les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 4 mars 2019

retirade


Ce qui aurait dû être dit

Nos plages de sable fin qui attirent les hordes de touristes et les autochtones que nous sommes pendant la belle saison ont vu déferler  en février 39 un peuple chassé de chez lui par un gouvernement fasciste, fuyant la barbarie et cherchant refuge. Ils ont trouvé le sable, les barbelés, l’armée française, mais aussi quelques bonnes volontés solidaires. Ils étaient  républicains, avaient défendu cette république jusqu’au bout.

Le passé présent

Ce passé taraude encore l’histoire de l’Espagne qui n’en a pas fini avec les douleurs et les horreurs qui y ont proliféré pendant la guerre civile. Les forces politiques qui ont permis une transition démocratique à la mort du dictateur ont choisi le voile « pudique » pour permettre ce processus. Les gouvernements successifs de l’Espagne s’étaient tus sur cet exil, s’étaient tus sur le rôle des républicains espagnols, sur ce dont il fut porteur.  Quels qu’en soient les sous-entendus, les circonstances, il y a des moments où la portée historique de certaines paroles incite à ne voir que l’essentiel : l’hommage à la mémoire démocratique de l’Espagne, à ceux qui en furent des emblèmes, Machado et Azana. Ce qui ne veut pas dire que l’on oublie, ne serait-ce qu’un instant, la lutte pour défendre les prisonniers politiques actuels injustement accusés, ni les arrière-pensées politiciennes. La lutte politique est souvent complexe. Dans ce numéro du TC, nous en montrons la difficulté, les interrogations et les aléas.

Une faute

En ce qui me concerne je voudrais mettre l’accent sur ce que je considère comme une faute du gouvernement français à cette occasion où il ne semble pas qu’il y ait eu un grand débat pour savoir s’il fallait « y aller ou ne pas y aller » et accompagner Pedro Sanchez à Montauban, Collioure et Argelès dans ce qui était démarche mémorielle et politique forte où notre gouvernement aurait pu avoir des choses à dire.

Le pouvoir exécutif français est resté à la maison et cela a du sens… peu glorieux.

Macron, en choisissant de laisser la casquette du Préfet des P.O. comme seul emblème de l’état français, à ces cérémonies, est resté fidèle à ce qui a été l’erreur tragique du gouvernement français au moment de la guerre civile : la non-intervention et le cortège lugubre et sinistre d’horreurs qui en ont découlé, pas seulement pour les Espagnols, mais pour tous les Européens, pour tous les démocrates.

Imaginons une parole forte

Je ne peux pas m’empêcher d’imaginer ce qu’auraient pu être, en ce mois de février 2019, les paroles fortes d’une république digne sur cette plage d’Argelès.

« Nous ne pouvons pas laisser les représentants du gouvernement espagnol seuls à cette occasion d’hommage et de pardon à ceux qui n’ont eu de cesse de croire à la république, à ses valeurs, et aux combats légitimes qu’elle imposait. D’autant plus que nous fûmes aussi responsables d’un « accueil » indigne des civils que nous avons traités de façon inhumaine, que nous avons parqués, sans abri, derrière des barbelés, à l’écart bien sûr des bons français qu’il ne fallait pas laisser contaminer par un attachement trop fort aux valeurs de la république. La peur des rouges fut fratricide. Puissions-nous nous en souvenir ! Quant aux combattants républicains qui ont franchi la frontière, au lieu de les désarmer, de les humilier, c’est une haie d’honneur qu’il aurait fallu leur faire.

Nous aussi nous avons à demander pardon. Les années qui ont suivi ce premier exode massif du siècle, vont nous confronter à l’immensité de nos erreurs. La non-intervention porte les germes des victoires nazies, de l’Europe déchirée et de ses morts. Et, ironie de l’histoire, ce sont quelques-uns de ceux que nous avons désarmés en 39 qui ont contribué à notre libération en 45.

Dans les temps agités qui sont les nôtres, gardons la mémoire des erreurs à ne plus commettre. »

Voilà ce que le gouvernement français tout au vide sidéral de  son grand débat était dans l’incapacité de dire.

Jean-Marie Philibert

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