Ni…ni…
De la dichotomie… A temps nouveaux termes nouveaux pour bien
faire sentir que les temps anciens c’est fini, que la jeunesse est là, qu’il faut en finir avec les discours dépassés.
La nov’langue sera dichotomique ou ne sera pas.
La dichotomie, oui ! Vous connaissez : le sud et le
nord, l’ail ou le persil, la castagne ou le bisou, la mer ou la montagne, le
froid ou le chaud, l’intelligence ou la bêtise, les catalans ou les gavatxs… Et
puis celle qui fait fureur depuis les présidentielles la gauche et la droite.
Plus particulièrement dans sa version négative, répétitive, labellisée macron,
« ni droite, ni gauche ».
La rhétorique adore les répétitions, « moi président…
moi président… » Vous vous souvenez de l’entourloupe d’Hollande. Comme
s’il suffisait de répéter un mot pour qu’il prenne de la force, pour qu’on y
croie un peu plus. Répétons donc « Ni…ni… ! »
Les ni-ni
qui sentent le soufre
Mais tous les ni-ni ne sont pas équivalents, loin de là, il y
a ceux qui sont là pour renforcer une pensée, un choix, un engagement, un refus
viscéral : « NI DIEU ! NI MAÎTRE ! » Je revendique
haut et fort ma liberté de penser, d’agir, par-delà tous les pouvoirs, toutes
les chapelles, toutes les contraintes religieuses, morales, politiques. Ce
nini-là est sans concession, il sent le soufre et la révolte. C’est un ni-ni
qui a du sens, un ni-ni courageux parce qu’il peut vous valoir quelques
difficultés.
Un autre ni-ni, plus riche encore, précise une pensée qui ne
tient pas le christianisme en grande estime : « ni le père, ni le
fils, ni le saint esprit » ou bien plus modeste « ni dieu, ni ses
saints ». Mais le ni-ni est plus souvent laïque, et si vous êtes
totalement déterminé, vous direz que n’accepterez jamais ce que l’on vous
propose « ni vivant, ni mort ». La chose est entendue, claire et
irrémédiable. Enfin pour les misanthropes absolus, vous n’aimez « ni les
français, ni les étrangers ». Pour les mauvais élèves ce n’est « ni
l’école privée, ni l’école publique » qui peut faire leur bonheur. Et pour
les antifascistes « Ni Marine, ni Le Pen ».
Les ni-ni
trompeurs
Ces ni-ni-là ont du sens et ne cherchent pas à tromper leur
monde. Mais ils ne sont pas les plus fréquents et le ni-ni peut aussi sentir
son entourloupe. Dans la bouche des macrons-boys et de leurs thuriféraires
le « ni droite-ni gauche » est de cet acabit, de façon d’autant
plus flagrante qu’il est largement l’œuvre de gens de droite, de gauche et de
nulle part, mais assoiffés d’un pouvoir qui leur a tellement tourneboulé la
tronche qu’ils ont perdu tout sens de la latéralisation.
Ces ni-ni-là leur laissent les mains libres. Par exemple,
« Ni la peste, ni le choléra », mais il y a tous les autres microbes
politiques qui vous assaillent.
« Ni le matin, ni le soir », mais il reste tous les après-midi pour
vous entuber. « Ni propre, ni sale », mais un peu crade quand même.
« Ni debout, ni couché », mais peut-être un peu à genoux. « Ni
un peu, ni beaucoup », mais sans doute assez pour vous faire suer le
burnous et vous contraindre à fermer votre gueule. « Ni être, ni
avoir », parce que vous ne serez plus rien, vous n’aurez plus rien … que
les yeux pour pleurer.
Nos ni-ni à
nous
Ne désespérez pas, camarades : le langage, notre
persistance, nos espoirs ont des ressources insoupçonnées. Nous avons nos ni-ni
à nous qui ne leur plairont pas beaucoup, mais ils devront s’y faire. « Ni
aujourd’hui, ni demain » nous ne baisserons la garde, nous ne courberons
l’échine, nous n’accepterons ni
l’exclusion, ni la précarité, ni le chômage. Ni le mensonge, ni l’esbroufe n’entameront notre lucidité, notre
combativité, notre aspiration à l’unité.
C’est fini-ni.
Jean-Marie Philibert.
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