De l’argent
à la politique…
A l’UMP on n’aime pas que le pouvoir, on aime aussi le
pognon. L’histoire de ce parti a connu de multiples péripéties qui en
attestent : pendant longtemps la proximité des milieux patronaux, la
fréquentation régulière des plus friqués de la société, l’amour réciproque de
la droite et du capital (grand et petit) ont contribué à alimenter des caisses
qui semblaient sans fond (sans fond, pas sans fonds, il faut suivre).
Le tonneau
des Danaïdes.
Les caisses de l’UMP, c’est la version contemporaine du
tonneau des Danaïdes. Rappelez-vous ces filles du roi d’Argos qui parce
qu’elles avaient tué leurs époux la nuit de leur noces furent condamnées dans les enfers à remplir d’eau un tonneau
sans fond. Là ce n’est pas d’eau qu’il est question, mais de monnaie sonnante
et trébuchante, que les responsables successifs du parti se plaisent, se
complaisent, sans complexe, à rechercher et à dépenser avec une allégresse d’autant
plus grande qu’elle ne leur semble pas difficile à gagner. Pendant un temps il
y a eu les tripatouillages foireux entre l’argent public et le moins public,
rappeler-vous Chirac à la Mairie de Paris. Puis après la loi sur le financement
public des partis politiques, sur le remboursement des frais électoraux, censée
mettre un terme à des pratiques peu orthodoxes, les pratiques anciennes ont
perduré, l’affaire Bigmalion en offre un nouvel avatar, après l’affaire
Bettencourt. Tout l’art consiste ensuite à tout faire pour tenter d’échapper
aux mailles de la justice, à offrir à l’opinion publique quelques seconds
couteaux comme victimes expiatoires, à se draper dans les grands principes ou
les engagements-promis-jurés qui, eux, ne coûtent rien. Et s’il n’est pas
possible de faire autrement, d’offrir sa démission pour ouvrir la carrière à la
génération montante d’amoureux de l’argent facile.
Rêver…
Parce que l’argent facile fait rêver, et de plus en plus. Les
salaires n’augmentent pas, ce qui signifie que, comme ils sont les seuls à ne
pas augmenter, le pouvoir d’achat baisse inexorablement, la non-indexation des
retraites les met en arrêt cardiaque pour de longs mois, les allocations en
tous genres sont revues à la baisse au prétexte qu’il faut faire des cadeaux au
patronat, les remboursements de santé se réduisent comme peau de chagrin, se
soigner, se loger, se nourrir, s’habiller, s’instruire, coûtent de plus en plus
cher. La misère rode dans les rues à la recherche de victimes de plus en plus
nombreuses. Pour rêver, il nous reste la Française des jeux et ses millions de
couillonnés par semaine.
L’état peut
peu.
A l’UMP on n’a pas de tels problèmes d’intendance, on n’a pas
besoin de rêver, on est pour l’austérité… pour les autres, on est contre les
déficits publics, on est pour des politiques budgétaires drastiques, on est
pour réduire les services publics à la portion congrue, on est pour tourner le
dos aux besoins sociaux qui coûtent cher, très cher. L’état ne peut pas tout,
l’état peut peu.
Ce sentiment d’une incapacité de l’état à affronter une
situation sociale et économique difficile certes, mais pas irréductible, n’est
pas que l’apanage de l’UMP. Avec des variantes, mais sans aucun esprit
critique, et même avec obstination, le parti socialiste se laisse enfermer dans
une même logique qui le coupe des réalités vécues par les Français, qui lui
coûte élection après élection et dont il a décidé qu’il ne changerait pas. La
gauche plombée, la gauche de la gauche a du mal à émerger. Les résultats des
européennes ont du sens. La crise de crédibilité est profonde et laisse la
porte ouverte à tous ceux qui sont en mesure de nous prendre pour des imbéciles
; pour le FN ce sera sur le dos des étrangers et des métèques, en trompant son monde sans vergogne et en
laissant croire que le pétainisme est l’avenir de notre société… soixante-dix
ans après le débarquement allié en Normandie.
Faire-refaire de la politique, est-ce possible ? De la
politique ? Mais voyons après ce que vous venez d’écrire.
Avons-nous d’autres choix ? Avec modestie, avec
abnégation et détermination, sans illusion, mais avec ambition, l’ambition de
la justice, de la solidarité. Avec la certitude que le progrès social est une
idée neuve, surtout pour tous ceux qui en sont exclus et ils sont légion.
Et enfin pour en revenir à notre point de départ, avec toute l’honnêteté nécessaire à tous ceux qui
ont la prétention de toucher au bien public. Avec désintéressement. Honnêteté,
désintéressement, engagement, voilà des mots un peu « vintage » comme
on dit aujourd’hui. Mais, là, pour le coup,
ça serait aussi une vraie nouveauté.
Jean-Marie Philibert.
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