Tout faire
et surtout ne pas lasser faire
En période d’inondation, l’expérience nous apprend qu’il est
très difficile d’arrêter l’eau qui monte inexorablement. Les sacs de sable sont
inefficaces, tous les calfeutrages ne sont pas d’un grand effet. Il ne reste
plus qu’à tenter de sauver ce qui peut l’être, c’est-à-dire pas grand-chose, et
prendre, comme on peut, la poudre d’escampette. En attendant quelques jours
plus tard, quand les flots se seront calmés, de revenir mesurer les dégâts
et pleurer sur notre sort.
Pourquoi est-ce cette image d’inondation ravageuse qui me
vient à l’esprit quand je veux vous parler du Front National ? La montée
des voix frontistes correspond-elle à un tel scénario-catastrophe ? Face
au pire, serions-nous impuissants ?
Amnésiques
Paradoxe : cette eau qui monte ne tombe pas du ciel,
elle n’est pas l’instrument d’une providence funeste, elle n’est pas l’œuvre
d’un esprit malin, elle monte dans les urnes électorales où les mains d’un
certain nombre de nos concitoyens, des gens comme vous et moi, déposent des
bulletins qui dégagent une odeur pestilentielle, qui sont porteurs d’un venin
mortel, dont l’histoire récente a montré les horreurs qu’ils peuvent engendrer.
Le ventre serait encore fécond dont peut sortir la bête immonde… et nous
serions devenus amnésiques au point d’ouvrir la boîte de Pandore. Je dis
« nous » parce que cela nous concerne tous.
Certes des affaires récentes pèsent de tout leur poids ,
comme l’affaire Cahuzac où un ministre des finances, en charge de la fraude
fiscale et de la mise en œuvre d’une politique d’austérité, après avoir juré le
contraire, est convaincu d’avoir planqué des sommes considérables dans des
paradis fiscaux pour échapper au fisc et s’en mettre toujours plus dans les
fouilles. Avec cerise sur le gâteau, la carte du parti socialiste dans la poche
.Et les réponses apportées par le pouvoir restent très en deçà de ce qui serait
nécessaire pour reconstruire un début de confiance dans un pouvoir qui, en à
peine un an, a renié bon nombre de ses engagements.
Du pire au plus
pire.
Ces reniements ouvrent un boulevard à tous ceux qui veulent
abuser un peuple qui n’en peut plus devant les difficultés de l’heure, (chômage, précarité, pouvoir d’achat
insuffisant, remise en cause des droits, misères des services publics,
accroissement des inégalités sociales, récession, marginalisation des plus
démunis… la liste n’est malheureusement pas exhaustive ). Et les orientations
proposées pour la suite vont du pire et au plus pire. Imaginez par exemple
l’idée que peut avoir un jeune aujourd’hui de ses droits au travail, quant à
ses droits à la retraite, il s’imagine mal comment ils pourraient ne pas passer à la trappe.
Pendant ce temps Tapie tente de montrer qu’il n’a pas volé
les 400 millions d’euros que l’état français lui a
octroyés généreusement, Guéant ne
se souvient plus des milliers d’euros en liquide que son passage au ministère
de l’intérieur lui a valu, le peuple, lui,
vit avec pas grand-chose, avec peu, avec parfois moins que peu. Le
peuple qui avait voté à gauche doute maintenant de la gauche. Compréhensible,
non ? Et la gauche (pardon le PS) ne l’entend pas. Et l’autre gauche (la
vraie) a du mal à faire entendre son discours. Mais elle poursuit sa tâche avec
obstination. La preuve : les discours de Mélenchon et Eliane Assessi à la
Fête du TC et la façon dont ils ont été reçus. Quelques chiens de garde
judicieusement placés s’emploient quotidiennement à le brouiller.
Une margarine
frelatée
Comment s’étonner que les réflexes du rejet de la politique,
de la xénophobie, du racisme ordinaire soient devenus les fondements d’une
politique où le FN fait son beurre (sa margarine frelatée plutôt). Avec
d’autant plus de facilité qu’il a su mettre sous le coude un certain nombre de
comportements rappelant ses origines fascisantes et qu’il se fait un très malin
plaisir à récupérer tout un argumentaire
anti-Europe, anti-mondialisation, anti-impérialisme qui lui sert d’attrape-mouches et qui lui
permet de faire dans le social et de brouiller un peu plus les pistes.
Que faire ? Tout faire ! Mais surtout ne pas
laisser faire ! Le front républicain a montré ses limites, l‘effacement
des frontières droite-gauche n’est pas un facteur d’éclaircissement face à un
FN qui ne cesse de jouer la carte de la confusion et à une droite prête à se
laisser glisser vers son extrême. L’appel à la mobilisation de tous pour
réorienter une politique qui n’a que trop tourné le dos aux besoins sociaux est
la tâche la plus urgente. Convaincre le gouvernement que seul il va dans le mur
et nous avec, que le petit jeu de l’alternance, un petit coup de PS, puis un
petit coup d’UMP est dérisoire face aux enjeux de société qui nous attendent,
qu’à ce jeu-là le pire peut arriver. Que la crise de la société impose le chan-ge-ment, pas un ripolinage
de façade. Que toute la gauche (je dis bien toute) y suffira à peine, que le PS
seul, aussi hégémonique et dominant soit-il, n’a ni l’ambition, ni les
capacités, ni les moyens de renverser le désordre des choses.
Ce rassemblement doit se nourrir d’une aspiration, quelque
peu éteinte aujourd’hui, mais susceptible de re-briller à nouveau de mille
feux, à condition d’y mettre toute notre volonté, aspiration qui n’a rien de spontanée et
naturel, mais qu’il importe de reconstruire de façon ouverte et pluraliste,
aspiration au progrès, avec tout le
combat politique, social, éducatif qui va avec. Sur deux terrains très proches,
les retraites et les municipales, nous
aurons très vite à les mener. Ce seront
les remèdes les plus efficaces contre la dégénérescence que nous propose le FN,
et la montée des eaux nauséabondes qui
l’accompagnent.
Jean-Marie PHILIBERT.
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