EUH…EUH…EUH…
Pendant de longs mois à l’Elysée on n’a pas pris au sérieux
la gravité du mal dont souffrait le président ; on se rendait compte que
les hésitations étaient une donnée forte de son caractère, que son onomatopée
favorite « Euh… Euh… Euh ! » croissait et se multipliait tous
les jours un peu plus, on lui donnait des conseils pour qu’il soit plus
entreprenant, « vas-y François, ose ! ». Rien n’y faisait. Et
plus le temps passait, plus le mal empirait jusqu’à ces dernières semaines où
tous les jours la valse-hésitation tournait à une telle vitesse qu’elle pouvait
donner le mal de mer aux cœurs et aux esprits les plus aguerris.
J’avance,
je recule.
Et j’avance… et je
recule, et je te fiscalise l’épargne populaire et je ne te la fiscalise plus.
Et je te mets en place l’écotaxe… et je te la suspends… où ? Et je laisse
Valls expulser Léonarda et sa famille et puis je lui dis de revenir toute
seule. Et je dis aux ministres de la fermer et je ne dis rien quand ils
l’ouvrent. Et je vais taxer les footeux à 75 %, et peut-être que je vais
reculer là aussi. Je balance, je flotte, je me tâte, j’atermoie, je tergiverse.
Grand conciliabule dans l’entourage présidentiel : on va
dans le mur ! Il faut faire quelque chose ! Le pédalo va
couler ! Les idées fusent : il
faut le doper ! Il faut modifier son régime alimentaire ! Il doit
faire plus de sport ! Il devrait aller consulter les voyantes ! Il
doit repartir faire la guerre au Mali, ça lui avait fait du bien. Il faut que Ségolène s’en occupe à nouveau.
Ce n’est pas possible de continuer ainsi, il doit se soigner, pourquoi pas une
psychothérapie ?
Sur le
divan.
ET de convoquer subito-presto à l’Elysée un des plus grands
pontes de la connaissance des profondeurs de l’âme pour une première séance
d’urgence. Il nous fait asseoir le François sur un des divans du palais et
l’invite à parler de lui, de la conscience qu’il peut avoir à décider une
chose, puis son contraire.
« Euh … Que
dirais-je ? Je ne sais pas si je
dois dire ou ne pas dire ! C’est dur de dire quand on ne sait pas quoi
dire ! Et faire, c’est pire, que faire ? Je ne sais pas quoi faire…
M’attaquer à la finance, comme je l’avais dit il y a bien longtemps, mais ils
vont me faire du mal si je le fais… et je suis un tendre. Me disputer avec
Monsieur Mittal parce qu’il ferme Florange, il est plus fort que moi. Empêcher
les usines de fermer, augmenter les salaires, développer le service public,
donner aux jeunes des perspectives, la tâche est si grande qu’elle annihile ma
volonté. Je suis né mou, voyons ! Et ce n’est pas le grand bain que j’ai
pris pendant des années dans les méandres vaseux des politiques économiques et
sociales, toujours très molles, mises en place par les socialistes qui m’a fait
du bien. Je me suis ramolli tous les jours un peu plus jusqu’à devenir le mou absolu. Peut-on en
sortir ? Ai-je envie d’en sortir ? Je ne sais pas… bien sûr, comme
d’habitude. »
Une cure de
vraie vie.
C’est là que notre thérapeute, perplexe devant l’incapacité
de sa science à combattre une telle psychose-ramollo, a été traversé par une
idée élémentaire mais pleine de bon sens. Pourquoi ne pas user d’un
contrepoison et injecter de la lutte des classes à outrance dans un esprit qui semble l’avoir complètement oubliée et
qui s’est totalement endormi dans les bras du libéralisme financier ? Il réunit
l’entourage du président et propose d’envoyer François faire un stage, non
rémunéré bien sûr, dans un abattoir de Bretagne qui va fermer, dans une usine
de PSA qui est menacée, dans un hôpital touché par les compressions de
personnels, dans un collège du 9-3, et cerise sur le gâteau à Pôle-Emploi où il
sera chargé du service des réclamations. Ce sera l’électrochoc de la vraie vie.
Et peut-être que le déclic se produira…
Je pense qu’il n’est pas le seul à en avoir besoin…
Jean-Marie PHILIBERT.
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