Un combat
permanent
La
laïcité ! Une bataille qui semble ringarde et d’un autre âge et qui
ressurgit tout aussi régulièrement lors de toutes les crises sociales,
politiques, démocratiques que nous avons à affronter. Avec ses vieux routiers,
ses néophytes, ses passionnés, ses indifférents, ses adversaires, ses
rénovateurs.
La laïcité
reste pour moi l’ultime rempart contre ceux qui n’en auront jamais fini de
regretter l’ancien régime et ses formes multiples et variées d’obscurantisme,
fantasmées comme de grands moments malheureusement perdus.
Revenir aux
sources
Avec
l’histoire, nous sommes confrontés dans un face à face qui n’en finit jamais
entre l’ancien et le nouveau : l’ancien fait toujours de la résistance
face au nouveau et le nouveau ne parvient jamais à tordre le cou définitivement
à l’ancien. Quand le débat tourne autour de la question aussi large et
controversée de la laïcité, le face à face semble s’éterniser et nous avons le
sentiment de tourner en rond. Et pourtant je reste convaincu qu’il y a urgence
à la prendre à bras-le-corps. Les événements tragiques de ce mois de janvier
2015 en apportent la preuve, si nécessaire. Mon humeur me pousse à revenir aux
sources.
Avec la
laïcité, nous avons mis en place au cœur de notre système démocratique une
valeur (et les pratiques, les lois et les règles, les us et coutumes, les
enseignements qui vont avec) qui est l’assise nouvelle sur laquelle
repose la république. Une assise totalement indépendante de toutes les
religions, et plus particulièrement de la religion catholique qui, pendant des siècles, avait constitué la
référence ultime et absolue de notre organisation politique, sociale, culturelle,
morale.
Cette laïcisation n’a pas été la seule œuvre
d’un jour ou d’une année (serait-elle
1905, année du vote de la loi de séparation de l’église et de l’état).
Elle a participé de tous les soubresauts de l’histoire, depuis essentiellement
le siècle des philosophes des Lumières, en passant par la révolution de 1789,
les luttes sociales du 19° siècle, jusqu’au siècle dernier qui a donné une
dimension universelle à cette ambition. Sans jamais y parvenir puisqu’elle
reste une spécialité en grande partie franco-française.
Remettre le
ciel à sa place
Et pourtant
l’universalité est son domaine puisqu’elle fait de leurs seules connaissances
rationnelles, de leur seule intelligence, le seul outil que les hommes ont pour
construire leur destin commun. Librement ! Sans référence aux croyances
multiples, de l’ordre de la foi, qui n’ont de cesse de vouloir soumettre la
connaissance à un surnaturel, à une transcendance, à un absolu qui sort de la
sphère de l’humain, mais qui a souvent la prétention de nous apporter clés en
main la réponse aux interrogations qui nous dépassent, ou aux savoirs qui nous
manquent.
Toutes les
religions ont vu du plus mauvais œil la place prise par la laïcité, faute
d’être en capacité de l’abattre : la bataille de tranchées n’a jamais
cessé. Avec la religion musulmane, comme avec l’ensemble des religions. Même si
avec la religion musulmane la situation est plus récente et plus compliquée à
cause de données sociales, culturelles, politiques et historiques qui peuvent
rendre plus difficiles les
communications et les échanges possibles.
Laisser
travailler les hussard(e)s de la république
L’école,
vecteur central de cette valeur qui est la trame de toute activité pédagogique
et éducative, est confrontée de plus en plus à ces difficultés (dans le même
temps où le service public d’éducation voit ses moyens réduits et ses marges de
manœuvre instrumentalisées). Elle se doit de faire face et elle le fait, mais
il faut en finir avec les projecteurs braqués sur les incidents mineurs pour
lui laisser une large responsabilité, à elle et à ses personnels, dans l’éveil
des consciences à une démarche libre et indépendante des groupes de pression de
tout acabit qui confondent vérité et révélation.
Les seules
révélations qui intéressent la laïcité, ce sont celles que les faits dans une
observation raisonnée et méthodique du réel, peuvent nous apporter, très loin
de tous les ciels d’ici, de maintenant ou d’avant, ou d’ailleurs. Et quand on
ne sait pas, on doute dans le respect total des opinions multiples que toute
connaissance en devenir ne peut que susciter. La lumière n’a rien à voir avec
les absolus de toute obédience, elle ne dépend que de la lucidité de notre
esprit libre et exigeant. A ce moment-là la laïcité a rempli sa fonction. Elle
est un combat permanent.
Jean-Marie
Philibert.
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