Feu, le
Centre del Mon !
C’était un lieu promis au plus brillant avenir, ses
promoteurs, ses inventeurs, ses financiers y voyaient des occasions inespérées
de faire des sous (une rentabilité à 12 % lit-on dans la presse régionale).
L’équipe municipale, Jean-Paul Alduy, en tête, était persuadée d’avoir là le
projet qui sortirait la ville de la situation moyenâgeuse dans laquelle des décennies de gestion clientéliste
l’avaient enlisée. Grâce au TGV, et à sa nouvelle gare, Barcelone allait
devenir la banlieue de PERPIGNAN et les Barcelonais allaient se répandre en
grappes joyeuses et animées tout au long de l’avenue Général de Gaulle
pour faire du centre-ville un lieu d’effervescence
culturelle, commerciale et festive. Comme les ramblas de Barcelone. Le
rêve !
Une œuvre
architecturale et urbanistique
Il est vrai que la visite de Salvador Dali, il y a plus de
trente ans, pour faire de la gare de PERPIGNAN le centre du monde avait été un
signe prémonitoire que là où la paranoïa critique du grand maître du
surréalisme passait les dollars ne pouvaient que pousser. Et tout le monde ou
presque d’y croire et d’investir dans un quartier qui, pour être populaire et
sympathique, n’en restait pas moins un peu à l’écart du cœur de la ville. Pour attirer le chaland, le séculaire et
sinistre tunnel qui passait sous la gare fut transformé en pimpante galerie
commerciale. L’agglo a construit un
gratte-ciel presque digne de Manhattan en face de la nouvelle gare pour abriter
ses services et du haut de ses étages Jean-Paul Alduy, grand prêtre de l’agglo,
pouvait admirer la puissance de son oeuvre architecturale et urbanistique.
Saint A n’était plus Saint-A, le miracle allait opérer. La grandeur perpignanaise
avait là un écrin où elle pourrait exprimer tous les potentiels dont elle est
porteuse. Foi de Jean-Paul !
Quitter un
navire qui coule
Les grincheux qui émettaient quelques doutes étaient envoyés
dans les cordes : les retards de la mise en œuvre de la ligne TGV, les
lenteurs récurrentes des décisions,
l’importance des investissements sur des projets fantasmatiques, les
administrations qui devaient presque toutes se concentrer autour de la gare,
mais qui ne bougeaient pas, les difficultés de circulation, de stationnement,
billevesées !
Mais malheureusement le principe de réalité s’est
imposé : tout, progressivement, mais sûrement, s’est mis à foirer. Les
commerçants ont vite compris qu’on les avait pris pour des imbéciles et que la
meilleure des choses etait de quitter un navire qui coule. Et c’est ce qu’ils
font, les commerces ont quasiment disparu, les clients aussi.
Les voyageurs ne font que passer le plus rapidement possible.
Les deux gares sont plus tristes, l’une que l’autre, elles font plus penser à
Kafka qu’à Dali. Le propriétaire des
lieux, une entreprise espagnole, dans un éclaire de lucidité, a enfin compris
qu’elle s’était fait avoir. Les financiers aussi font des bêtises. Il veut
vendre… et cherche un acheteur. Bon courage au couillounet qui va se laisser
prendre à l’hameçon.
Le maire actuel de PERPIGNAN, Jean-Marc Pujol, qui était
pourtant dans l’équipe qui a tout décidé, voudrait faire porter le chapeau à
Metrovacesa, l’entreprise espagnole qui aurait été trop gourmande ;
peut-être même qu’il va profiter de l’occasion pour dire du mal de son
prédécesseur. Mais il ne veut pas mouiller la ville, ni l’agglo ; lui, le
roi de la pression fiscale, abonné aux projets somptuaires, a enfin compris que son escarcelle est vide.
Il n’a plus qu’une solution : « Courage, fuyons ! »
Jean-Marie PHILIBERT.
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