les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 11 mai 2015

dissipons



Dissipons le brouillard
Les débats qui entourent la commémoration de la victoire du 8 mai 1945 ne sont pas clos : c’est le moins que l’on puisse dire. Et chaque commémoration amène son lot de polémiques multiples et avariées sur le rôle des différents acteurs, sur leurs mérites respectifs,  sur le rôle de l’armée rouge, sur celui des Américains, des Britanniques, des Français, de De Gaulle, de la Résistance, sur les lâchetés, les turpitudes, les trahisons qui n’ont pas manqué pendant les années de guerre. J’ai comme le sentiment que personne n’a envie ( ?), ni intérêt (?) à sortir ces années du brouillard qui semble s’opacifier avec le temps. Au point que l’on pourrait avoir le sentiment que le peuple français a perdu la mémoire.
A Beziers le brouillard n’est pas dissipé
Car comment comprendre les suffrages apportés par des millions d’électeurs au Front National (même dédiabolisé), au racisme dont il se nourrit, au pétainisme dont il est une résurgence, au fascisme dont il aimerait oser reprendre le flambeau, mais il n’ose pas tout à fait, à l’obscurantisme intégral dont il est le pourvoyeur, sans une très grave atteinte à l’intégrité de notre mémoire. Nous avons connu l’horreur, nous l’avons oubliée, nous en redemandons.
Ce ne sont pas les cavalcades organisées, à Canet ou à Saint-Cyprien, à grands renforts de véhicules américains, le 8 mai, qui vont permettre des progrès fulgurants de notre mémoire : peut-être accréditeront-elles l’idée que le salut n’est venu que de l’ouest et que nous devons tout et le reste à l’oncle Sam.
Gommons les aspérités de l’histoire.
Ce ne sont pas les projets de réforme des programmes des collèges à laquelle travaille la ministre Vallaud-Belkacem qui vont renforcer l’enseignement de l’histoire : toujours plus de flou artistique, d’interdisciplinarité bouche-trou, d’horaires réduits. Alors que les collégiens, les lycéens portent un intérêt constant à cette période et ne rechignent jamais à faire les efforts nécessaires pour en comprendre la complexité et les enjeux. Mais il faut gommer les aspérités de l’histoire, surtout si elles avaient « le malheur » de donner aux jeunes une certaine idée de la nation, de son indépendance, de la liberté à préserver pour bâtir une vraie démocratie au service des peuples (pas l’usine à gaz de la construction européenne).
Ce ne sont pas les media qui feront progresser les consciences, même si quelques bonnes émissions nous rappellent à propos la réalité de ces temps difficiles, mais le plus souvent le pittoresque et l’émotion prennent le pas sur la compréhension. La nature du nazisme, du fascisme, le principe d’une supériorité absolue d’une minorité d’hommes sur des bases raciales et de l’incontournable asservissement de tous les autres, le refus de toute humanité partagée, le pouvoir barbare et sauvage qui s’arroge tous les droits et enfin la collusion avec le pouvoir de l’argent, avec le patronat et la grande bourgeoisie qui, avec un tel allié, peuvent se permettre ce dont ils ne cessent de rêver : l’exploitation sans vergogne de toutes les forces de travail.
Que d’atermoiements !
C’est encore plus vrai quand on tente d’examiner les luttes qui ont permis l’issue victorieuse du 8 mai 45 : ne parlons pas de la promptitude (momolle) des grands pays à venir au secours des Français et des Anglais, évoquons pour mémoire les rivalités pour imposer un leadership aux pays libres, taisons les prétentions à prendre la main  sur des empires coloniaux encore conséquents. Mais observons attentivement les atermoiements à organiser le combat des peuples, les petites (et les grandes) complaisances avec l’occupant, l’excuse d’une collaboration largement répandue, les entraves mises sur le chemin de l’unité des forces de résistances, les réticences à fournir des armes à ceux qui voulaient combattre à l’intérieur, l’utilisation forcenée de l’anticommunisme, et on aura vite compris qu’il a fallu faire des miracles pour aboutir.
Ces miracles ont des noms 
Ils s’appellent unité populaire, rassemblement de tous ceux qui ont la liberté et la démocratie chevillées au corps. Ils s’appellent aussi lutte des classes : le creuset où s’est enracinée la résistance est à l’image des mineurs du Pas de Calais qui dès 1941 se mettaient en grève contre l’occupant. Ils s’appellent construction d’un avenir et des conditions d’une vraie libération : elles se déclinent dans le programme du Conseil National de la Résistance. Et elles ne cessent de porter des fruits à travers la construction d’un état social que, des décennies plus tard, les réactionnaires de tous poils rêvent d’abattre.
La leçon du 8 Mai est sans cesse à réapprendre : d’où le brouillard savamment entretenu.
Jean-Marie Philibert

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