Commémorons,
et ron, et
ron, petit patapon !
Les commémorations sont–elles utiles ? Vaines ?
Indécentes ? Productrices de
sens ?
Je n’en sais rien ! Un an après l’attentat terroriste
contre Charlie, contre l’hyper casher, après l’assassinat d’une policière
municipale dans les rues de Montrouge, il n’était pas pensable de n’en rien
dire, et de plus quelques mois plus tard, la vague a déferlé avec une intensité
mortifère renouvelée.
Mais la commémoration et l‘émotion ne peuvent pas servir à
étouffer l’esprit critique et la lucidité politique, même si là est
l’ambition de quelques-uns ; la commémoration doit servir à enrichir la
compréhension des événements, d’autant plus s’ils sont entachés d’irrationnel et s’ils sont
d’une ampleur inégalée. La distance peut aider à y voir un peu moins sombre.
Les
questions embarrassantes
Et à poser et reposer quelques questions
embarrassantes : par exemple qu’est-ce qui dans le cas de la surveillance
des locaux de Charlie a pu autoriser les pouvoirs publics (restons
volontairement dans le général) à lever les protections mises en place ? Y avait-il des indices
que les menaces étaient moins
fortes ? L’expérience a tragiquement montré l’inverse. Les services de
renseignements ont-ils été à la hauteur de la situation ? Les
réorganisations subies de par les choix politiques de Sarkozy ne les ont-ils
par fragilisés dans l’accomplissement de leurs missions … On pourrait
poursuivre les interrogations, elles sont légitimes et des proches des victimes
les relaient.
On peut aussi les élargir , à l’analyse des causes qui
ont pu conduire à ce que de tels assassinats aient eu lieu, aux fractures
sociales qui s’y manifestent, à la montée du fanatisme qui en est le terreau,
aux failles de notre laïcité, aux effets d’une crise qui n’est pas
qu’idéologique, aux conflits internationaux où le destin des peuples passe bien
après les tentatives hégémoniques des superpuissances ou des puissances tout
court de se partager les gâteaux…
Citoyenneté
et sécurité ne feraient-elles pas bon ménage ?
Il peut être intéressant de réfléchir aussi aux réactions que
des tels événements ont entraînées : ainsi pourquoi après Charlie un tel
sursaut citoyen, un peuple rassemblé pour témoigner d’un profond attachement à
la république et un gouvernement qui agit dans le même sens ? Et pourquoi
quelques mois plus tard après les
attentats de Novembre, la seule réponse sécuritaire mise en avant, est
l’interdiction des manifestations, le repliement sur la peur, la perspective
d’un état policier sans aucune preuve quant à son efficacité.
Et cela n’a rien de spontané, après janvier, le PS est à la
manœuvre pour donner un sentiment
d’unité nationale qui politiquement doit le servir, après novembre, il vaut
mieux briser un tel élan pour jouer la fermeté ; par exemple la préfète de
P.O s’emploiera à faire que le rassemblement de Perpignan soit modeste et les
élus socialistes resteront devant la porte du Conseil départemental.
Le sens
Dernière remarque sur les formes des commémorations :
elles ont aussi du sens. Faire appel à
Johnny pour rappeler les milliers de Je suis Charlie de la Place de la
République doit mettre du baume à l’âme (je rigole) caustique de nos
dessinateurs de Charlie qui du haut de leurs nuages nous regardent avec
amusement (c’était leur marque de fabrique) nous dépêtrer très maladroitement
dans nos souvenirs, dans nos ambitions
de paix, de justice, de progrès, dans notre soif inassouvie d’égalité,
de liberté, de fraternité.
Camarades, ne nous en voulez pas des misères de nos
commémorations. Avec elles nous ne sommes plus tout à fait dans le réel, mais
déjà dans le mythe, et un peu la magie. Et comme disait l’autre : la
commémoration est au passé, ce que les prédictions sont à l’avenir, un moyen de
le conjurer. Et pour rester dans la veine Charlie, un peu un foutage de
gueule !
Jean-Marie Philibert.
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