les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 27 mars 2017

guignols


Guignols !



Bienvenue en guignol-land ! La campagne électorale en cours que les observateurs patentés disaient pliée, achevée, au soir des primaires remportées par un François Fillon triomphant, nous entraîne chaque jour un peu plus dans une course folle (dans tous les sens du terme) où tous les impossibles deviennent possibles, même les pires. Le citoyen, au mieux, reste perplexe, au moins pire indécis, au plus pire sur le cul devant une situation politique surréaliste.

Le sortant se sort tout seul ; le successeur officiel se fait sortir par son propre camp ; un ministre-banquier, ni-àdroite-ni-àgauche, quasiment inconnu il y a quelques mois se prend pour Bonaparte et se jette avec succès dans la bataille ; le Fillon que l’on pensait intouchable a commis le péché mortel de trop toucher… au pognon ; la Marine rumine son délire xénophobe dans son coin ; jusqu’à Mélenchon, fin politique par ailleurs,  qui semble oublier que, pour gagner une élection, il vaut mieux être unitaire.

L’affolement des fourmis

Beaucoup de politiques sont troublés.

Enfant, j’aimais observer les fourmilières et l’organisation qui régnait dans la vie de ces bestioles, elles suivaient des voies tracées à l‘avance pour rapporter en file indienne dans leur trou la pitance récupérée et assurer les menus de l’hiver. Un petit coup de pied dans la fourmilière et c’était le chaos. Sauve qui peut ! Et chacune de partir dans toutes les directions.

Qui a ainsi donné un coup de pied dans la fourmilière des présidentielles ? Dans la classe politique ça part dans tous les sens à la recherche du nouveau sauveur. C’est courage fuyons ! Ils sont nombreux à perdre le nord et le sud, la gauche et la droite, à oublier ce qu’ils ont été, ce qu’ils ont dit, défendu pour se parer d’une virginité politique retrouvée, grâce à un fringant même-pas-quadra. Virginité profondément comique quand on est plus proche de la ménopause ou de l’andropause que de l’adolescence. Guignol est de retour ! Et Macron est son idole.





Se macroniser sans vergogne

C’est sans aucun doute l’aspiration à retrouver une jeunesse enfuie, ouverte sur des perspectives que l’on pensait perdues qui propulse beaucoup de ces fourmis en perdition dans les bras d’un Macron qui se prend à rêver. C’est aussi la crainte d’une déculottée sévère, à droite, comme au PS qui joue un rôle important dans les évolutions en cours. Ajoutons-y une absence totale d’amour-propre, un mépris profond pour son électorat, le reniement systématique de la parole donnée, un cynisme à toutes épreuves et une conception de la politique où la place occupée et tout ce qui va avec (pognon, avantage, faveurs et gloriole…) compte mille fois plus que les valeurs, la démocratie, à défendre. J’oubliais sans doute l’essentiel : un attachement indéfectible aux pouvoirs de la finance !

 Et vous aurez compris pourquoi un Cresta, un Perben, un Bayrou, la garde rapprochée de Hollande, un le Drian, un Robert Hue se macronisent avec enthousiasme et sans vergogne. La liste des recrues (vieilles biques et jeunes loups) sera quotidiennement à mettre à jour.

La rationalité… tu parles !

Le plus surprenant en la matière n’est pas dans le retournement de veste (plus clairement dit : la trahison) : un grand classique de la vie politique. Il est dans la rationalité dont chacun veut parer sa propre turpitude.

Les catalogues de la mauvaise foi offrent toutes les méthodes souhaitables pour sortir d’une impasse où la conscience d’une certaine dignité, la fidélité aux  engagements, le simple souci de l’honnêteté pourraient conduire.

Le tout avec le sérieux nécessaire et l’argumentaire-béton qui justifie l’injustifiable. Quand Guignol, et tous ces pantins deviennent philosophes pour nous convaincre, la sottise et la malhonnêteté font leurs affaires …sur notre dos.



Jean-Marie Philibert.


mardi 21 mars 2017

pepe les costards et la republique


Pépé, les costards et la république



Toute mon enfance a été bercée par un débat récurrent qui animait les repas ou les soirées familiales et qui était très étroitement lié aux activités professionnelles de mon pépé. (Eh ! Oui ! J’ai eu aussi un formidable pépé, digne de ma mémé). Il était tailleur dans une grande enseigne perpignanaise, il adorait son métier, le faisait avec beaucoup de goût et de passion : il était sapé comme un ministre (intègre) et il aurait voulu que tout le monde le fût (sapé et intègre). Mais malheureusement pour lui les années 50 ont vu  le prêt-à-porter (on disait aussi la confection) remplacer le sur-mesure : la qualité des costumes s’en est ressentie. Les tailleurs sont partis à la retraite, pleins de rancœur pour un métier qui les avait trahis et qui n’habillait pas les hommes avec toute la classe, tout le chic, tout le soin que les artisans-tailleurs y mettaient.

Sapé, mais intègre ?

C’est sans doute pour renouer avec une tradition qui, selon lui, devait avoir du bon, que Fillon a gardé le goût des beaux costumes, et que, plus d’un demi-siècle plus tard, il continue à se faire tailler des costards très haut de gamme dans de grandes maisons parisiennes. Il se les fait payer par un « ami » à un prix si exorbitant que mon pépé  s’est retourné dans sa tombe. Fillon, sapé, certes, mais intègre, pas sûr !

Tout ce que mon pépé aurait pu payer à sa famille adorée s’il avait eu de tels clients ! Mais ses clients à lui travaillaient normalement pour des salaires sans doute convenables, mais sans plus. Ils appartenaient à une société provinciale, soucieuse de ses valeurs, de son paraître et de son être.

L’intégrité, zob !

 Aux antipodes de la bande de prévaricateurs cupides qu’une finance triomphante essaie de propulser aujourd’hui dans les plus hautes charges de l’état pour en perturber les valeurs républicaines et fondatrices. Et je te vends ma conscience et tu m’achètes des costumes. C’est cadeau ! Et je fais « travailler » ma femme, ma fille, mon fils. Et j’encaisse. Cadeau !  L’intégrité, zob !

Et pour d’autres (du même acabit) je pompe dans la caisse du Parlement européen pour engraisser mes affidés. Cadeau ! Je m’assieds sur les règles des finances publiques pour faire ce qui m’arrange. Les lois ne me concernent pas. Vous avez reconnu l’aboyeuse d’extrême droite. L’intégrité ! Re-zob !

Pépé, le monde a bien changé

Quant au jeune homme, BCBG, que tous les medias adorent,  lui aussi, il aurait un peu pioché dans les finances du ministère pour se faire un nom. Re-cadeau ?

Dé-moralisation

Heureusement, paraît-il, nous avons une loi de moralisation de la vie politique, depuis Cahuzac. Mais avec le spectacle en cours, nous sommes plus près de la  dé-moralisation profonde et durable des citoyens.

Mais ne s’agit-il que d’argent ? Ne s’agit-il que de tremper sans vergogne ses doigts dans tous les pots de confiture qui se présentent ? Ce qui aurait déjà, révolté mon pépé ! D’autant plus que la confiture fait cruellement défaut au plus grand nombre auquel on impose une austérité de plus en plus féroce, des sacrifices de plus en plus grands comme une fatalité inexorable.

Je crois cependant que le plus insupportable en la matière est dans l’attitude de ceux qui refusent de voir que leurs actes sont non seulement délictueux, mais une négation de l’humaine condition citoyenne, fondatrice de la république,  dans la mesure où le déni et le cynisme  dans lesquels ils s’enferment signifient qu’ils refusent que leur comportement soit examiné et jugé pour ce qu’il est, dans la mesure où la loi commune n’a pas de sens pour eux et qu’ils s’abritent derrière un suffrage universel susceptible de les conforter et de les absoudre. Ils le dénaturent, en ferment d’autocratie, en s’en servant ainsi.

Ils bafouent la démocratie.

In-to-lé-ra-ble !

Pépé, va, au Panthéon des hommes intègres et lucides, réveiller Montesquieu pour qu’il rappelle à tous qu’il ne peut y avoir de république véritable que dans le respect des lois et  dans une scrupuleuse séparation des pouvoirs.

Jean-Marie Philibert










lundi 13 mars 2017

robert hue a raison


« Robert Hue a raison… »

A la sortie de la messe dominicale, dans cette charmante bourgade du département, les fidèles se congratulent, s’attardent, papotent. Les prémisses du printemps délient les langues, le dialogue avec le surnaturel a apaisé les tensions, un brin de causette ne peut que faire du bien dans un monde où l’on se parle de moins en moins. Et très vite, c’est de politique qu’il est question.

« -Vous avez vu cette campagne, mon dieu, c’est du jamais vu !

-Mon bon monsieur, il faut du neuf en politique…

-De nouvelles têtes qui nous changent des politicards de droite et de gauche…

-Des esprits libres qui se moquent des idéologies…

-Le socialisme, le libéralisme, la justice sociale, la démocratie… On a déjà donné.

-Le communisme, Mon Dieu, vous n’y pensez pas !

-On s’est trop éloigné des religions…

-Moi je vais à Lourdes tous les ans et ça me fait du bien aux rhumatismes…

-Moi je bois de l’eau de la fontaine miraculeuse d’Arles sur Tech. Le curé m’a dit qu’elle a des pouvoirs fantastiques…

Et patati

-Je crois qu’on ferait bien d’en donner aux joueurs de l’usap, le rubi c’est comme la politique, il y a trop de pognon maintenant …

-Ca pourrit tout, même les saints hommes, comme Fillon. Qui l’aurait cru ? Lui si rigide… Il a fauté, mais Jésus nous a appris à pardonner…

-Moi je crois que Pénélope, elle le savait pas qu’elle gagnait autant d’argent, elle achète jamais de la toilette…

-C’est pas comme la femme de Macron, elle est très chic, elle…

-Elle est beaucoup plus âgée que lui, vous savez…

-Lui il fait jeune et il est comme il faut,  il en a dans la cervelle, il a travaillé à la banque, puis à l’Elysée, maintenant il veut faire président, ça nous changera,  il est mignon comme tout…

-Ça sera toujours mieux que l’autre baudruche…

-Et puis il a dit qu’il était ni de droite, ni de gauche… Enfin de la vraie politique, celle qui s’occupe de nos problèmes…

-Il a pas de programme, mais est-ce qu’il faut un programme, il suffit d’écouter les gens au marché…

-En plus il est copain avec les banquiers, même qu’il a travaillé chez Rotechilde : ils lui prêteront de l’argent sans problème…

Et patata

-Vous avez-vu tous les gens qui le suivent…

-C’est comme dans l’ouillade on peut tout y mettre.

-Vous allez voir que beaucoup de nos hommes politiques locaux, de tous les côtés vont se précipiter dans cette ouillade-là.

-Péteux comme ils sont, elle sera bien fade, il en faudra du saji…

-Moi, s’il me débarrasse de la Marine, ça me suffit…

-Avec une dose de modernité, quand même : il faut vivre avec son temps.

-Vous savez il y a des signes qui ne trompent pas sur la valeur du personnage : regardez même Robert Hue a dit qu’il voterait pour lui. Et Robert Hue a de l’expérience et il a souvent raison. Quand on est soutenu par un si fin politique, on a de sérieuses chances de l’emporter…

-Pourvu que la Providence vous entende !

-A dimanche prochain, mes amis, on fera le point, ça approche… »

Jean-Marie Philibert.

lundi 6 mars 2017

assassinat


Assassinat

De la métaphore… Il fut un temps où le terme d’assassinat et en particulier d’assassinat politique relevait d’une réalité historique où les coups de poignards, les empoisonnements mystérieux, les disparitions soudaines et inexpliquées pouvaient advenir sans qu’on s’y attende ; d’ailleurs les puissants de ces temps obscurs s’y préparaient, s’en protégeaient, ou même parfois (souvent ?) y participaient à l‘encontre de rivaux dont on pouvait craindre le pire et pour lesquels on préparait donc le pire. Le vingtième siècle a vu ces pratiques disparaître, encore que l’histoire récente bruisse quelque fois de morts inexpliquées.

Injustifié

L’assassinat est devenu métaphorique dans la bouche de François Fillon quand il évoque le sort qui lui est fait, mais à ses yeux il paraît tout aussi scandaleux et arbitraire. Il juge en effet totalement injustifié les poursuites judiciaires, policières dont il est l’objet. Il considère que le gouvernement, les médias, les juges ont voulu sa mort politique et que rien n’est plus injuste, pour lui, pour sa famille, pour sa famille politique, la droite, et bien sûr pour la France.

Mais en même temps il refuse systématiquement de répondre sur le fond du dossier, non pas sur le fait qu’il ait employé sa femme comme attachée parlementaire, sa fille, son fils idem, à des salaires fort honorables, sur des fonds publics, mais sur celui qu’en contrepartie, ils n’aient rien fait, rien de rien. Le travail était fictif, les salaires ne l’étaient pas. Aucun début de preuve, de témoignage, qu’il pourrait en être autrement.

Le suicide ?

Alors que les questions pleuvent, que les micros sont tendus, que les caméras enregistrent, rien pour prouver le contraire, pour donner la parole à ceux qui ont ainsi « travaillé », à l’expérience qu’ils en ont retirée, aux contacts qu’ils y ont tissés, au point que l’on peut se demander s’ils savent qu’ils ont travaillé. Le déni, comme seule défense, la victimisation, l’enfermement dans des affirmations qui choquent, y compris ses soutiens, les volte-face incompréhensibles au point que l’on se demande si l’assassinat politique n’est pas en train de se transformer en suicide, métaphorique bien sûr. Je ne souhaite la mort de personne, et la vie d’un homme vaudra toujours plus que les euros partis en fumée.

Avec la manifestation de dimanche, à vouloir poursuivre l’aventure,  le suicide semble devenir collectif et massif. A mes yeux,  trop massif pour paraître honnête. Certes la dimension personnelle est indéniable : il y a du bourricot chez Fillon. « Je ne reculerai pas, je ne reculerai pas, je ne reculerai pas ! »

Le mort n’est pas celui qu’on pense

Il s’inscrit dans un processus de droitisation sans fin de la société qui vise (rappelez-vous son programme), non seulement à faire disparaître, y compris des consciences, tout perspective de transformation progressiste d’un désordre dominant qui marginalise, ghettoïse, précarise, appauvrit le plus grand nombre, mais aussi à mettre à bas les valeurs émancipatrices qui bon an,  mal an, avaient traversé les siècles pour fonder un projet au cœur des luttes sociales et politiques du pays. Ce projet pouvait aussi largement débordé de nos frontières. Les gouvernements « socialistes » ont apporté leur savoir-faire démobilisateur à l’entreprise de démolition, l’Europe a servi d’alibi. Ils ont même mis en place des relais possibles (voir Macron) pour poursuivre la besogne. La vraie victime est là : la volonté populaire d’en finir avec la galère !

Inquiétude

Je m’interroge cependant sur ce comportement qui au-delà de la carrière de Fillon concerne  son clan, son parti, la droite, mais aussi l’ensemble de la sphère politique, le rapport que les citoyens ont avec le politique, et bien sûr la démocratie. J’ai des inquiétudes sur ce qui peut en sortir.

 Toutes les pistes sont brouillées : l’électorat est dans l’embarras (euphémisme…) au point qu’à quelques semaines des élections, tout semble possible, et même le pire. La gauche (PS-Hamon et Insoumis-Mélenchon) continue à vivre hors sol, en refusant la seule issue possible d’une union incontournable pour nourrir un début d’espoir. Préfèrent-ils se fracasser sur le mur du premier tour ? Assassinat, suicide, la mort (métaphore) rode. Soulignons les efforts plus que louables et courageux du PCF pour défendre les droits de la vie.

Jean-Marie Philibert.

PS : au moment où j’écris ces lignes, lundi 6 mars, 11 h 30,  tout bouge, mais… pour que rien ne bouge.