Un besoin
immémorial
L’évocation de mai 68 pour son cinquantenaire m’a octroyé
avant l’heure estivale des vacances journalistiques méritées, vous en
conviendrez ; mais mai 68 (ah mémé !) ne va pas durer indéfiniment.
Il faut remettre son humeur au travail : il y a des travaux plus pénibles.
D’autant que, profitant des fortes chaleurs, je me sens des ailes pour me
lancer dans une humeur estivale qui devrait me permettre toutes les libertés.
Butinons donc tout ce que le monde nous propose et tentons de faire notre miel
des fleurs qui embellissent le paysage. Tentons de prendre une bouffée
d’optimisme…
Il y a un
blème
Mais gros problème : certes il y a les fleurs… Elles ne
sont pas seules. Tout ce qu’il y a autour pollue et empoisonne ma vie
d’abeille, et m’incite à m’interroger comme peut le faire le
poète « Est-ce ainsi que les hommes vivent ? », ou comme
les font les apiculteurs de base : quel miel produire ? Pour
qui ? Pour quels bienfaits ?, ou enfin comme le disait
Lénine : «Que faire ? ».
Question « empoisonnement », au propre, comme au
figuré, nous sommes servis. On n’a jamais autant invoqué l’écologie et on ne
s’est jamais assis sur ses principes avec autant de désinvolture grâce à un
ministre star de la téloche. On a mis la santé des français en avant pour réduire la vitesse sur les routes et on
rend intenable la vie dans les hôpitaux. On envisage une sécurité qui ne
devrait plus rester sociale. On met les services publics dans la panade !
Notre Jupiter au petit pied visite le pape, se répand dans la planète pour
apporter ses lumières, veut faire un max pour les migrants, mais il laisse
quasi quotidiennement des femmes, des hommes, des enfants, errer et mourir dans
la Méditerranée. Ne disons rien ou presque de ces maladies sociales que sont le
chômage, la précarité, la misère, l’exclusion. La vie des gens de
« rien » est ainsi progressivement empoisonnée. Pas grave, ce n’est
rien !
Les fleurs
de l’arrogance
C’est l’humanisme d’une république en marche vers la cata. La
cata pour les pauvres, ceux qui gaspillent le pognon qu’on leur distribue
généreusement, ceux qui en auront d’ailleurs de moins en moins, vu que les
aides sociales, ça suffit. Que la soif des possédants est inextinguible.
Il faudrait butiner ces fleurs de l‘arrogance qui peuplent le
paysage « no future » qui devient notre lot quotidien. Tu parles de
bouffée d’optimisme… Il est temps que tu ouvres les yeux, que tu reprennes la
plume…
Avec une cerise idéologique sur le gâteau : le sentiment
que quelles que soient votre révolte, votre détermination à vous battre pour
dire l’intolérable, vous n’y changerez rien, le fatum jupitérien est tel qu’il
s’imposera inéluctablement. Le surnaturel revient au galop : il faut
l’accepter, sinon les coups de matraques pleuvent.
Au pas et
au pain sec !
Si nous n’y prenons
garde… les abeilles vaillantes et dignes qui veulent vivre du fruit de leur
travail changeront de régime, de modèle social, de monde. Sous le masque policé
d’un jeune homme de bonne famille promis à une brillante destinée, certes
quelque peu ambitieux, ne se cache-t-il pas une volonté forcenée de mettre au
pas et au pain sec de façon progressive et orchestrée celles et ceux qui dans
ces temps estivaux rêvent encore de butiner un peu de bonheur.
Le peuple a un besoin immémorial de butiner.
Le jeune homme en question ne connaît pas sa
persévérance !
Jean-Marie Philibert
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