IS BLACK
BIOTIFOUL ?
N’est pas Soulages qui veut ! Soulages a fait du noir
une véritable couleur, brillante, riche, irisée et pleine de vie. Les
dirigeants grecs en fermant la télévision publique ont fait de l’écran noir des
téléviseurs du pays le symbole de la mort lente et inexorable dans laquelle ils
tentent d’enfermer ce qui fut le berceau de la démocratie. Ils s’attaquent au
service public qu’ils détruisent d’un trait de plume. Ils décident en quelques
secondes de milliers de licenciements. Ils obéissent aux ordres de la toute puissance financière. Ils veulent
mettre le peuple à genoux. Le peuple résiste et c’est tant mieux.
Cela ne concerne
pas que les grecs !
L’’enlisement dans une crise qui n’en finit plus assombrit
toutes les perspectives. Y a-t-il encore des perspectives d’ailleurs,
autres que le chômage de masse, la précarité généralisée, les inégalités
exacerbées, l’état de droit mis à mal, les services publics vendus aux plus
offrants. Dans tous les pays européens, le consensus politique qui, en Europe,
va de la droite (libérale) aux
différentes facettes du socialisme (libéral, bien sûr) semble être dans une
logique où la satisfaction des besoins sociaux n’a plus aucune sorte
d’importance. Seules comptent la mise au pas, la soumission aux dogmes du
capitalisme le plus sauvage, la fin de toute conscience critique et la remise
en cause de la démocratie. Les méthodes
ne sont pas partout aussi brutales et visibles qu’à Athènes, mais les objectifs
sont les mêmes. No future pour les peuples ! L’écran noir !
Rappelez-vous Claude Nougaro « Sur l’écran noir de mes
nuits blanches je me fais du cinéma… », et notre Claude regretté de rêver
à tous les possibles et impossibles qui peuplent notre imaginaire, l’amour, la
liberté, la fraternité, l’espoir. Fini le rêve, fini l’espoir ! L’écran
noir qu’on nous prépare est fait de vide et de désespérance sans issue.
Vie de m…
Regardez la vie que l’on dessine pour nos jeunes, au moment
où ils se décarcassent à passer des examens qui devraient leur ouvrir les
portes d’une vie de promesse. La galère des petits boulots, des stages pas ou
peu payés, le chômage ou/et l’exclusion
et la marginalité. S’ils arrivent à passer l’obstacle de l’entrée dans le monde
adulte, il ne faudra pas qu’ils soient très exigeants sur l’emploi à choisir,
ils devront être souples, mobiles, adaptables, et surtout pas syndiqués. Ils ne
devront avoir aucune ambition quant à leur salaire. S’ils veulent construire
une famille, il faudra qu’ils se démerdent, la politique familiale ayant été
réduite à la portion congrue. S’ils veulent se loger… démerde… S’ils veulent
des loisirs et s’ils n’ont pas les moyens de se les payer, ils s’en passeront.
Ils auront la télé, tant que l’écran ne
sera pas noir. Et quand la télé publique aura été réduite au silence dans tous
les pays « développés », ils auront la télé privée qui entre deux
spots publicitaires leur proposera quelques minutes d’abrutissement généralisé.
Ça les occupera pendant les longues périodes d’inactivité qu’ils auront à
affronter.
Arrivés à l’âge où viendra retraite, s’ils y arrivent après
45, 46, 47, 48, 49, 50 ans de travail de merde, ils seront tellement usés par
tant de ratages accumulés qu’ils ne se rendront même pas compte qu’ils n’ont
été que les acteurs fictifs d’une non-vie dans un film désespérément noir (au
propre et au figuré) où viendra
s’inscrire le mot « fin ».
Les scénarios catastrophes n’ont rien de fatal ; les
écrans noirs peuvent s’illuminer de toutes les couleurs de la vie. Il n’y a que
nous qui pouvons écrire ce film.
Au travail ! Immédiatement.
Moteur ! On
tourne !
Jean-Marie PHILIBERT.