les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

jeudi 21 février 2013

non habemus papam...


Non habemus papam, sed hominem habemus.

J’ai dû réactiver mes connaissances latines fort anciennes pour trouver à mon billet d’humeur un  titre à la hauteur de l’événement. « Habemus papam » c’est le cri de liesse des catholiques qui voit la fumée blanche s’échapper de la chapelle Sixtine et qui annonce aux chrétiens la bonne nouvelle, « Nous avons un pape ». Cela signifie que les cardinaux en ont fini de s’écharper, dans la clôture de leur conclave, pour décrocher la timbale. Ils ont désigné celui qui sera le chef de leur église, celui qui, comme Dieu, sera infaillible, celui qui  succèdera à Saint Pierre, celui qui a priori va voir grandes ouvertes toutes les portes  de la sainteté et du paradis. Puisque, quand il arrivera devant Saint-Pierre justement, il sera en pays de connaissances et pourra discuter d’égal à égal avec le compagnon de Jésus. C’est un petit avantage sur le commun des mortels. C’est dire que sur terre déjà le pape participe de la divinité, il la représente, il l’incarne, il en est pour nous pauvres Terriens l’image à la fois magique et vivante. Il lui faut un cadre à la hauteur pour cela, la basilique Saint Pierre, les ors du Vatican. Il lui faut une cour : tous les mitrés qui l’entourent avec sollicitude. Il lui faut des adorateurs, tous les pèlerins qui viennent devant la basilique tout au long de l’année recevoir la bénédiction de sa sainteté. Sa sainteté !
Ras la mitre.
Eh bien Benoît XII, la sainteté, il a l’air d’en avoir ras la mitre,  puisqu’il vient d’annoncer  au monde entier une nouvelle exceptionnelle : il démissionne. Le dernier pape à démissionner l’avait fait au 15° siècle. Nous vivons donc un événement plus que rare.
Un événement où la réalité rejoint la fiction.
Rappelez-vous le dernier film de Nanni Moretti intitulé justement « Habemus papam », il nous raconte le destin d’un cardinal qui lors d’un  conclave chargé de désigner un nouveau pape  et dont il est un membre relativement obscur se trouve à la surprise générale élu par ses pairs qui manifestement ne veulent pas de la patate chaude du pontificat pour continuer dans les coulisses du pouvoir à tirer toutes les ficelles.  Et c’est là que Michel Piccoli qui joue le rôle du malheureux élu,  dans un moment de lucidité et de révolte, prend la fuite dans les rues de Rome pour goûter à une liberté  dont il sent qu’elle va lui échapper. Il veut rester un homme parmi les autres.  Quand on sait  les ambitions réelles,  les intrigues avérées, les enjeux de pouvoirs, la grandeur de la fonction censée représenter le couronnement  ( dans tous les sens du terme) de toute une vie, on se dit que ce ne peut être là que de la fiction. Quand on décroche le gros lot, on le prend sans tergiverser.
De la fiction au réel.
Eh bien avec la démission de Benoît XII la réalité rejoint la fiction : le pape redevient homme, « Hominem habemus ! ». Nous avons un homme !
Comme le plus simple titulaire d’un CDD ou d’un CDI qui considère que le boulot qu’on lui impose ne lui va plus, il rend son tablier, il rentre à la maison, il laisse tous ses ennuis aux petits copains. Et il met ainsi un terme symbolique à une forme de théocratie de moins en moins répandue, mais cependant vivace dans certains esprits pour qui les pouvoirs naturels et surnaturels participent d’un même mystère, bien au-delà de l’humanité souffrante et trébuchante.
En démissionnant, ce pape qui m’apparaissait profondément antipathique rejoint pour moi le camp de cette humanité et se pare d’une aura dont le sens pourrait ouvrir la voie à une véritable aggiornamento de l’église catholique si …. si…. si….. les traditions accumulées,les conservatismes incrustés, les scléroses séculaires  étaient en mesure de laisser passer un peu d’air frais et humain. Ce dont je doute fortement.  Compte tenu de ce que je sais de l’institution.
Cela ne préjuge en rien  du respect  que j’ai pour ceux  que leur foi  inscrit dans les valeurs des religions chrétiennes qui peuvent être empreintes d’humanité. L’exemple du pape le prouverait si nécessaire, lui qui n’hésite pas à quitter la sainteté pour l’humanité.
Jean-Marie PHILIBERT.

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