les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 27 juin 2016

on lâche rien


On lâche rien

Il est difficile quand on a le nez sur les événements de les saisir dans la plénitude de ce qu’ils sont, de lire les mutations dont ils peuvent être porteurs, d’y voir la vie en train de se faire, d’y voir le monde tel que les femmes, les hommes tentent de le façonner. Le plus souvent on projette sur le cours de choses des considérations toutes faites, ou pessimistes, si on est phase descendante, ou plus rarement, on peut afficher son optimisme,  si l’on a un trop plein de magnésium. Avec les mouvements sociaux la tâche est encore plus difficile, d’autant que l’issue n’est jamais écrite à l’avance, que les commentateurs peuvent tout dire et son contraire, que les média vous emmènent en bateau, que les puissants en tous genres  veulent que vous rentriez à la niche le plus rapidement possible, bien sûr bredouilles, et encore une fois désespérés.

Un « work in progress »

Les mois de bataille autour de la loi El Khomry peuvent-ils servir d’illustration à ce besoin de dépasser les apparences du mouvement ? A  l’heure où j’écris, rien n’est fini, le « work est en progress ». Des signes peuvent s’y lire, sur les modifications de comportement qui s’y jouent, sur les enjeux politiques qui n’y sont pas étrangers.

Politiques, c’est sûr ! Parce qu’au TC nous avons le virus, tout cela est politique, bien sûr, et  sans l’ombre d’un doute.

Les efforts déployés par la bande de zozos qui nous gouvernent pour nous inciter à ne voir dans ce projet de loi que modernisation, allègement, réforme salutaire et indispensable, toilettage de lois désuètes ne pouvaient que nous mettre la puce à l’oreille. La puce est devenue mouvement social d’une ampleur inégalée depuis 95 (plan juppé) et les années 2000 (retraite, cpe…).

Les formes et le fond

 La mayonnaise a pris et elle monte avec des formes retrouvées et différentes: les manifs qui font le grand tour de Perpignan, la gare bloquée, le pont Arago désertifié, la place de la république transformée en AG, des initiatives toujours renouvelées, des têtes nouvelles dans les défilés, beaucoup de colère et de joie à la fois, des jeunes, des moins jeunes, avec un même souci d’unité, avec une même volonté d’être entendu, avec une même obstination à ne rien céder. Les manœuvres du pouvoir, le recours aux casseurs, aux provocations, les forces de polices utilisées pour rajouter à la confusion et même parfois aux contusions, les coups de menton de Valls n’ont rien changé au cours de choses. La bataille continue.

Parce qu’elle est démocratique ! C’est une très grande majorité du mouvement social qui rejette la loi Khomry : le renfort apporté par la CFE-CGC serait là pour le prouver s’il le fallait et les absents CFDT et Unsa ont toutes les peines du monde à défendre une loi qui détricote des décennies de droits du travail. Le mouvement est vu de façon très sympathique dans l’opinion publique et la votation citoyenne, comme la pétition d’un million de signatures en atteste.

Des mots disparus…

Le besoin de prendre en main son destin, d’en être un acteur politique, debout, la nuit, le jour, de veiller à être écouté et aussi à écouter. La volonté de retrouver de la démocratie au cœur de l’action. Le mouvement social est un organisme vivant en prise directe avec les ambitions de femmes et de hommes à s’émanciper, se libérer, s’épanouir, en vivant des fruits de leur travail. Ces mots « émanciper, libérer, épanouir, vivre, fruits, travail » semblaient avoir disparu des dictionnaires socialiste, sarkoziste, lepéniste qui ne dessinent l’avenir que dans une vallée de larmes : la version 2017 devait ressembler aux précédentes. Et puis patatrac !

…retrouvés

Il revient au syndicalisme unitaire, écarlate, joyeux tel que l’incarnent les organisations au cœur du mouvement (citons les toutes, elles le méritent, la CFTC, Solidaires, la FSU, l’UNEF, l’UNL, FO, la CGT) d’avoir relevé un défi que des années de mobilisation momolle pouvaient laisser considérer comme aventureux et de dire, répéter, chanter dès maintenant « on lâche rien – on lâche rien ».

Jean-Marie Philibert 




lundi 20 juin 2016

le prochain chapitre


Préparons ensemble le prochain chapitre

La plume, ou ce qu’il en reste, le clavier de l’ordi, c’est comme un muscle, si vous le mettez au repos quelque temps le redémarrage sera difficile, vous aurez des douleurs partout et vos performances seront modestes. C’est ce que je ressens après une petite interruption de ce billet. Par contre si toutes les semaines  vous faites votre exercice d’écriture, si vous exprimez sans retenue les humeurs qui vous agitent sur les puissants du jour et leurs turpitudes, leurs coups fourrés, leur ambitions jamais inassouvies d’éteindre vos espoirs, de désarmer vos solidarités, de vous faire taire, vous aurez le sentiment que cet exercice est salutaire pour les autres comme pour vous. Les plaisirs de l’écriture et ceux de la lecture peuvent se rencontrer.

En piste donc, pour retrouver la force des mots, pour construire les phrases qui vont nous aider à cerner le monde, à comprendre un peu de la vie et, n’ayons pas peur de le dire, à faire de la politique avec tous ceux qui luttent ici et maintenant. Même si la situation est d’un compliqué à décourager Descartes lui-même.

Une issue improbable

Pensez donc, il vous avait dit qu’il était l’ennemi de la finance et que lui président ce ne serait pas comme avec l’autre … et puis très vite vous avez compris que c’était du pareil au même. Le mou-mou et le faux dur nous ont embarqués dans une même galère réactionnaire avec une incapacité absolue de répondre aux besoins sociaux d’une société qui n’en peut plus. Toujours plus d’austérité pour tous, sauf pour ceux qui ont de la tune. Avec une seule perspective pour continuer : nous dire que si ce n’était pas eux ce serait la fasciste d’à côté qui nous en ferait voir des pires. Si là-dessus vous pimentez avec les vieux démons de la gauche de la gauche qui a du mal à fabriquer de l’unité, avec ceux qui, au front de gauche, font dans le cafouillage, avec les ambitions   de celui qui croit avoir raison tout seul, vous risquez de désespérer. C’est un euphémisme de dire que l’issue de tout cela, à quelques mois des présidentielles, est improbable.

Et pourtant

Dans ce maelstrom que le pouvoir tente d’opacifier un peu plus encore par un état d’urgence qui sert surtout à gonfler les inquiétudes et à dégonfler les libertés et les droits, le peuple se rassemble pour défendre un code du travail menacé, de façon tenace et obstinée malgré la surdité du pouvoir, malgré les menaces, en préservant un cadre unitaire qui montre la voie de ce que pourrait être un syndicalisme retrouvé et qui fait plaisir à voir. Tous les adeptes de la résignation qui, du patronat au syndicalisme mou, en passant par nombre d’élus de droite et de « gôche » ont fait les beaux jours des années précédentes jouent les étonnés devant une ardeur retrouvée. Les raisons d’espérer sont dans cette démarche, dans les formes qu’elle se donne, dans sa volonté d’aboutir. Dans le souci de définir ensemble et  lucidement cet avenir de progrès en évitant tout racolage médiatique. Avec le peuple debout. La nuit comme le jour.

Agir et écrire

Les raisons d’agir rejoignent les raisons d’écrire. Au TC l’écriture nous ne l’aimons pas vaine et vide, limitée au pittoresque facile ou aux faits divers qui ne sentent pas bon. Nous l’aimons en prise directe avec  un réel qui ne nous satisfait pas, mais que nous pensons être en mesure de transformer (pas tout seul bien sûr), mais avec tous ceux qui partagent ce qui est à la fois un espoir, une volonté et une solidarité. C’est l’écriture du futur qui s’invente jour après jour : au Bocal du Tech, par exemple dans quelques jours il nous reviendra de rajouter un chapitre « Des 80 ans du journal à l’éternelle jeunesse de la lutte d’aujourd’hui ». En attendant pour vous faire patienter je vous offre ces quelques lignes, ma modeste contribution.

Jean-Marie Philibert.