les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan
Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent
jeudi 28 juillet 2016
lundi 18 juillet 2016
la politisation de l'intelligence
La
politisation de l’intelligence
Nice : une nouvelle fois la course effrénée à la
surinformation, immédiate, totale, savante, surchargée d’experts en tous
genres, avec les images chocs qui vont avec, avec le pathos incontournable, et
les envoyés très spéciaux ou spécieux, comme vous voulez qui, en boucle, vous
disent qu’ils en savent bien peu.
Face à la mort aveugle, aux victimes innocentes, à
l’incompréhension devant la barbarie, je reste persuadé que les discours les
plus utiles sont les plus sobres : la compassion n’a pas besoin
d’hyperboles et les donneurs de leçons pourraient avoir la décence d’attendre
que les sanglots de ceux qui vivent une tragédie s’apaisent quelque peu. Je
reste estomaqué des tentatives de récupération à chaud d’un événement de la
part de « responsables » politiques qui ne font qu’y projeter leur
fantasmes réactionnaires et racistes. Ils donnent une image calamiteuse de leur
incompétence. La solidarité populaire qui s’exprime là, comme elle s’est
exprimée lors des tragédies précédentes devrait pourtant les inciter, au
moins, à un peu plus de retenue. Ne
parlons pas de l’impossible : les signes visibles de l’intelligence d’une
situation, certes compliquée et lourde de menaces. Cette situation s’inscrit
néanmoins dans tous les désordres du monde dont il serait peut-être temps que
l’on prenne toute la mesure.
Continuer
comme avant ?
Le pouvoir « socialiste » s’en tire en jouant la
carte de l’urgence, du quadrillage sécuritaire, en alimentant les peurs. Mais
pour tout le reste on continue comme avant, on détruit le droit du travail, on
s’acoquine avec le patronat, on promet une embellie sur le front de l’emploi
pour la saint glin-glin … On manœuvre serré pour tenter d’éviter la catastrophe
annoncée pour 2017 en espérant que la peur du front national permettra de
sauver les meubles. Réécoutez le discours de Hollande le 14 Juillet : le
vide sidéral.
L’antidote ?
Il est des moments où l’actualité ne semble plus rien offrir
que désolation, où nous percutons de plein fouet une adversité qui semble nous
dépasser. La fatalité, le fatum, comme ils disaient, les anciens, dont nous
serions les jouets impuissants et irresponsables. Il nous reste les mots pour
dire nos plaintes, notre effroi, et tenter de trouver quelque chose qui serait
comme une bouffée d’oxygène. Ce que j’ai retenu de propos de Pierre Laurent
pourrait peut-être nous y aider. A Avignon quelques heures avant la tragédie de
Nice, il parle de théâtre et de culture, mais pas seulement. Je cite en vrac. « Le théâtre une parole qui doit nous
réveiller… Il doit nous aider à questionner la vie…la place de l’homme et ses
responsabilités… La culture un endroit pour faire respirer…La politique une
autre manière de dire la culture …La place de l’échange difficile à conquérir
dans la politique transformée par le marketing… Pour reconquérir le
politique : la politisation de l’intelligence… »
La double
exigence
Certes, la formule peut sembler d’une obscure clarté, et
pourtant à bien l’écouter, elle est riche de sens, elle n’est certainement pas
univoque, elle est ouverte à la pluralité de ce que nous sommes, de ce que nous
pensons, de ce que nous espérons. Elle est porteuse d’une double exigence, une
exigence politique qui nous concerne au premier chef, puisqu’il s’agit de notre
vie collective et de ses enjeux bien malmenés, et une exigence intellectuelle
de compréhension d’un monde où l’irrationnel le dispute au magique, au
surnaturel, au mystère insondable de l’humain. Nous ne transformerons pas le
monde si nous renonçons à le comprendre. Pour éviter d’autres Nice !
Nous ! Nous ! Ensemble, dans le débat, la
confrontation, dans l’action, dans la solidarité, dans l’écoute. Aux antipodes
des petits chefs de tout acabit qui n’ont atteint leur but que lorsqu’ils ont
confisqué tous les pouvoirs pour jouer au mieux les histrions.
Nous ! Nous ! En nous réappropriant, il vaudrait
mieux dire en nous appropriant enfin, la chose publique, la chose politique.
Celle qui nous constitue. Avec toute l’intelligence nécessaire.
Jean-Marie Philibert.
lundi 11 juillet 2016
la rocardite
La rocardite : la-les-une-deux-trois
gauche(s)
La disparition d'un membre éminent de la deuxième gauche, comme
on le dit dans les tablettes, Michel
Rocard, peut nous conduire, au-delà de la trajectoire politique de celui qui a
animé plusieurs moments importants de notre histoire récente, à nous interroger
sur la multiplication des gauches, sur la prolifération de ceux qui s'en
réclament, sur le sens à donner à leur démarche.
Regardez le paysage actuel, nous avons le chantre de la deuxième
gôche Valls qui se réclame du défunt, et nous avons une nouvelle pousse passée
par la banque Rothschild, un dénommé Macron, qui nous fait comprendre qu'à côté
de la deuxième il serait possible d'en trouver une troisième et peut-être
d’autres encore. Le président, lui, comme si tout allait bien, continue à
croire qu’il n'y en a qu'une, la sienne, alors que dans son propre parti, comme
dans l'opinion publique, beaucoup sont convaincus qu’elle a disparu des écrans
radar, et personne ne sait où elle se trouve et à quoi elle ressemble. Perdue
corps et bien.
Les rendez-vous manqués
Plusieurs signes qui ne trompent pas : le code du travail, qui
symbolisait une politique sociale sensible aux intérêts des travailleurs, passé
à la moulinette de la loi El Khomry, et
l'utilisation frénétique du 49/3 pour étouffer la démocratie parlementaire
contribuent à faire disparaître la gauche du paysage et à rogner les espoirs
qu’elle peut fonder.
Heureusement pour la gauche, elle n'a pas que le PS pour la
servir. Si c'était le cas elle serait depuis quelques lustres dans les
oubliettes de l'histoire.
La disparition de Rocard permet de réactiver une histoire qui
donne avec Manuel Valls l’impression de bégayer et nous offre l‘occasion
d’évoquer le nombre considérable de rendez-vous manqués que les progressistes,
multiples et divers, attachés à des transformations sociales concrètes, ont
espérés en vain.
Unitaire ?
Je fis partie de ceux qui avaient un regard sympathique pour un
mini parti politique aujourd’hui disparu qui incarnait ces transformations
sociales avec d’autres dont le PCF et un nombre importants d’organisations que
l’on qualifierait aujourd’hui d’ultragauche, il portait le nom de PSU, le U
étant une référence implicite à la nécessité de mettre en œuvre une démarche
unitaire. Rocard en était un des dirigeants. C’était un autre temps, dans la
mouvance de mai 68. L’aspiration « révolutionnaire » et unitaire de
l’époque (je mets des guillemets parce que rétrospectivement j’y vois quelques
raisons d’en douter) traversait des couches larges de la société : le
monde salarié, les intellectuels, les syndicalistes (CGT et CFDT ensemble, et
oui !) une jeunesse en recherche d’émancipation, la tutelle du gaullisme
devenue insupportable. Rocard donnait le sentiment d’en être.
A lire les bio, à l’occasion de sa disparition, on se rend
compte que se joue à ce moment-là la prise de pouvoir sur toute la gauche
non-communiste, avec une constante : tenter de phagocyter les cocos, au
mieux de les utiliser en leur laissant quelques strapontins. La référence à
l’unité servait à ça. Rocard et Mitterrand jouant chacun une partition
différente mais avec un même objectif. La palme de la tartufferie étant à
mettre à l’ordre de Mitterrand,
Deux cultures
Rocard s’est gargarisé de mots pour brouiller les pistes, en
multipliant les gauches : « deux cultures » structureraient la
gauche, la présentable, l’acceptable et l’autre, celle qui manque de réalisme,
de rigueur, de crédibilité. Vous avez compris de qui il s’agit et c’est une
constante rocardienne que d’avoir une allergie pour le drapeau rouge, et de
préférer faire entrer dans son gouvernement en 1988 des personnalités
d’ouverture (traduire de droite). Au cours de son mandat il va se montrer le
champion absolu de l’utilisation du 49/3 et ainsi faire la preuve comme son
poulain Manuel de son attachement fragile à la démocratie.
Cela ne le gênera pas pour poursuivre son ambition sur la piste
d’un pouvoir qui lui échappera, son rêve de devenir président de la
république restera en l’état de rêve. Il
lui restera les mots pour nous expliquer que le monde est au moins aussi
compliqué que la gauche (et que ses discours) et qu’il ne faut pas la laisser
entre toutes les mains. Parait-il qu’il faut y voir les signes d’un esprit
supérieur ?
Il a fait des émules, des qui se prennent pour des cadors.
Ils pratiquent tous le brouillage des
pistes qui passent par la multiplication des gauches : observer le Macron
de service, mais il n’est pas seul. …Une gauche, deux gauches, trois gauches…
Une gauche pour chacun à son service. Une gauche éclatée et des hommes
providentiels partout: y aura-t-il quelque chose à sauver ? Il n’est pas
réjouissant que Mélenchon y succombe. Le rocardite aiguë l’aurait-elle
atteint ?
Ce n’est pas tout à fait l’idée que se font de la gauche tous
ceux qui savent qu’elle ne peut véritablement jouer son rôle transformateur que
plurielle, diverse et en même temps unie, rassemblée. Cette bataille, c’est la
nôtre.
Jean-Marie Philibert
dimanche 3 juillet 2016
les thuriféraires et les ploucs
Les thuriféraires et les ploucs
Je suis toujours surpris d’entendre les thuriféraires de
l’Europe s’étonner de la réaction des peuples face à une machine qui en
l’espace de quelques décennies leur a fait toutes les misères du monde sans
tenir compte de leurs réactions, de leurs votes, de leurs réserves.
Ce mot de « thuriféraire » ne pouvait pas mieux convenir pour désigner ceux qui ne
cessent de chanter les louanges d’une institution que le Brexit secoue : les thuriféraires sont dans la liturgie chrétienne
ceux qui sont chargés de porter l’encens qui va brûler en répandant une odeur
pénétrante pour nous donner le sentiment de ne plus être tout à fait dans une
ambiance terrestre, mais de toucher un tant soit peu au surnaturel et au sacré.
Et avec l’Europe, à la sauce social-libérale on tente de nous faire croire que
la terre promise n’est pas loin, que les fruits de l’union vont bientôt tomber,
que les sacrifices paieront, que le nirvâna est à portée de main, que le ciel
est au coin de la rue.
Patience
Certes il faudra encore un peu patienter, attendre que la
Merkel veuille bien partager un peu de sa croissance, convaincre les Grecs, les
Portugais, les Espagnols de ne plus vivre à crédit, pourchasser sans relâche
tous ceux qui ne peuvent pas vivre sans déficit, s’enliser toujours un peu plus
dans la dérèglementation, casser chaque jour davantage les services publics. Et
surtout ne jamais empêcher les plus riches et les plus puissants de l’être
encore plus et dans le même temps accepter que nos salaires et nos retraites
stagnent lamentablement. La liberté du loup dans la bergerie est un des
principes fondateurs d’une Europe qui a fait de la
loi du marché, « the principe absolu ».
Ce ne sont là que billevesées. L’apothéose de l’Europe est au bout du chemin et vous la
rencontrerez un jour, vous, ou vos enfants, ou vos petits-enfants, ou vos
arrière petits-enfants, ou à la Saint glin-glin qui est un saint très européen.
Trop compliqué pour le
populo
En attendant la saint glin-glin les peuples en bavent ;
ils ne n'en veulent plus. Ils l'ont dit très souvent, chaque fois que la question
européenne leur fut posée : rappelez-vous le référendum constitutionnel ! Ce
fut non ! Avec le traité de Lisbonne vous avez eu droit à la même
marchandise, mais on ne vous a pas demandé votre avis.
De toutes les façons, l'Europe c'est trop compliqué pour le
populo, il ne faut surtout pas le laisser décider de quoi que ce soit. Et pour
que vous en soyez convaincu, on a mis en place des institutions pour lesquelles
vous voterez le moins possible : on vous fait une petite fleur pour le Parlement
européen, mais on ne sait pas trop à quoi il sert. La Commission, elle, est au
centre de tous les pouvoirs ; ses responsables n'ont aucun compte à vous
rendre. Ne parlons pas des institutions financières : c'est blocus à tous les
étages. C'est votre argent, mais il vous a totalement échappé pour aller dans
les mains de Mario Draghi, le grand mamamouchi de la banque centrale européenne
qui en fait ce que veulent les fortunés qu’il sert aveuglement.
Le péché de populisme est un
péché mortel
Si vous regimbez, si vous exprimez votre incompréhension,
voire votre réprobation, vous serez immédiatement taxé de populiste, populiste,
c'est comme populo, c'est dégradant. Le populiste est borné, il ne peut pas
comprendre. Il a l'avantage de mêler la gauche contestataire et la droite
réactionnaire de telle sorte que plus personne ne reconnaît ses petits et qu'il
est plus facile de vous faire passer pour un imbécile. Le populiste est sans
conscience, prisonnier de ses instincts et de ses égoïsmes. Son opinion est
sans valeur, comme lui.
Le dessus et le dessous du
panier
Que vous soyez sincèrement de gauche, que vous soyez attaché
au progrès social, à une juste répartition des richesses, à une politique de
l'emploi qui donne à chacun de quoi vivre décemment, que la nation, l'état, la
démocratie, représentent encore pour vous quelques valeurs, que la solidarité,
la justice, le respect des identités, des libertés aient du sens, ne changeront
rien au jugement que nos eurocrates savent intangible : vous n'avez pas compris
que les peuples et l'Europe n'appartiennent pas au même monde, qu'aucune
communication n'est possible entre le dessus et le dessous du panier, entre le
sacré et le profane, entre les thuriféraires et les ploucs.
Mais parce que le plouc que vous êtes reste convaincu que
l'Europe sera sociale et démocratique ou ne sera pas, vous continuerez à agir
pour un monde fraternel.
Ploucs, oh pardon, prolétaires de tous les pays unissez-vous,
et secouez le dessous du panier.
Jean-Marie PHILIBERT
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