Les
irréductibles
Dans sa déclaration de l’entre-deux tours, Jean-Luc Mélenchon semble vouloir enterrer le
Front de gauche… sans l’enterrer tout-à-fait… tout en l’enterrant quand même un
peu
Dans une interview au Monde le 10 décembre, à la question,
« Est-ce que le Front de gauche peut survivre à son résultat de dimanche
soir ? »
Il répond :
« Sous
cette forme-là, non. Aux régionales, nous étions illisibles et dispersés en
quatre combinaisons différentes pour treize régions… Il faut reconquérir notre
visibilité et notre capacité d’entraînement, changer nos méthodes et notre
relation au pays. Je ne m’attendais pas à nous voir, cinq ans après, quasiment
revenu à la case départ. » (Patatrac, il l’enterre !)
Et ensuite quand on lui demande comment le Front de gauche
peut partir groupé en 2017, il termine ses déclarations en précisant :
« Il
faut laisser la poussière de l’élection tomber et comparer les diagnostics.
Mais une présidentielle a sa logique interne. Elle doit être pour nous le
moment de régler tous les problèmes d’un coup. Celui de la forme de notre
organisation commune et de la participation des citoyens à l’action collective.
Tout le monde doit avoir conscience que des limites ont été atteintes dans la
patience des Français. Ce pays veut des solutions à ses problèmes. Il y a une
demande d’égalité, d’autorité et de
clarté. Je me sens prêt pour ça. » (Il ne l’enterre pas tout-à
fait, ouf !)
Soyons
clair
J’écris ces lignes (vendredi 11 décembre) sans attendre les
résultats du second tour, mon humeur me pousse à donner ma vision-à-moi du
Front de gauche qui a aussi sa légitimité, même si je n’ai pas la surface
médiatique du camarade Jean-Luc, ni les mêmes ambitions. Sans doute peut-être
un peu plus de clarté !
Le Front de gauche repose sur une donnée
incontournable : il rassemble des organisations différentes qui
s’inscrivent toutes dans des perspectives de transformations sociales, mais qui
gardent leur autonomie, leur organisation, leur personnalité et leur histoire.
Elles ont fait le pari de l’unité d’action sur un certain nombre de domaines,
en particulier sur des plans électoraux, et pour cela il est impératif qu’elles
mettent en œuvre des stratégies, si ce n’est uniformes, au moins relativement
proches, pour rester crédibles aux yeux des Français. La cacophonie est
suicidaire, même s’il est légitime que chacun cherche à faire entendre sa
petite musique.
Ne semons
pas la division.
On est souvent sur la corde raide et on peut donner trop
facilement le sentiment que la tentation de rouler pour soi est plus forte que
l’ambition de construire ensemble, si chaque fois que l’un dit blanc, l’autre
dit gris pâle, et que le troisième pense gris souris. Le responsable c’est
toujours l’autre qui n’a pas tout bien compris et qui sème la division.
C’est un scénario que nous avons malheureusement connu depuis
les présidentielles de 2012 et qui donne à Mélenchon l’impression
d’être « quasiment revenu à la case départ ». Dans un tel
processus politique on est condamné à avoir raison ensemble et pour cela à
rester à la fois modeste et ferme dans le souci de préserver l’unité. Les egos
démesurés, les déclarations fracassantes, les coups de gueule intempestifs,
sont à éviter, comme sont à endiguer les effusions sentimentales. Elles sont
trop souvent à l’œuvre sur le terrain politique et sont autant de risques de
perte de la lucidité minimale nécessaire pour construire une action publique
rarement simple.
Un front à
enrichir.
Ne négligeons jamais l’espoir que ceux qui nous écoutent avec
bienveillance veulent voir prendre
forme, l’espoir qu’il est possible de changer le désordre du monde, qu’il est
possible de le faire dans une action collective qui prenne en
compte les intérêts de ceux qui vivent durement et qui sont le peuple
La justice sociale, le
progrès social, l’émancipation de chacun par la promotion de tous, restent des
ambitions dignes et nobles : elles vont à l’encontre du déferlement de
haine, qui est l’horizon plombé de l’extrême droite. Elles ne suscitent pas des
enthousiasmes forcenés dans la droite présentable, la gauche
« hollandaise » les a oubliés en route. Alors ?
Il ne reste qu’un front d’irréductibles pour en parler
vraiment et tenter de les mettre en œuvre.
C’est un Front de gauche bien sûr. Je pense qu’on pourrait s’en servir
davantage et mieux. Tu vois Méluche on
est presque d’accord !
Jean-Marie Philibert
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