Haro sur
les mémés et les pépés
Les historiens auront à montrer et à dire qu’à la fin du 20°
siècle, et au début du 21° la question des retraites est devenue centrale,
récurrente et l’objet de débats sans cesse renouvelés, comme s’il s’agissait
d’un problème insoluble dont les enjeux sont primordiaux. Les mémés et les
pépés coûtent trop cher, on ne sait plus qu’en faire. Vite ! Vite une
réforme pour en finir.
65
ans ?
Une nouvelle preuve en est apportée par la rumeur qui est
sortie des débats de la campagne présidentielle, selon laquelle Macron serait
favorable à un allongement à 65 ans du départ, après n’en avoir rien dit dans
sa lettre aux Françaises et aux Français. En retardant l’âge de départ à la
retraite, on limite mathématiquement le nombre de pépés et de mémés et
leur coût bien sûr prohibitif.
Un nouvel objet de litige d’autant plus sensible que vous
connaissez mon attachement profond à mes mémé-pépé, et que je fais partie de la
catégorie.
J’ai envie de les, de me, de nous défendre et pour cela de
tenter de comprendre pourquoi on en est là.
Une vie qui
vaille la peine d’être vécue
D’abord l’évolution bénéfiques des pratiques médicales et les aides sociales qui les ont permises et
accompagnées ont considérablement modifié les perspectives : on vit de
plus en plus longtemps. Vieillir est devenu notre horizon commun, c’est vrai
dans les pays développés où les pépés-mémés prolifèrent. Cela impose des
obligations, en particulier celle de faire en sorte que ce soit une vie qui
vaille la peine d’être vécue et qu’elle ait sa place dans l’organisation
générale d’une société : c’est ce qu’ils-elles demandent.
Pendant longtemps, c’est la structure familiale qui s’est
chargée des anciens, les normes matriarcales ou patriarcales fondaient ces
comportements, qui se différenciaient selon les classes sociales. C’était un
maillon fort qui a joué un rôle profond dans la construction des générations
montantes.
Et puis assez brutalement, au moment où la population âgée
connaissait un véritable essor, la durée moyenne de vie augmentant
régulièrement, la vie moderne et les crises qui l’ont modelée ont cassé un
modèle qui avait peu ou prou fonctionné. La cellule familiale s’est refermée
sur une génération parents/enfants, les conditions de logement, de vie, les
difficultés sociales, les mutations du monde du travail ont favorisé le chacun
pour soi, laissant les formes anciennes de patriarcat ou matriarcat, comme des
survivances de plus en plus rares. Dans le même temps les seniors cherchaient à
préserver leur indépendance, leur aspiration à vivre en dépit des attaques du
temps et contribuaient très activement à la vie de la cité. Ma mémé n’aurait
pas tout compris, mais c’est ainsi.
Et ça a mal tourné au point de faire des retraites et des retraité(e)s THE
PROBLEM.
THE PROBLEM
Après les années 80, les débats politiques, économiques et sociaux se sont
réorientés sur le poids financier que représentait le maintien de droits
sociaux, soudainement devenus insupportables pour une économie malade, d’où
l‘antienne sans cesse évoquée : la réforme des retraites est obligatoire,
il faudra travailler plus longtemps pour des pensions de plus en plus riquiquis
et prendre sur les revenus des anciens de quoi grossir la masse des richesses
que l’accumulation capitaliste ne cesse d’engranger. Elle avait bien perçu
qu’il y avait du côté des pépés et des mémés du pognon à gratter si’ l’on voulait faire exploser les
rendements. Tous les pays développés sous la férule du gRRRRand Capital s’y
sont mis, nous aussi. La révolte a grondé partout. Mais on y a laissé des
plumes.
En 2020 Macron a levé à nouveau le lièvre : il a eu la
réponse qu’il méritait. Le covid et les confinements ont sifflé une mi-temps.
Mais la partie devrait reprendre. Le capital est hermétique aux nécessités du
droit social, il ne sait qu’accumuler au détriment de l’humain. Il veut continuer à rogner l’argent des
pépés-mémés (l’argent de leur vie). Le capital, Macron est son valet.
Jean-Marie Philibert.
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