Ne pas
renoncer !
Le gouvernement en mettant en œuvre les élections
départementales auxquelles nous allons participer dans quelques jours invente
une nouvelle démocratie que nous pourrions appeler la démocratie surréaliste.
Les surréalistes adoraient Fantômas, nous, nous allons voter pour des
fantasmes.
En effet nous allons élire des conseillers départementaux sur
des zones redéfinies avec tellement de soin et d’attention qu’en ce qui me
concerne je n’ai pas encore compris quelle était ma zone à moi, puisque la
ville a été redécoupée en une myriade de confettis, mais soit, ce n’est pas là
l’essentiel du problème.
Le cœur de la question
est que je suis amené à choisir des élus pour des tâches qui ne seront plus celles des conseils
généraux, puisque la réforme territoriale est passée par là, mais dont aucune
n’a été définie. S’agira-t-il de s’occuper des affaires scolaires, de la
politique sociale, des handicapés, des
personnes âgées, des jeunes, des petits enfants, de l’aménagement du
territoire, des routes, des services de
secours, des questions de santé, du logement, de l’urbanisme, de rien,
peut-être, un peu de tout pourquoi pas ?… Mystère ! Personne n’en
sait rien et je comprends la difficulté des candidats à faire un programme pour tout et rien à la fois. C’est la
politique de Gribouille, plus j’avance et plus je t’embrouille.
Les formes
Mais cela n’a pas l’air de trop déranger le gouvernement qui
s’attend de toute façon à une déculottée sereine. Ne pas dire clairement aux
citoyens pour quoi ils vont voter, c’est refuser de les prendre pour ce qu’ils
sont, ou devraient être, de vrais citoyens dignes d’être éclairés, informés et
responsables. Avec ces élections départementales la démocratie en prend un coup
sur la patate et nous aussi sûrement. Certes il y aura des candidats, des
sigles, des bureaux de vote, des dépouillements. Les formes seront respectées.
Mais le fond de la chose, l’essence de la démocratie, l’éducation toujours plus
exigeante du citoyen, à la trappe ! Le sens du vote à la trappe !
Le comble
Et le comble, c’est le rôle joué dans ce concert d’absurdités
et d’ignorance par les grands pontes du journalisme, par les grands organes de
presse, par les penseurs patentés du petit écran, par les donneurs de leçon de
la bienpensance : ils sont rares à voir où le bât blesse, ils ne suivent
sans doute pas très bien l’actualité, ils n’ont pas vu passer la réforme
territoriale. Et pour cause, elle est en rade, pour le moment ! Et puis
c’est trop technique, ça n’intéresse personne,
c’est politique ; beurk !
Ça ne vaut pas la peine d’en parler. Une émission en prime time
consacrée à ces élections, vous n’y
pensez pas.
Le refoulé
Par contre les
sondages favorables au FN, les campagnes islamophobes, ça c’est pain bénit.
Tout le monde comprend très vite, il suffit de réactiver les vieux réflexes et
le racisme ambiant. Ça fout les jetons, ça fait vendre, c’est le feuilleton du
jour, Marine à tant de pour cent, aux portes de ci et de ça, ils en parlent
tellement que le docteur Freud pourrait dire
qu’il y a du refoulé là-dedans, et que les mots ayant toujours du sens,
c’est ce qu’ils souhaitent, ce que souhaitent ceux qui les paient. Ne seraient-ils
que des valets complaisants ?
Même Manuel Valls s’y met, à nous faire peur, avec des
houla-lala, avec des tremolos dans la voix, mais sans le moindre
infléchissement politique qui pourrait conduire le peuple à se reconnaître
enfin dans une politique de gauche digne de ce nom. Il annonce même qu’après
les élections ce sera comme avant.
La foi du
charbonnier
Il faut la foi du
charbonnier des cocos
pour ne pas renoncer, pour tenter de
faire émerger de cet océan fort peu démocratique une parole d’espoir et de
changement dans le sens d’une justice sociale refondée, dans une gauche qui devrait avoir comme premier souci
d’exprimer sa singularité au service de ceux qui travaillent ou qui
souhaiteraient pouvoir le faire, dans une vie moins rude et dure, dans des
perspectives de progrès. C’est peu dire qu’ils ont besoin de tout notre
soutien.
Jean-Marie Philibert.
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