les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

dimanche 26 septembre 2021

La grenouille et le bison

 

Le bison et la grenouille

         

La grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le bœuf … vous connaissez.

Une nouvelle version est en cours sur le terrain … diplomatique… va-t-on dire.

Le petit pays

Il était un petit pays, enfin pas si petit que ça, mais qui avait perdu de son lustre, de sa puissance impériale, en se faisant mettre à la porte de ses colonies pour se replier sur un hexagone tricolore, en devenant un pays comme les autres, dont les habitants se prenaient un peu pour le centre du monde. La modestie n’était pas leur vertu cardinale. Les chefs d’état successifs qui l’avaient dirigé avaient flatté cet orgueil national lié à une puissance passée et à une culture qui avait beaucoup d’admirateurs. Il faut dire qu’ils avaient le toupet nécessaire, faute d’avoir la lucidité qui aurait pu les éclairer. Le jeune blanc bec qui avait dernièrement pris les rênes du pays sans doute plus que les autres.

Un grand pays

Ce petit pays dont l’industrie était en souffrance, s’était fait une solide réputation dans la fabrication et le commerce des armes, sans être bien regardant sur l’utilisation que des clients  sans éducation, et même parfois sans morale, pouvaient en faire. Ainsi donc on restait au cœur de guerres pas jolies-jolies auxquelles nos armes participaient. On avait beaucoup de mal à trouver des clients présentables. Jusqu’au jour où un grand pays bien éloigné, mais propre sur lui, manifesta un intérêt évident pour nos sous-marins et s’engagea à nous en acheter quelques-uns. Une aubaine et une occasion de se  refaire la cerise morale ! Grâce à l’Australie. Et nous voilà au travail…

Et le maître du monde

C’était sans compter sur celui qui se prend pour le maître du monde, le chantre du capitalisme mondial, le grand organisateur  de la toute-puissance étasunienne qui veut voir les peuples à sa botte. Sitôt dit, sitôt fait, les Australiens se couchent devant le grand manitou américain, s’excusent d’avoir succombé aux charmes des sous-marins français, pour acheter les sous-marins américains qui pourraient peut-être leur servir pour aller faire le ménage et un peu de grabuge en mer de Chine, si nécessaire.

Parce que c’est bien connu il faut toujours se méfier des Chinois.

Le bœuf (pardon le bison) américain qui venait d’être élu en remplacement de la bourrique insupportable qui l’avait précédé, ne se laissa pas émouvoir par les véhémentes protestations venue du marigot français où  un chœur de grenouilles s’étaient mis  à coasser des chants presque guerriers contre les bisons d’outre Atlantique, sans principe, sans éducation. Les bisons en question, sûrs de leur supéiorité, ne cherchaient pas à en rajouter dans l’humiliation infligée à la grenouille française.

Le syndrome mortel

Le bison en chef a même téléphoné à la grenouille en chef, la conversation est restée secrète, mais des indiscrétions nous ont confirmé que notre grenouille à nous, fidèle à elle-même a joué les matamores, jusqu’au moment où le bison lui a raccroché au nez, après un « SHIT » retentissant.

La grenouille ulcérée, dans une rage folle, prise d’un orgueil démesuré, d’une ambition sans limite, devant tant de mépris, est victime du syndrome mortel de La FONTAINE.

Rappel : «  Une grenouille vit un boeuf qui lui sembla de belle taille. Elle qui n’était pas grosse comme un œuf, envieuse, s’étend et s’enfle et se travaille pour égaler l’animal en grosseur…La chétive pécore s’enfla si bien… qu’elle creva. 

Jean-Marie PHILIBERT

 

lundi 20 septembre 2021

ne pas être un peuple dindon

 

Ne pas être un peuple dindon !

 

(pardon  pour les dindons)

Le Macron avec l’assurance imperturbable de celui qui veut se payer la démocratie avance ses pions dans la perspective de 2022 pour tenter de nous refaire le coup de 2017, ni à droite, ni gauche, ni au centre d’ailleurs.

Ailleurs, c’est le mot qui lui va bien, avec ceux qui aiment le pouvoir personnel d’un homme plus fortiche que les autres, avec ceux qui ont la nostalgie du bonapartisme, avec ceux qui n’aiment la démocratie que lorsqu’elle peut servir leurs intérêts, avec ceux pour qui l’horizon politique se résume en embrouillaminis de toutes sortes, avec tous ceux qui ont compris que, plus cela sera confus, plus ils pourront se remplir les fouilles et celles de toute leur classe. La liste n’est pas exhaustive, et les ralliés de tous acabits peuvent s’agréger à la troupe de parvenus qui remplissent depuis cinq ans les allées du pouvoir.

L’homme de la situation

Après l’épisode gilets jaunes, au beau milieu d’une pandémie très utile d’ailleurs, le Macron multiplie les engagements qui n’engagent à rien, le climat, le social, vous allez voir ce que vous ne verrez pas…Il se répand à Marseille, sans convaincre. Il multiplie les postures internationales sans effets sur le cours des choses, s’assied avec allégresse sur la souplesse d’échine d’une bande de serviles affidés, pour se servir des événements afin de montrer qu’il est et reste l’homme de la situation et qu’en 2022 cela devrait marcher. En distribuant le pognon, « quoi qu’il en coûte ». En faisant que les plus riches le soient toujours plus. En réduisant les partis au rôle de faire-valoir. En se servant de l’emprise médiatique à sa botte, en jouant au maximum sur les réseaux sociaux. Djeun je suis, djeun je reste. La situation est mortifère pour la démocratie et à quelques mois des présidentielles il est malheureusement loisible d’en mesurer les dégâts sur les partis en particulier et sur les records d’abtention.

De la droite à son extrême

La droite ne sait plus où elle couche, depuis que certains de ses membres partagent la couche présidentielle ? A-t-elle une politique de rechange, ferait-elle pire, aussi mal, aussi libéralisme échevelé ? L’espace lui est chichement mesuré et ils sont pléthores à tenter de se le disputer. Le centre se dit que le Bayrou a enfin trouvé chaussure à son pied et un os à ronger, autant s’en satisfaire.

Reste une extrême droite dans le rôle du repoussoir qui ne sait plus s’il faut jouer au grand méchant et flatter ce qu’il peut y avoir de plus vil et barbare dans les soubassements d’un peuple en souffrance, racisme, exclusion, hypertrophie d’un moi qui vit du rejet des autres, ou bien tenter de se la jouer présentable, bien élevé, presque comme les autres ( observez attentivement Aliot).

Du morcellement à l’unité

Macron peut donc continuer sa route, les sondages lui ouvrent la voie : l’électorat est divisé selon une tendance lourde et déjà un peu ancienne des trois tiers, un pour la Marine, un pour la réaction sous la forme que vous voulez et un, morcelé, pour la gauche, d’où un duel annoncé avec le FN dont il sortirait vainqueur.

Un tel morcellement doit aussi beaucoup à l’entreprise macronesque puisqu’il en est issu, il fut ministre socialiste, il s’en est servi pour brouiller les pistes. Il illustre ainsi, on ne va pas être trop méchant, disons une certaine incapacité du parti socialiste à jouer la carte des transformations sociales et de la justice du même nom. Que le parti socialiste reste un maillon faible est une évidence, que tous les socialistes sincères ne s’en satisfassent pas aussi. Je reste convaincu que toute perspective de changement impose cependant d’en faire une composante de cette gauche qui est la seule à même d’y travailler. Au même titre que toutes les autres composantes, insoumise, écolo, coco… Comme il est possible d’y travailler dans les municipalités, les départements, les régions. Que chaque composante de cette gauche tente sa chance en tentant d’occuper un terrain préélectoral personne n’est en mesure de l’empêcher. Le PCF a sans doute raison à ce moment de ne pas s’exclure d’une course qui ,quoi qu’on dise, n’a pas encore commencé, parce qu’il incarne ce qu’il y a de plus crédible comme capacité à bousculer les règles du jeu, à condition de s’appuyer sur un terrain social qui y aspire, d’où le rôle essentiel des organisations syndicales. Mais avec l’ambition que le moment viendra, personne ne sait quand, mais le moins tard sera le mieux, où, pour ne pas être le peuple-dindon-de-la-farce il faudra se rassembler, se réunir pour peser de tout le poids nécessaire et décrocher la timbale. Le PCF est le mieux armé pour le faire Il faut se dire et se redire que beaucoup du peuple qui croit dans cette gauche y aspire.

Jean-Marie Philibert

dimanche 19 septembre 2021

le paradoxe de Bébel

 

Le paradoxe de Bébel…

Tant que notre capacité à produire des images a été limitée, nous (enfin ce sont nos grands ancêtres) n’avons eu de cesse pour les partager, pour les faire durer, pour nous en servir et influencer les consciences de les inscrire dans la pierre de nos églises, sur les murs de nos lieux sacrés, sur les enluminures de nos livres précieux. Nous avons ainsi fabriqué nos icônes et le monde judéo-chrétien a excellé dans cette démarche, il nous a bien pourvu en images pieuses que nous avons fait perdurer jusqu’à ce que, grâce à des avancées scientifiques et techniques exponentielles nous soyons en mesure de multiplier sans fin nos capacités à transformer notre univers  en monde d’images (pieuses et moins pieuses) qui prennent quasiment toute la place du réel. Elles donnent peut-être désormais l’impression que nous ne sommes plus que les spectateurs de nous-mêmes, que les images sont la vie, que le cinéma la résume à merveille et que les acteurs que nous y voyons ne sont que des autres nous-mêmes, et donc aussi des êtres chers que nous pleurons quand nous les perdons. Ainsi nous pleurons Bébel. Icône parmi les icônes. Le surnaturel est devenu le réel. Le réel, le surnaturel.

Le copain

Bébel, ce n’est pourtant pas un dieu de l’Olympe, Bebel, c’est un copain que nous perdons, un vieux copain qui n’en a pas raté une pour nous agrémenter la vie. Pour nous faire rêver à ce que nous n’avions pas, aux succès qui nous échappaient, aux pouvoirs qui ne sont pas les nôtres, aux cabrioles que nous n’osons pas faire, aux déconnantes qui pourraient nous faire tant de bien ;

« JE SUIS MORT. ET VOUS ME REGRETTEREZ,  PARCE QUE C’ETAIT MARRANT », une citation du « Marginal » retrouvée et mis en exergue par Libé. Cela résume le personnage et explique la pluie d’étoiles filantes traversant nos souvenirs que les titres de ses films suggèrent. Des titres qui parlent et parleront. « A Bout de souffle, Le Magnifique,  L’as des as, le Marginal, Pierrot le Fou ». Des films populaires, exigeants, surprenants parfois, « Leon Morin prêtre, le Voleur, Stavisky… » et tant d’autres. Le compagnonnage avec les plus grands réalisateurs. Des films qui marchent et d’autres qui marchent moins.

Rebondir

 Mais toujours, la volonté de rebondir, en retrouvant par exemple le théâtre, son premier amour, le seul métier digne aux yeux de ses parents tant aimés. Une bataille pour la vie qui n’en finit pas et qui l’aide à affronter les difficultés d’un destin qui échappe et qu’il retient avec toutes ses énergies. Une icône éminemment sympathique, venue d’un monde cinématographique et médiatique qui ne l’est pas toujours, une image positive qui justifie notre peine. Une image vraie…

Parce qu’elle est vraie, elle a réveillé la peine des habitants de Villerville, une plage normande,où il avait  tourné avec Gabin Un singe en hiver, il y a des lustres et qui sont allés écrire sur le sable de la plage « Bebel nous te t’oublierons pas ».

Sur les tréteaux de la vie

Celle des amoureux du théâtre qui retiennent son échec au Conservatoire, transcendé en succès (mérité) par une bande de copains à jamais fidèles qui le portent en triomphe sur scène,  pour secouer le jury, comme si sur scène tout devient possible. Comme si la vraie vie, la vérité des êtres, la puissance du talent étaient d’abord sur les tréteaux.

Mais pour Bébel, les tréteaux et la vraie vie ont participé du même destin paradoxal qui a fondé son succès.

N’oublions pas de rappeler qu’il fut un temps président du syndicat CGT des acteurs français de 63 à 66. Ils sont très nombreux les commentateurs officiels, allergiques à la vraie vie et au syndicalisme, à l’avoir oublié. Il y a pris la succession, excusez du peu, de Gérard Philippe. Le syndicalisme l’avait mis sur de bons rails.

Le paradoxe de Bébel ferait donc se rejoindre le surnaturel et le réel dont on parlait au début, en d’autres termes, l’art et la vie, à faire de nous L’as des as que nous ne serons jamais, à nous raconter une bébelle vie d’images que nous prenons un peu comme la nôtre, pour notre plaisir.

Jean-Marie Philibert