Irrationnel !
(Vous avez dit irrationnel)
Pourquoi faut-il que nous fassions aussi facilement
confiance à l’irrationnel et à tous les margoulins qui s’en réclament, dans des domaines aussi cruciaux pour notre
avenir que la santé (il s’agit là de notre devenir personnel), ou que la
politique (c’est là notre avenir commun qui est en jeu) ? C’est une interrogation, qui me poursuit,
quand je vois des personnes que je crois sensées prendre prétexte de résultats insuffisants de
la médecine traditionnelle, pour aller consulter tel ou tel illuminé, à la
faconde plus impressionnante que le savoir.
Ne pas douter du
père Noël.
Les pouvoirs de la sorcellerie ne seraient pas donc morts,
et même des sociétés développées comme les nôtres ne rechigneraient pas à
redonner un soupçon de dignité à des formes de pensées magiques avec l’espoir
qu’elle va réussir là où la bonne et vieille raison a du mal à vaincre les
obstacles. Le pouvoir des illusions est une caractéristique de l’infantilisme
de la pensée : c’est d’ailleurs pour cela qu’en avançant en âge on se met
à douter de l’existence du père Noël. Eh bien ! Ils sont encore nombreux à
n’en pas douter !
Dans le domaine politique on ne peut que constater une même
dérive. Certes les questions y sont souvent complexes, les approches fort
différentes, les enjeux d’importance, et la formation et l’information du
citoyen pas toujours assez poussées. Certes les propagandes jouent leurs rôles
perturbateurs. Certes le petit écran nivelle les consciences en présentant les
choses comme les voix de « nos maîtres » l’imposent. Dans un autre
temps on aurait parlé de l’idéologie dominante et de ses valets qui parlent
dans le micro, face à la caméra, ou qui écrivent dans la presse bien-pensante.
On pourrait aussi évoquer les intérêts financiers qui sont à la manœuvre dans
ces opérations de bourrage de crânes.
Débourouner
profond.
Il n’empêche : ils sont nombreux à « débourouner
profond » quand ils disent envisager à donner leurs suffrages pour les
prochaines municipales à un parti
d’extrême droite qui partout où il est passé n’a laissé que turpitudes, misère
et désolation. Et qui dans l’histoire s’est mis au service des haines les plus
criminelles. Dans cette démarche aujourd’hui,
l’ignorance la plus crasse rejoint le racisme le plus abject en
s’inventant un bouc émissaire : l’immigré qui serait la cause de tous nos
maux. Et les tentatives de rationalisation pour combattre une argumentation
violemment xénophobe sont difficiles, si ce n’est souvent vouées à l’échec.
D’autant que les difficultés sociales vont croissant.
Soyons des
Béranger.
Peut-être faudrait-il leur faire lire ou relire une pièce
d’Ionesco « Rhinocéros » éclairante sur les dérives sociales et
personnelles qu’entraîne une pensée qui se coupe du réel pour s’enfermer dans
des certitudes sans fondement, si ce n’est le grégarisme imbécile. Dans une
ville d’Europe, tous les hommes deviennent rhinocéros, inexorablement,
imparablement : toutes les formes de résistances échouent jusqu’à la
résistance douloureuse et solitaire de Bérenger qui, au nom de sa liberté, de
son humanité, de sa raison, se bat contre cette métamorphose.
« Le ventre est fécond… », la fatalité serait-elle du côté de l’irrationnel ? Combattons toutes
les dérives qui tournent le dos à l’essentiel : le combat quotidien de
tous les Bérenger pour ne pas céder au délire, pour résister et se battre pour
une vie meilleure et pour dénoncer tous les mensonges qui pourraient nous en
détourner.
Et cela ne concerne pas que les élections municipales :
les croyances dans des démarches qui réunissent les carpes et les lapins, comme
celles des bonnets rouges bretons le
rejet magique de toutes formes d’impôts, toutes des remèdes-miracles des
docteurs YAKA et FAUCON qui ont réponse à tout, les croyances aveugles dans des
promesses intenables sont du même ordre, elles nous abusent et nous détournent
de la seule démarche qui, rationnellement,
a dans l’histoire porté quelques fruits, même s’ils ont été rarement à
la hauteur de nos espérances : celle de l’engagement citoyen et de la
résistance des consciences.
Ce samedi 29 novembre, dans la froidure d’un hiver naissant,
c’est elle qui le matin comme l’après-midi était à l’œuvre, Place de la
République à Perpignan. Très, très loin
de l’irrationnel.
Jean-Marie Philibert.
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