Une drôle
d’odeur !
On avait coutume de dire que les sénateurs ne servaient pas à
grand-chose, qu’ils avaient dans le cadre agréable des jardins du Luxembourg
une rente de situation lucrative, peu d’obligations, et des responsabilités
minimes, puisque dans les conflits avec les députés ils n’avaient jamais le
dernier mot. Tant et si bien que des sénats se sont depuis des lustres
développés dans nos villages où, sur une place ombragée, des retraités se
réunissent quotidiennement pour débattre des affaires du monde, pour le faire,
le refaire … sans aucun effet sur ce monde qui tourne de moins en moins rond.
Jusqu’à donner l’image d’une institution qui a surtout le souci de perdurer sans
faire de vague et sans faire de peine au pouvoir.
Le sénat
met le feu aux poudres
Avec l’affaire Benalla, c’est fini. Le sénat met le feu aux
poudres, c’est d’ailleurs pour cela qu’après avoir nécessairement évoqué la
sortie du rapport de la commission d’enquête sénatoriale, les média
complaisants (presque tous) sont passés à autre chose et n’ont pas épilogué.
Circulez ! Il n’y a rien à voir !
Il n’y a rien qu’une
affaire d’état !
Le cœur du pouvoir occupé par des aventuriers sans vergogne,
sans foi, ni loi, sans contrôle, sans expérience, sans formation, mais pas sans
ambition. En particulier celle de s’en mettre plein les poches. Avec toutes les
complicités, au plus haut niveau. Et les relations troubles qui vont avec.
Quand le mensonge et la prévarication atteignent un tel
niveau, l’inquiétude est de mise quant à la nature de notre démocratie. Les
gilets jaunes, rouges, verts, multicolores n’ont pas fini d’en dénoncer les
tares.
Les faits
Rappel des faits : l’homme de confiance du président,
Benalla, en charge de sa sécurité, déguisé en policier, avec un acolyte, fait le
coup de poing sur des manifestants le 1° mai, place de la Contrescarpe. Une
mission officielle ? L’affaire devient publique, il est sanctionné. Mais
entretemps on lui a donné un logement de
fonction, une voiture avec gyrophare, des passeports diplomatiques comme s’il
en pleuvait, des téléphones ultra secrets, et même des armes (on ne sait jamais
ce qui peut arriver).
La sanction : quelques jours de vacances. Sans doute
pour prendre contact avec les oligarques russes et signer de lucratifs contrats
pour leur sécurité. Des sous ! Des sous ! Entre temps, il fait
toujours le toutou d’Emmanuel : on le repère à la panthéonisation de
Simone Veil, on ne voit que lui lorsque l’équipe de France, championne du
monde, est reçue à l’Elysée. La rumeur indique même que c’est lui qui aurait
fait accélérer le bus pour qu’il arrive au Palais au moment du journal
télévisé. Mais ça n’est pas un délit, seulement le signe d’une toute puissance
et d’un dévouement exemplaire.
De la magie
à la cabane
Quand il est mis en examen, le 28 Juillet 2018, on lui laisse
tous les attributs de son pouvoir. Des négligences ? Elles lui permettent
d’aller faire le cador en Afrique, sans doute pas pour des actions humanitaires,
ce n’est pas le genre de la maison. Il a tout le loisir de poursuivre ses
activités lucratives avec les oligarques russes et dautres. Convoqué par les
commissions d’enquête de l’Assemblée nationale et du Sénat, il ment comme il
respire. Un homme de confiance, je vous dis ! Et magicien en plus :
il fait disparaître au moment d’une perquisition un coffre-fort de chez lui qui
aurait contenu des « choses » compromettantes. Il continue à se
moquer du monde et ne respecte pas les obligations que la justice lui impose,
comme s’il était très au-dessus des lois. Il a pourtant cinq affaires
judiciaires en cours sur la casaque… De la toute-puissance à la cabane le
passage est direct. C’est bien fait ! Y restera-t-il ?
L’affaire d’état demeure. Le nouveau monde de Macron sent
déjà le vermoulu. Une drôle d’odeur se dégage des ors du pouvoir.
Jean-Marie Philibert.