les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

mardi 25 octobre 2022

Folie et indignité

FOLIE ET INDIGNITE Il est des actes qu’un entendement humain a beaucoup de mal à cerner et même à dire. Il reste « la folie » pour en parler, pour dire l’indicible ou tenter d’en approcher. C’était il y a plus d’une semaine : une jeune collégienne, Lola, était sauvagement tuée à Paris, dans le 19° arrondissement. Son corps était retrouvé dans une malle en plastique. Ses parents gardiens d’immeubles ne la voyant pas revenir à la sortie du collège avaient donné l’alerte. Les recherches s’organisent : dans la soirée un appel signale à la police le corps d’une petite fille dans une malle déposée dans une cour d’immeuble. Le corps est mutilé, la jeune fille est morte asphyxiée. Le meurtre d’une enfant : on est dans la barbarie. Une tragédie Rapidement parmi les suspects interpelés, Dahbia B ; une marginale de 24 ans arrivée en France d’Algérie il y a six ans, fait des déclarations confuses, mais qui témoignent de sa culpabilité et des sévices qu’elle aurait fait subir à la jeune fille dans l’appartement de sa sœur qui loge dans la même résidence que la famille de la collégienne. Une expertise psychiatrique est réalisée. Les mobiles du crime sont pour le moment impossibles à cerner. Il semble très difficile de faire la lumière sur une tragédie dont on imagine la douleur brutale, incommensurable qu’elle a provoquée chez les parents, les proches de Lola. Recueillement Il n’est pas dans mon propos de disserter sur l’événement, sur ce qu’il révèle, sur l’émotion plus que compréhensible qu’il suscite, sur l’inhumanité absolue de ceux qui peuvent s’en rendre coupables. Le monde médiatique fera le nécessaire. Sans avoir la réponse à la compréhension d’un acte de folie pure qui devrait avant tout nous servir à renforcer notre solidarité pour être plus fort face à la mort provoquée, absurde. La demande des parents va dans le sens de ce recueillement : « Dans l’effroi et la douleur dans lesquels nous sommes, nous aspirons à la paix et au recueillement pour faire notre deuil. Pour la mémoire de Lola, nous souhaitons que les diverses cérémonies se déroulent dans un esprit de sérénité et de calme, loin des agitations politiques et médiatiques ». Se servir de l’horreur Or la suspecte était en situation irrégulière, elle faisait l’objet d’une obligation de quitter le territoire qui n’a pas été exécutée. D’où la récupération politique d’une extrême droite, sans conscience, ni dignité, (« la France est coupable ! ») qui a appelé à des rassemblements, ou des actes publics (ainsi devant la Mairie de Perpignan) elle se sert de l’horreur de ce geste, de l’émoi profond de l’opinion publique pour y déverser les trop plein de haine dont les Zemour, Le Pen, Bardella, Aliot et consort ont fait leur marque de fabrique. La folie et l’indignité font bon ménage dans nos temps troublés. Jean-Marie Philibert.

lundi 17 octobre 2022

La cascade de cagades

Le vote du budget, le 49/3, ou la chronique d’une « cagade » annoncée. Je ne vous cacherai pas que la métaphore de la « cagade » qui a de fortes racines catalanes n’est pas d’un goût raffiné, mais elle s’est imposée à moi comme une évocation parlante, trébuchante et odorante de la politique macronienne. Je vous demande de bien vouloir excuser un écart de langage. Mais autant appeler les choses par leur nom. Des cagades connues La bande au pouvoir nous entraîne avec une application plus que soutenue vers la « cagade » en question dans le titre. On peut même dire qu’elle les cumule. Nous avons une pleine armoire de c… en préparation. Il y a la volonté aveugle d’imposer une réforme des retraites à une société qui n’en veut pas, où il est déjà difficile de maintenir en activité beaucoup de ceux qui s’en approchent, mais Macron dès la campagne électorale l’a mise dans le paysage, comme s’il n’avait rien compris au mouvement de 2020. Comble d’outrecuidance, il considère que la majorité qui a voté pour lui aux présidentielles a voté pour sa réforme des retraites… alors qu’il s’agissait tout simplement de s’éviter la Marine. Même si l’on en parle un peu moins, cette c… est dans le paysage et l’empuantit, normal ! La réforme de l’indemnisation du chômage en est une deuxième qui vise tout simplement à faire que ces périodes douloureuses pour ceux qui ont à les vivre le soient encore plus pour les inciter, à retrouver très vite un emploi et à accepter d’être toujours un peu plus exploités. Dans ces deux domaines, les partisans de la réforme, en clair la droite et les réactionnaires de tous poils, considèrent que les travailleurs sont des fainéants en puissance que leur souci premier est de continuer à palper (comme on disait avant) et de ne rien foutre. Il s’agit donc de les mettre au pas et de les jeter dans les bras du patronat. Aux cagades d’aujourd’hui Les c…, elles nous poursuivent. Le vote du budget2023 est dans l’actualité. Il démontre la même volonté de nier les besoins sociaux et de s’asseoir sur la démocratie. Le gouvernement n’a qu’une majorité relative au Parlement, qui ne lui suffira pas pour le faire adopter. Il n’est pas sûr de trouver des alliés pour lui prêter main forte, d’autant qu’en dehors de quelques mesures conjoncturelles, il ne prévoit rien pour répondre à une situation … difficile. Regardez les tensions sur le front des luttes sociales et les réponses, plus que tardives, et dilatoires du pouvoir. La seule mesure qu’il n’a pas tardé à envisager c’est l’utilisation du 49/3, un article de la constitution qui permet au gouvernement de faire passer un texte de loi, sans vote, sous couvert du rejet de la motion de censure qu’un dixième de l’Assemblée se doit de déposer. Bonjour l’entourloupe… programmée et l’impossibilité pour les élus de jouer leur rôle. La cascade… Au moment où j’écris ces lignes, nous n’y sommes pas tout à fait, mais la menace se précise. Les mouvements sociaux grondent. Les réquisitions pleuvent. Les grèves continuent. Les parlementaires proposent des amendements, même des alliés de Macron, pour l’embêter sans doute un peu, en rajoutent sur la taxation des surprofits. Ce jeu normal de la démocratie semble insupportable pour le pouvoir qui annonce le 49/3. La c… est prête à être dégoupillée… Mais après elle, il peut y en avoir d’autres : quelle réaction face à la motion de censure ? Une dissolution peut-être. Nouvelle c…Quand le pouvoir est aux abois, il ne peut chercher que dans la fuite en avant une issue improbable… Comme disait Ionesco dans la « Cantatrice chauve » : quelle cascade de cagades ! Jean-Marie Philibert

mardi 11 octobre 2022

Roulé(e)s

Roulé(e)s… Non ! Avec la bande au pouvoir il n’y a pas que les cols qui seront roulés dans les temps hostiles que nous affrontons : les futurs retraités sont de la « fête », les chômeurs actuels et futurs aussi, les salariés continuent à être roulés… dans la farine d’augmentations salariales toujours attendues, les jeunes continuent à être tourneboulés par un parcours-sup, course d’obstacles. Tous roulés. L’uniforme Et pour que le spectacle soit total l’uniforme de l’hiver, crise énergétique oblige, sera col roulé pour tous, pour Manu qui veut donner l’exemple, pour Maire qui veut faire peuple et pour tout un chacun. C’est la grande nouveauté du capitalisme ultra libéral, nous imposer un uniforme qui nous fait bien comprendre que l’adversité est devant nous, qu’il faut s’y préparer et suivre les préceptes d’un gouvernement qui est à la manœuvre pour nous infantiliser tous les jours un peu plus. Pour nous faire oublier l’essentiel : les difficultés de nos vies dont il se moque, les injustices dont il se nourrit, l’exploitation d’une classe laborieuse qui produit des richesses pour les puissants d’ici et d’ailleurs. Dans une période, plutôt guindée, celle des années 60, le pull col roulé informe et démesuré dont je m’affublais représentait comme un signe de révolte contre une société qui avait gardé le souci du paraître… Ma mémé n’était pas contente. Quelques décennies plus tard, au début du troisième millénaire, cela devient le signe d’une soumission à l’ordre dominant, et à ses contraintes imbéciles. Les campagnes menées quotidiennement pour nous convaincre des semaines à l’avance que l’on va se geler pour cause de pénurie énergétique, et qu’on sera incapable de s’habiller en conséquence reflètent l’indigence du pouvoir et de ses porte-voix. Serions-nous devenus infantiles ? Couvre-toi « Couvre-toi bien, mets un cache-col, prends des gants », me disait Mémé quand j’étais petit… Déjà ses conseils m’agaçaient. M’entendre dire à mon âge par une bande d’incapables que je dois mettre un col roulé pour lutter contre le froid m’insupporte et j’y vois comme une raison supplémentaire de contester un pouvoir à vomir, dans lequel nous ne pouvons pas nous reconnaître… et pas seulement à cause de ses conseils vestimentaires. Nous sommes très nombreux ! Les plus nombreux sans doute. Nous contestons souvent, régulièrement, nous ne renonçons pas à nos combats pour la justice, la solidarité, la démocratie. Mais, pour dire vrai, nous le faisons de façon quelque peu désordonnée, nous avons du mal à nous unir, à nous réunir. Rappelons les péripéties des dernières élections présidentielles et législatives, l’union fut laborieuse. Observons la difficulté à construire la plus large union syndicale. Même pas froid Et pourtant nous savons tous que toutes ces unions sont des passages obligés. Il n’y faut pas l’uniformité de cols roulés généralisés, mais il y faut les bigarrures de tenues colorées, mélangées et séduisantes d’un peuple qui n’a froid, ni aux yeux, ni au reste, et qui est en mesure de construire son printemps. Jean-Marie Philibert

lundi 10 octobre 2022

Annie Ernaux

Annie Ernaux nobélisée… Annie Ernaux est la 17 ° femme à obtenir le prix Nobel. Il faut s’en réjouir sans retenue. Pour elle d’abord, un hommage international du plus haut niveau est ainsi rendu à son travail littéraire, à sa force, à sa « justesse », comme elle dit, à sa résonance dans les consciences. Il faut s’en réjouir aussi pour toutes les femmes qui tentent de faire bouger le monde dans ces temps compliqués. Il faut s’en réjouir aussi pour les classes populaires dont elle se revendique et qu’elle a fait entrer en littérature. Sa responsabilité est de témoigner de ce monde et d’elle dans ce monde, de son expérience de femme, de mère, de son expérience du couple, de l’amour. Avec humanité, mais sans concession. Le regard et la plume très acérés. Une écriture personnelle Elle l’a d’abord fait dans des romans, ensuite depuis « La Place » en 1984, Annie Ernaux est passée à une écriture plus personnelle, il y est question de son père mort en 1967. « Le roman n’était plus possible et toute mon écriture en a été bouleversée. J’ai abandonné la fiction ». Elle nous parle donc du café-épicerie de ses parents, de son enfance, de son adolescence, des drames qui s’y jouent et qui la poursuivent. C’est «La Honte ». Il y aura aussi les livres de l’âge adulte comme « Passion simple » et « L’Occupation »qui sont des évocations sans concession de la passion, de la jalousie. Mais elle ne s’enferme jamais dans l’évocation intimiste, elle fait de son récit, de ses récits, des ouvertures vers le monde, vers les autres, en particulier ceux qui partagent ses origines et qui n’ont que très rarement les honneurs de la littérature. Son singulier devient universel, c’est le titre de l’article que l’ Huma lui consacre et qui dit l’essentiel de sa démarche. Une démarche servie par une écriture sans ornement, sans fioriture : il ne s’agit pas de séduire le lecteur, mais de le toucher par ce qui est, par ce qu’elle vit un peu comme nous tous. Lire, relire Ce prix Nobel est une occasion de relire ou de découvrir un auteur qui est aux antipodes de nos temps d’artifices. Pour les connaisseurs relisez Annie Ernaux, tout ! Pour ceux qui la découvriraient commencez par « Les Années » qui mêle vie personnelle, histoire collective, dans une traversée de notre siècle dont elle partage les combats des femmes, des hommes, des travailleurs, comme nous tout simplement.