les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

mardi 26 mars 2013

dérive



Turbulences et dérive
De grosses turbulences la semaine dernière dans les eaux agités et troubles du pognon, du pouvoir,  de la politique et accessoirement de la morale : c’est d’abord le Ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, qui se voit contraint à la démission,  à la suite de l’ouverture par le parquet d’une information judiciaire le visant pour « blanchiment de fraude fiscale. » Depuis plusieurs mois des accusations étaient portées  par le site Médiapart contre le Ministre qui jusque-là les avait toujours récusées.
Il aurait…
Sans préjuger de ce que sera la décision finale de la justice,  (il faut toujours rappeler que nous vivons dans un état de droit où la présomption d’innocence est un principe intangible), il faut croire que les charges qui pèsent sur lui sont suffisamment conséquentes pour que la justice cherche à en savoir davantage. Il aurait (conditionnel) eu un compte en Suisse et aurait perçu des avantages venus de laboratoires pharmaceutiques. La rumeur lui prête une grande fortune. Ses quelques mois de ministre lui avaient permis de faire la démonstration de ses talents d’orateur, mais aussi d’homme de pouvoir, n’hésitant pas à imposer à ses petits copains des différents ministères des coupes sombres dans leur budget au nom de la sacro-sainte dette à éponger.
Des dégâts dans l’opinion publique.
La superbe du ministre était à la hauteur de sa rigidité budgétaire, et les choses devaient aller en s’accélérant puisque le budget 2014 en préparation devait être encore plus drastique que le précédent. Un des hommes « forts » du gouvernement à cause de la pression médiatique passe ainsi à la trappe. Grandeur et misère de la vie politique. Mais au-delà des états d’âme des ministres ainsi secoués, ce qui me semble plus grave c’est l’effet produit sur une opinion publique qui est remplie de prévention contre le personnel politique et qui est toujours très proche du « tous pourris » : cela fait les beaux jours du Front national. Comment garder une image positive de la politique quand celui qui est en charge d’imposer rigueur financière aux autres, augmentation des impôts,  blocage des salaires,  et austérité accrue au plus grand nombre donne le sentiment qu’il n’y a pas de plus grande morale que de s’en mettre plein les fouilles. Les valeurs de justice, d’égalité, de solidarité (qui devraient être au cœur de l’action politique) en prennent un sacré coup sur la casaque. Hollande pourra toujours après cela gloser sur une politique de gauche… Glose, glose toujours, tu m’intéresses…
Un autre patate chaude.
Et la patate Cahuzac est encore toute chaude qu’il nous en tombe une autre dans les mains qui ne peut, elle aussi, que faire des dégâts au moins aussi conséquents : c’est l’ancien président de la république qui lui est mis en examen par un juge Gentil dans l’affaire Bettencourt. Il aurait (conditionnel aussi) profité des largesses de la riche patronne. Cette mise en examen fait hurler les responsables de l’UMP pour lesquels l’expression « indépendance de la justice » semble appartenir à une langue totalement inconnue et qui jurent leurs grands dieux que l’argent de Mme Bettencourt, ils sont bien au-dessus de tout ça. Glose, glose, toujours… Le citoyen moyen, l’électeur de base, l’observateur attentif de la vie politique sont pris pour des zozos.
L’intelligence politique et la conscience morale sont-elles condamnées à ne pas pouvoir vivre ensemble ?  Cette dérive nous mine, c’est un combat moral et politique que de la combattre: il concerne tous les citoyens.
Jean-Marie PHILIBERT.

mercredi 20 mars 2013



Ite missa est ?
Après la démission de Benoît XVI et l’élection rapide et surprise de François, peut-on dire que la messe est dite, que tout redémarre comme avant, qu’il n’y a rien à ajouter… et pas de commentaire à faire. Ite missa est ? Je ne crois pas.
La permanence de l’institution.
Je suis convaincu qu’il ne faut que rapidement s’intéresser aux formes que cette transition papale a revêtues. Beaucoup de traditions… La fumée noire, puis blanche… Le cortège des mitrés… L’onctuosité des visages et l’impassibilité des attitudes… L’attente, la joie des fidèles … Les commentaires enfiévrés  des responsables catholiques. Nous sommes dans le déjà vu, ça ne mange pas de pain et ça permet de montrer  la permanence forte de l’institution. Ces images d’un monde qui bouge peu sécurisent et rassurent dans des temps d’incertitudes  comme ceux que vit actuellement la vieille Europe.
Le silence assourdissant qui caractérise l’attitude du cardinal argentin pendant la période de dictature féroce de son pays, ne peut que nous interroger.
Les points de vue du futur François sur la contraception, le mariage gay, qui lui ont valu quelques polémiques avec les autorités de son pays sont bien dans la lignée papale. Faut pas rêver… Un futur pape se doit d’être un peu réac…
Des signes potentiels.
Mais quand même un pape qui vient du bout du monde, qui n’est pas européen, qui est le premier disciple d’Ignace de Loyola à accéder à cette fonction, qui représente un continent en effervescence , qui a le souci de garder le contact avec les plus humbles, qui ne semble pas apprécier l’or des palais, pourrait être perçu comme un signe potentiel  de changement. Encore qu’il ne suffise pas de se mettre sous la protection de Saint-François d’Assise pour apparaître comme un apôtre de la révolution sociale que l’on n’est pas. D’autant plus que le même prélat argentin n’a jamais été un chantre de la théologie de la libération qui pendant un temps avait enflammé l’aile gauche de l’église sud-américaine.
Tous ceux qui sont attachés à la nécessité de voir s’opérer des changements majeurs dans une Europe en crise où les peuples sont soumis à la dure loi de l’austérité voudraient pouvoir s’accrocher à ces signes qui vont dans le bon sens.
Parce que l’Italie et au-delà l’Europe en ont, en auront bien besoin de bon sens  pour sortir de l’ornière les millions de citoyens  qui sombrent tous les jours plus nombreux dans les souffrances de la précarité, du chômage, de l‘inquiétude du lendemain, de l’absence d’espoir … au nom du fric-roi, des diktats du FMI, des impératifs de la commission européenne, de la concurrence libre et non faussée, de la survie de sa sainteté … l’euro.
Une église, les églises, même si elles se disent au-dessus, ne peuvent pas tourner le dos à ces douloureuses redites qui font le quotidien d’un monde injuste et inhumain ; l’espoir dont elles veulent être porteuses, pour avoir quelques crédibilités  ne doit pas être renvoyé à un temps hors du temps.

Et l’aspiration au changement ?
L’aspiration à la justice, à la démocratie, au respect de la dignité est une aspiration immédiate et tangible. Elle n’est pas nécessairement dépendante d’une quelconque foi religieuse, mais elle n’en est pas non plus obligatoirement et irrémédiablement coupée.
La construction du nouveau monde, sur les ruines  d’une société sclérosée qui ne fonctionne qu’à l’exclusion, l’ouverture et le dépassement des limites, l’utopie pratique d’un monde meilleur et la certitude qu’il n’y a pas d’aliénation supportable n’appartiennent à personne en particulier, mais à l’humanité en mouvement dans sa diversité, dans sa complexité,  à ceux qui croient au ciel, comme à ceux qui n’y croient pas, à ceux qui croient à la fois à la solidarité et à la lutte qu’elle impose.. Pour cela il faudra rassembler sans limite tous les oubliés des richesses, tous les exclus de la prospérité et ils sont le plus grand nombre. Mais il y faudra encore et toujours l’engagement des hommes, ici et maintenant.
Quant au rôle de l’église catholique, la réponse est peut-être dans les monuments d’Assise. 
A Assise, la Basilique Sainte Marie des Anges, a été construite  autour d’une toute petite cabane-chapelle où Saint François priait.  La petite chapelle, toute pauvre et toute modeste a été préservée, et elle est là toute incongrue,  au cœur de l’immense nef de l’église.  Il fonda là le premier couvent franciscain voué à la pauvreté évangélique. Mais les dimensions et les richesses de la basilique qui entourent la petite chapelle semblent comme en étouffer la portée symbolique. L’église d’aujourd’hui aura-t-elle l’ambition d’être du côté de ceux qui n’ont rien ou pas grand-chose ? Le pontificat de François devrait nous apporter une  réponse.
Jean-Marie PHILIBERT.

mardi 12 mars 2013

le doute ?



Le doute ?
« Le Président Hollande à l’heure du doute … Hollande le grand doute…. » Ce sont les titres d’un grand quotidien du soir,  le week-end dernier. Est-on véritablement, ici, dans le doute ? N’y aurait-il pas, comme souvent dans la presse bien-pensante, une petite tromperie sur la marchandise ? Comme, par exemple, le souci de faire passer la politique d’austérité avec la confiture du doute.
On dit de quelqu’un  qu’il doute quand il a du mal à mettre en œuvre une décision, quand il ne sait pas, ou ne sait plus, quelle est la bonne option à choisir, quand ses faits et gestes sont empreints d’incertitudes et d’atermoiements, quand il n’hésite pas à confier son désarroi, quand il cherche à prendre conseil, à écouter ce que les autres pensent et disent pour tenter de se construire une opinion plus solide et un jugement plus sûr.  Rien de tout cela ne correspond à Hollande. Il dit qu’on n’a pas le choix et qu’on doit faire comme il dit. Il faut se méfier des allures par trop patelines…
De la pure rhétorique.
Le doute, c’est comme les grandes tirades sur la dette ou sur  les déficits publics, c’est comme notre attachement  à un euro qui ne doit pas couler,  c’est de la pure rhétorique  pour tenter de rendre l’inacceptable acceptable, pour essayer de cacher un modèle social qui s’escagasse, pour protéger des marchés financiers dont on a fait notre puissance tutélaire.
Parce que dans ces domaines là nous sommes à des années-lumière du moindre doute : faut-il augmenter les salaires pour réactiver une économie complètement raplapla ? Aucun doute : non ! Faut-il élargir, renforcer les droits de travailleurs dans les entreprises en particulier pour lutter contre les licenciements boursiers ? Vous n’y pensez pas. Faut-il augmenter les prestations sociales ? C’est tout le contraire, il faut les taxer. Faut-il améliorer l’assurance-maladie ? Impossible, on vit déjà trop vieux. Faut-il augmenter les retraites, comme le prévoit la loi, du montant de l’inflation ? Mais vous croyez au Père Noël. Faut-il mettre en œuvre une vraie justice fiscale où chacun paierait en proportion de ce qu’il gagne et possède ? C’est doublement impossible parce que les possédants n’y survivraient pas et les pauvres le seraient toujours. ON DOIT  FAIRE COMME IL DIT… SANS AUCUN DOUTE !
Une allergie congénitale.
La rencontre fréquente d’élus, lors d’une carrière syndicale bien remplie, m’a toujours confronté à cette allergie congénitale des responsables socialistes à affronter le moindre doute, comme s’ils allaient y perdre toute crédibilité et tout pouvoir. Ils se doivent de donner le sentiment que ce qu’ils disent ne peut être que de l’ordre de la certitude. N’est-ce pas le meilleur moyen, pour imposer à ceux qui n’ont pas le pouvoir, de se soumettre à des impératifs qui les dépasseraient ? Et de ne rien changer au désordre dominant et à leur parcelle de gloriole.
Nos doutes à nous.
Les seuls doutes qui les inquiètent ne sont pas leurs doutes à eux, mais nos doutes qui peuvent naître, croître et proliférer dans les urnes, dans les rues, dans les usines, dans les services.  Les doutes de la mobilisation sociale, sur des choix économiques et sociaux trompeurs, sur des politiques qui tournent le dos à toutes formes d’espérances.
Ces doutes sont dans nos têtes et ils concernent directement la capacité que nous leur octroyons à mettre en marche une vraie politique de transformation sociale.
A moins que les socialistes ne  comprennent qu’ils font fausse route : certains dans leur camp ont quelques doutes.
Jean-Marie PHILIBERT