nulle part si ce n’est dans mes souvenirs, pas nécessairement
fiables. Pour relancer la machine de mon humeur, je vais tenter de vous montrer
qu’il y a comme un fondement de vérité dans ce que j’avance.
L’imbroglio
Commençons par ce qu’il se passe ici et maintenant,
pratiquement tous les samedis, en ces temps de pandémie qui ne cesse de
rebondir à cause de variants récalcitrants. Eh bien, au nom d’une liberté
absolue d’un individu qui n’a à se fier qu’à ce que sa conscience lui dicte,
qu’à ce qu’il croit dur comme fer, qu’à la conviction qu’il s’est construite
que son corps lui appartient, à lui et à lui seul, ils sont nombreux à
considérer que toute démarche collective pour combattre une maladie tenace est
entachée d’intentions malveillantes, sans doute pires que le mal qui les
menace. Donc au nom de cette liberté ils manifestent par dizaines de milliers,
sans véritable organisation, sans cohérence construite et délibérée pour dire
non, au passe sanitaire, à la vaccination, à l’intrusion de l’état dans leur
vie, dans un imbroglio politique tout à fait nouveau où les vieux de la vieille
comme moi qui ont des milliers de kilomètres de manif à leurs compteurs ne
comprennent rien. Nous sommes dans un inédit absolu, Camus dans la Peste
n’avait pas envisagé que les Oranais pouvaient ainsi se révolter contre des
soins (qu’ils auraient bien aimé avoir d’ailleurs).Que le gouvernement ait sa
part de responsabilité ne fait pas de doute : rappelez-vous le déni, puis
les masques, puis les atermoiements… Que le gouvernement et Macron, en
personne, se réjouissent de la confusion politique, sociale, idéologique, fort
opportune, qui se met ainsi en place à
quelques mois des présidentielles est une quasi-certitude. Il n’empêche, on est
en plein dans l’inédit et pas dans un inédit progressiste dans le pays de
Pasteur qui a ouvert la voie aux vaccins dans la bataille contre des maladies
incurables. Le reculoir est en marche en cet été2021. Et pas seulement en
France !
D’autres
reculoirs
En Afghanistan, il ne s’agit plus seulement de pandémie, mais
d’un retour , aussi redouté qu’attendu des Talibans, à l’annonce du départ des
Amerlocs, et d’un retour à la case
départ de la loi islamique avec tout ce qu’elle peut signifier comme fanatisme, remise en cause des droits
les plus élémentaires, en particulier ceux des femmes, retour à un Moyen Age
que domine une théocratie fatale pour une population qui n’en peut mais, et à
qui les intrusions étrangères depuis des
décennies n’auront laissé que des plaies ouvertes. Et comme si ces malheurs
n’étaient pas assez grands, pour ajouter de la confusion à la confusion un
Front islamique qui trouve sans doute que les talibans sont trop tendres et
complaisants vient balancer ses bombes à l’aéroport de Kaboul et faire quelques
centaines de victimes supplémentaires. Et il serait loisible de trouver de par
le monde, d’autres exemples de reculoirs où la vie humaine compte pour du
beurre, où bien des confusions embrument les consciences, nous laissant sur le
cul avec notre progressisme à deux balles
Et pourtant
Les surprises de l’été ne sont donc pas réjouissantes ;
mais les terrains sociaux, politiques, historiques sont des terrains mouvants où bien des
basculements restent possibles, quand la volonté des femmes et des hommes se
met en branle. Il nous reste notre inextinguible confiance dans la construction d’un monde humain et
notre volonté de tout faire pour qu’il en soit ainsi.
Une exposition sur la mère, la mother, la « mor »
comme on dit en danois, au Louisana à Copenhague, fut pour moi un vaccin très
efficace contre un reculoir généralisé qui aurait pu me déprimer. Lors d’une
visite à mon fils et sa famille, qui vivent dans ces terres nordiques, j’ai eu
l’occasion de la visiter : un choc salutaire ! La richesse que les
mères, les femmes, portent, les vies qu’elles donnent, les espoirs qu’elles
communiquent, y compris au milieu des difficultés les plus grandes, des
histoires les plus tourmentées, la persistance-résistance à mettre de la vie,
ici comme ailleurs, maintenant comme toujours, là où c’est compliqué, sont, en
ces temps difficiles, des bouffées d’oxygène que j’ai envie de vous faire
partager en vous en proposant des images.
Jean-Marie Philibert