les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

mardi 27 octobre 2020

RETOUR SUR LA LAICITE

 

RETOUR SUR LA LAICITE

Depuis l’assassinat de Samuel Pati, ils sont nombreux à n’avoir que ce mot à la bouche, à en faire la référence absolue qui transcende les opinions, qui devrait devenir le quatrième pilier de la république : la laïcité. ILS, c’est quasiment tout l’échiquier politique. Beaucoup ont oublié que cette valeur vénérée, née dans les combats républicains du début du 20° siècle n’a pas toujours eu les faveurs des forces politiques dans lesquelles ils se reconnaissent  aujourd’hui, ainsi de la droite qui en imposant les lois Debré qui finançaient l’enseignement privé, catholique et autres, a fragilisé le service public laïque d’éducation, ainsi du parti socialiste qui en renonçant, après 81, à recréer un grand service public laïque d’éducation, a ouvert la porte à des dérives anti-laïque, au nom d’une laïcité « ouverte ». Derrière l’unanimisme de façade d’aujourd’hui les clivages demeurent. Et il n’est pas inutile de revenir aux fondamentaux. De plus la question de l’islam vient compliquer les choses.

La laïcité est ce qui permet, par la loi, à un gouvernement, à un état, à une nation de se gérer, de s’administrer, de se déterminer dans toutes les sphères de ses compétences en dehors de toute influence religieuse. L’église (les églises) et l’état sont séparés : ce qui veut dire que le droit naturel est la référence ultime de la sphère publique et prime sur le droit divin. La foi, ou l’absence de foi, sont du domaine de la sphère privée et la loi garantit leur expression dans le respect des lois communes qui garantissent la liberté de pensée et d’expression.

Les services publics, tous les services publics, ont un rôle exemplaire à jouer en la matière. En particulier l’école, dans sa mission émancipatrice, d’éveil des consciences, de construction des intelligences, d’ouverture sur les lumières de la connaissance. C’est là aujourd’hui que le bât blesse, en particulier pour tous ceux, inspirés par un islamisme radical,  qui confondent, pas que pour des motifs religieux souvent, droit naturel et droit divin, et qui considèrent que pour leur dieu les guerres de religion ne sont jamais finies et qu’il leur faut des victimes expiatoires.

JMP

lundi 26 octobre 2020

EN FINIR AVEC LES FANTOMES

 

En finir avec les fantômes

 

Parmi les paradoxes de notre temps, je crains qu’il y en ait un qui ait malheureusement encore de beaux jours devant lui. Nous vivons les temps de la communication « touzazimut », en live, avec la terre entière, sans barrière, sans retenue, sans surveillance ( j’ai envie d’ajouter, sans conscience). On ne peut pas dire que cette luxuriante communication nous ait conduit à des avancées morales, intellectuelles, politiques, idéologiques, culturelles à la hauteur de nos attentes et de besoins sociaux accrus. Ce serait même le contraire : les tragiques événements de ces derniers jours illustrent de façon violente et barbare le déphasage absolu qu’il peut y avoir entre nos smartphones, nos ordis, tous les réseaux sociaux et la/les lumières  qui ne devraient pas cesser d’être allumées au fond de nos cervelles.

Hégémonie et terreur

Mais malheureusement au quotidien il n’y en a que pour la com mondialisée, que pour les écrans qui captivent nos regards et notre attention, qui règnent sur nos vies au point d’y voler une part de notre humanité et de permettre à des fous furieux de nous entraîner vers des temps obscurantistes où il deviendrait illusoire de croire à notre capacité à maîtriser notre destin. Les fanatiques en tous genres en ont bien compris les pouvoirs. Ils tentent d’en utiliser toutes les capacités pour mettre en œuvre une hégémonie qui ne recule pas devant la pire terreur ; Ainsi l’assassinat d’un professeur d’histoire qui croyait et voulait faire croire à la liberté de pensée et d’expression… et bien évidemment sa diffusion sur les réseaux sociaux.

Fatalisme ?

D’où notre sidération, d’où le trouble profond qui traverse la société au point que, dans toutes les communes, un hommage a été rendu à Samuel Paty. Mais aussi et malheureusement, comme un fatalisme devant les intolérances, les discriminations, les divisions de la société, les bouleversements culturels, la montée des intégrismes, les repliements communautaires.

En dehors des déclarations martiales, des hommages officiels, des coups d’épées dans la fourmilière terroriste, serions-nous impuissants devant cette dérive mortifère ? En particulier face à l’utilisation des réseaux sociaux comme arme imparable pour pénétrer dans les profondeurs du tissu social et lui faire perdre ses valeurs fondamentales ?

Sus à l’anonymat

Je ne le crois pas ! Mais dans le même temps je perçois chez les responsables de ces réseaux, et tous ceux qui politiquement, médiatiquement sont en lien avec eux, une très grande réticence à rogner les ailes de ces puissances nouvelles qui seraient comme des parangons de la liberté de pensée et d’expression.

Pensez-donc, pouvoir tout dire, tout montrer, avec un simple clic, avoir des followers pour les pires sottises et bien sûr en toute impunité, grâce à un anonymat bien commode. On peut ainsi surmultiplier son ego en proférant des énormités et en trouvant des imbéciles pour vous croire. Tout ce qui est dans la société est illicite, la diffamation, les menaces, la propagation de fausses nouvelles et j’en passe, est bien venu sur les réseaux sociaux. La société serait donc condamnée à ne plus se protéger : on en mesure les conséquences.

Je pense très profondément qu’il est plus que  temps d’en finir et que la première parade immédiate réside dans la fin d’un anonymat suicidaire pour tous : ce n’est pas une question de spécialistes de la toile, qui vont trouver toutes les raisons de continuer à faire comme avant. C’est une question politique, morale, philosophique, très liée à ce que Samuel Paty tentait d’apprendre à ses élèves : la liberté d’expression et de pensée impose sur la toile, comme dans la vie sociale, des citoyens responsables d’eux-mêmes, pas des fantômes.

Jean-Marie Philibert.

mercredi 21 octobre 2020

APPEL DES 1000

 

APPEL DES 1000 POUR UNE CANDIDATURE COMMUNE ECOLOGIQUE SOCIALE ET DEMOCRATIQUE EN 2022

Au vu de la situation politique, des résultats des dernières élections, de la montée fulgurante de l’abstention et du trouble manifeste d’une grande partie de l’électorat la nécessité de l’union (je parle de ce qui me concerne, la gauche) est une évidence. Le dire, l’écrire, y travailler dans des appels collectifs est positif. Ce sont des premiers pas nécessaires.

Construire, pour 2022,  un projet alternatif digne de ce nom qui prendrait le contre-pied de toutes les dérives réactionnaires que nous connaissons pour proposer une politique sociale, démocratique, écologique est une perspective intéressante. Circule actuellement un appel des 1000 pour une candidature commune écologique sociale et démocratique en 2022, il est sur les réseaux sociaux. Les 1000 et même un peu plus maintenant viennent de tous (ou presque) les courants de la gauche. Ils ne semblent pas nécessairement en prise directe avec les états-majors des partis et donnent le sentiment de vouloir initier un mouvement qui les dépasse et qui cherche à les pousser, à faire bouger les lignes dans une démarche de mobilisation citoyenne

L’essentiel reste à faire : celui du contenu politique, sa pertinence sociale, économique, écologique dans un contexte planétaire, on va dire agité et incertain, où les aspirations à l’unité et au rassemblement, aussi fortes soient-elles, se heurteront aux analyses, aux aspirations, aux prétentions, aux manœuvres, aux ambiguïtés, aux intérêts divergents. Les 1000 le savent, mais ils savent aussi que si l’on ne parvient pas à un moment ou à un autre à les dépasser et à se rassembler on restera pour quelque temps, et peut-être pour longtemps encore, dans le reculoir avec les souffrances qui vont avec. Ils se lancent donc dans l’aventure du rassemblement et nous invite à les suivre.

jmp

 

RASSEMBLEMENT A PERPIGNAN

 

Rassemblement grave et ému devant la Préfecture de PERPIGNAN

 

Dimanche 15 heures, ils sont plus de deux mille, émus, tristes, déterminés, des enseignants, des parents, des défenseurs de l’école, des travailleurs, des citoyens pour exprimer leur émotion, leur horreur devant un enseignant assassiné pour avoir osé utiliser les caricatures de Mahomet dans un cours d’enseignement moral et civique sur la liberté d’expression et de pensée. Pour saluer sa mémoire et dire plus jamais ça.

Ce rassemblement inhabituel,un dimanche, était à l’initiative des organisations syndicales d’enseignants, des parents d’élèves et pour les participants il répondait à plusieurs nécessités : celle  de la solidarité avec un professeur qui ne faisait que son métier. Les applaudissements prolongés qui ont marqué l’intervention de Jean-Paul Bareil, responsable FSU, au nom des organisations étaient le signe de cette émotion partagée. Ils s’adressaient à Samuel Paty Mais il y avait aussi dans les esprits le  souci de préserver l’école comme lieu de la construction du citoyen, de sa liberté de conscience, de l’émancipation de son esprit éclairé. De défendre la démocratie et la république.

« Réunis pour exprimer notre attachement à l’école, à sa mission d’émancipation… Les enseignants doivent être soutenus dans l’exerce de leur métier… Nous sommes attachés à la laïcité qui garantit la liberté de conscience… »a-t-il dit.

Malgré la douleur collective, de la dignité, de la détermination et la volonté de ne rien céder face aux fanatismes et aux extrémismes et la plus grande vigilance devant toute instrumentalisation.

La veille un rassemblement d’une centaine de fidèles d’Aliot, accompagné de Pujol, devant la Mairie de Perpignan avait une toute autre dimension : il s’y mêlait amalgames faciles et racismes rituels chez ces gens-là. Cela n’est pas pour nous étonner.

Le peuple de Perpignan ne s’était pas trompé : il avait choisi le dimanche. Pour dire « JE SUIS PROF ! JE SUIS SAMUEL !  C’est notre école qui promeut la liberté, l’égalité et la fraternité… »

JMP

samedi 17 octobre 2020

COLERE ET SOLIDARITE ABSOLUES

 

Colère et solidarité absolues

 

Les évènements se bousculent et nous bousculent. Tragiquement ! Le dernier en date : l’assassinat d’un professeur d’histoire par un fanatique islamiste. Il avait osé évoquer en classe la liberté d’expression, de pensée et utiliser pour cela les caricatures de Mahomet.

Le contexte

Il survient dans un contexte de couvre-feu éminemment anxiogène, où se multiplient au prétexte d’état d’urgence les atteintes aux libertés et les déclarations martiales alors que ce que l’on sait de la pandémie en cours n’est toujours que parcellaire. Avec la conscience… et la crainte que les choses durent, continuent à perturber nos vies et profitent à tous les contempteurs de la démocratie (ils ne sont pas qu’à l’extrême droite) pour lui rogner les ailes.

Quant à l’efficacité des mesures préconisées présentées comme la seule voie possible…  je crains… parce que j’ai peu de confiance dans ce gouvernement, dans ce président, dans cette majorité.

J’ai comme le sentiment qu’ils ne sont pas en capacité de prendre la mesure des choses, de leur gravité, de leur étendue, de leur enjeu et cela dans tous les domaines.

Y compris celui, central, de l’éducation !

L’incurie

On pourrait les aligner, ces mesures : devant l’extrême pauvreté qui menace des pans entiers de la société et qui, sous les effets de la crise économique et sociale, ne peut que s’aggraver, quelques centaines d’euro jetées, par-ci, par-là, pour les plus démunis. Les entreprises (les patrons, quoi !), se partageront l’essentiel d’un magot de dingues (qu’on avait bien caché), au nom bien sûr de l’efficacité économique du plan d’urgence.

Les riches doivent le rester (et même un peu plus) et les pauvres aussi bien sûr. « En même temps » comme ils disent chez Macron. Il est urgent que rien ne change.

L’idée d’un monde d’après, différent, les dépasse totalement, d’où l’enfermement dans les certitudes du monde d’avant, les services publics pressurés, les besoins sociaux niés, les lits dans les hôpitaux fermés, la petite tambouille politicienne pour tromper son monde et faire durer son pouvoir, à droite évidemment.

Je ne veux pas oublier les embrouillaminis politiques et idéologiques, comme celui sur le « séparatisme », en fait l’islamisme radical, ou pas, je ne saurais dire, puisqu’il y a de l’embrouille, qui n’ont pour effet que de troubler les esprits et d’enkyster des crises profondes au sein d’une société éclatée qui n’a surtout pas besoin de ça.

Un fantassin de l’émancipation

Faire son travail de professeur dans ce contexte est difficile, dangereux, évoquer la liberté de pensée, d’expression, courageux, voire téméraire, diront certains qui ont peur que la marmite explose. D’autant plus que ceux qui ont la responsabilité de l’institution ne font rien, n’ont rien fait pour rendre la tâche facile. Si ce n’est prodiguer des discours démagogiques, hors sol. Relisez tous les discours de Blanquer depuis la rentrée et vous aurez une illustration de l’incurie gouvernementale

En face, sans protection, honneur à notre camarade, fantassin de la démocratie, acteur de l’émancipation !

Engagé, comme le personnel médical, comme les premiers de corvée, comme les fonctionnaires, comme tous ceux/celles qui poussé(e)s par leur civisme, leur conscience, poursuivent un travail qu’ils/elles savent mal payé au service d’un bien collectif.

Parce qu’il y va de leur dignité et qu’on ne transige pas quand ce que nous construisons en commun est menacé.

Jean-Marie Philibert.

 

lundi 5 octobre 2020

ACTEUR DE SON TEMPS

 

Acteur de son temps

 

Dans ces temps troublés pour cause de covid, où les incertitudes prolifèrent, où les pouvoirs publics donnent le sentiment de naviguer à vue et où les discours de vérité semblent aux abonnés absents, il est  heureux d’entendre des paroles qui tranchent avec la morosité ambiante, non pas parce qu’elles nous enferment dans un optimisme béat et inconscient, mais bien au contraire parce qu’elles nous amènent à regarder le réel.

La question du temps

L’occasion m’en fut donnée lors d’une des récentes émissions littéraires sur France 5, « La grande librairie » qui évoquait le dernier livre de Gisèle Halimi , écrit peu de temps avant sa disparition et présenté par la journaliste qui l’avait questionnée et accompagnée dans cette tâche,« Une farouche liberté », un ouvrage de Laure Adler « La voyageuse de nuit » et un livre de souvenir de Philippe Labro « J’irai nager dans plus de rivières ». Des auteurs d’un âge certain. Mon propos n’est pas de faire un travail critique sur ces ouvrages : je n’ai lu que le livre de Gisèle Halimi et j’y ai pris un plaisir fort, en même temps qu’une leçon de vie. Pour les autres je me contenterais d’évoquer ce qui en a été dit. Cela m’a semblé suffisamment riche pour consacrer mon humeur de la semaine à ce qui fait le quotidien, la vie, l’interrogation des humains que nous sommes : la question du temps, du temps qui passe, de ses effets, de ses inquiétudes et de ses espoirs, et donc la question de la vieillesse que l’on donne aujourd’hui le sentiment de ne plus savoir appeler par son nom.

Des euphémismes

Il y a eu le troisième âge, les personnes âgées, les ainés, les séniors… Il y a la silver économie… Il y a la dépendance… Il y a dans la bouche de Castex, « les papys et les mamies qui ne pourraient plus aller chercher les petits enfants à l’ècole »… Il y a les personnes à risques… Et j’en passe… Un ghetto idéologique (mais pas que…) dans lequel le jeunisme ambiant donne parfois l’impression de vouloir contenir sa propre angoisse du temps. Le monde médiatique qui n’est jamais en retard d’une turpitude peut s’il le faut en rajouter sur l’opposition entre des retraités copieusement nourris par leur pension et les jeunes confrontés aux réalités du chômage. Il y a même des responsables politiques qui échafaudent des projets pour réduire les retraites et faire payer les vieux… au nom de la justice bien sûr !

Se dire vieux/vieille

Le témoignage de Gisèle Halimi, son attachement viscéral à la lutte des femmes, son engagement contre le colonialisme, sa farouche obstination à ne jamais abdiquer devant les attaques contre sa/la liberté, la poursuite de son combat jusqu’au terme de sa vie, sans la moindre concession aux vicissitudes de l’âge sont des signes forts. Le temps ne fait rien à l’affaire et il importe bien moins que la fidélité à ce qu’on est, ce qu’on croit, ce qu’on veut pour la liberté et le bonheur des femmes et des hommes.

Laure Adler confirme avec fougue cette même conviction qu’il est important de s’affirmer pour ce qu’on est, de ne pas chercher à tromper son monde et à se tromper soi-même, qu’il n’y pas d’autres choix que de se dire vieux/vieille quand on l’est. Elle se moque gentiment de Philippe Labro, aimable octogénaire,  qui semble gêné par l’expression et qui préfère se dire mûr que vieux. Et elle retrouve la réplique que Simone Signoret faisait à propos de  Montand : « Moi, je vieillis, lui, il mûrit » La société est sans doute, en la matière, plus dure avec les femmes qu’avec les hommes.

Mais le rapport au temps reste rude, il importe d’y faire face avec dignité et courage sans se prendre pour Superman ou Supermamy, en citoyen exigeant et solidaire, en acteur de son temps !

Jean-Marie Philibert.