les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 29 janvier 2018

faut-il brûler la Charte d'Amiens


Faut-il brûler la Charte d’Amiens ?

Mon camarade Roger Hillel, à qui je dois beaucoup, et vous aussi d’ailleurs puisqu’il m’a converti à l’écriture journalistique, en particulier aux billets d’humeur dans le TC., a dans une tribune publiée sur son blog, posé une question qui me semble au cœur de la problématique sociale d’aujourd’hui : quand sera-t-il possible de lutter ensemble ?  Dans un contexte de plus en plus radicalisé, il s’attaque aux suspicions toujours vivaces qui empêchent  le rassemblement : il cherche des voies pour les réduire, en particulier en levant les réticences  que les organisations syndicales et associatives ont à accepter, es qualité,  dans leurs rassemblements les forces politiques. Selon lui la Charte d’Amiens qui fonde l’indépendance syndicale ne correspondrait plus à la nécessité de l’heure.  Il m’invite au débat. Faut-il brûler la Charte d’Amiens ?

Se défendre et transformer

Je n’ai pas de fétichisme particulier concernant la Charte d’Amiens, même si je reconnais que le syndicalisme que nous avons connu s’y est nourri, dans sa double dimension de défense des intérêts des travailleurs et en même temps de lutte pour une transformation sociale qui doit permettre leur émancipation. Depuis plus d’un siècle ! Cela implique pour le syndiqué de ne pas introduire dans l’action sociale unitaire toutes les opinions philosophiques, politiques ou autres qu’il est en droit d’avoir, mais qui seraient autant de ferments de désunions dans une bataille qui ne sera gagnée que par le rassemblement du plus grand nombre : respectons l’indépendance du syndical et du politique !

A une approche théorique de la question, je préfère le pragmatisme et l’expérience, et elle fut longue et riche de soubresauts divers.

Les questions

De l’expérience… C’est un chapitre des Essais de Montaigne… Jouons donc au Montaigne du syndicalisme. Que nous apprend-elle ? Dès que l’on intervient sur le terrain social, les questions surgissent : que faire ? Mais la première question entraîne souvent une seconde, une troisième… Comment faire ? Pour quoi faire ? Et pourquoi faire ? Avec qui faire ?

Et là bien sûr, il sera question de l’autonomie, de l’indépendance de l’organisation sociale, de sa nature, de sa liberté à intervenir sur le terrain choisi.

Répondons dans le désordre. Pour quoi ? Pour quoi se battre ? Mais c’est élémentaire, pour sa dignité, pour pouvoir se regarder en face et se dire : je ne suis pas la sous-merde qu’ils imaginent et qu’ils sont prêts à priver du nécessaire. Pourquoi ? Parce que je suis libre, je décide de mon avenir, de mes droits, de mes désirs et  personne n’est en mesure de le faire à ma place. Parce que ma faim, ma soif, mes besoins ne sont pas de simples variables d’ajustement d’une économie boiteuse, mais des éléments vitaux sans lesquels je ne suis rien. Que faire et comment ? Tout ce qui est légitime, et si l’on veut que les noix de coco tombent, il est légitime de secouer le cocotier. Il ne s’agit pas de conversations mondaines : la seule vertu de l’action, c’est de donner des fruits et il faut insister jusqu’à ce que les fruits soient là. On n’est pas fatigué dans l’action sociale ! Et on ose !

Avec qui ?

Ultime question : avec qui ? Avec tous, partis, syndicats, associations, jeune et moins jeunes, à l’exclusion de ceux qui ont la haine, l’exclusion, l’injustice, l’inhumanité, en bandoulières.

Avec tous ceux qui fabriquent de la plus-value, mais pas avec ceux qui s’en nourrissent grassement.

Avec toutes les victimes innombrables d’un désordre organisé qui veut nous isoler.

Je reste cependant persuadé que même s’il donne parfois un visage éclaté, même si les stratégies suivies peuvent parfois tenir de manœuvres politiciennes, même s’il a perdu de son emprise sur le salariat, le pole syndical reste, à condition d’être porté par un mouvement de masse et de classe unitaire, le meilleur vecteur d’une riposte d’envergure apte à faire reculer les pouvoirs . Il est au cœur du processus d’exploitation qu’il dénonce collectivement. Et on peut mesurer ce qu’il gagnerait en étant plus uni. Mais il se mutilerait en se coupant des forces politiques  qui le reconnaissent pour ce qu’il est, retour à la charte d’Amiens : un outil de transformation de la société et le terme de l’exploitation capitaliste en perspective.

Chacun dans son rôle. La pantalonnade de Mélenchon se prenant pour le chef de la rue contre la loi travail devrait nous inciter à ne pas confondre vitesse et précipitation.

Jean-Marie Philibert

lundi 22 janvier 2018

50 ans et toutes ses dents


50 ans et toutes ses dents



C’est le cinquantenaire, compte tenu de mon avancée en âge, le centenaire, il n’est pas sûr que je puisse le fêter, alors n’attendons pas plus longtemps, dès ce début janvier, certes avec quelques semaines d’avance, allons-y gaiement, avec toute la nostalgie nécessaire, commémorons MAI 68 !

Vanitas vanitatum

Ce sera chose faite, on n’aura plus à y revenir. Tous les réacs en tous genres pourront disserter en long en large et en travers sur ce qui fut un des derniers moments de trouille gigantesque pour les possédants, sur ce qui se passe quand l’imagination prend  un peu le pouvoir, sur la convergence de l’action syndicale, sociale, culturelle, politique quand elle sort des cadres préétablis. Ils auront pratiquement toute l’année pour nous expliquer que VANITAS VANTATUM tout n’est que vanité, y compris Mai 68, qu’il fallait être bien naïf pour y croire. Et que les grands prêtres  des barricades reconvertis dans la souplesse d’échine, dans les petits fours et dans tous les visages de la réaction ont eu raison de le faire… au moins pour leurs portefeuilles et pour leur gloriole. A quoi bon rester fidèle à ses idéaux de jeunesse, tout le monde a le droit de devenir un vieux con !

Comprendre Mai 68 ne peut pas faire l’impasse sur une dimension essentielle : la référence incontournable à la jeunesse, à la jeunesse du monde.

La vraie vie

Et charité bien ordonnée commençant par moi-même, partons de ma jeunesse, à moi-même bien sûr… L’humeur c’est toujours un peu personnel… 68, la fin des études universitaires, brillantes certes, mais sinueuses, les premiers contacts avec la vie professionnelle, mes premiers élèves, les fondements d’une famille et vue rétrospectivement une insouciance généralisée. Comme dit ma maman « Tu n’en as pas beaucoup dans le ciboulot ! Sois un homme, mon fils ! » Et 68 représente pour moi, un contact sans doute salutaire avec la vie sociale, politique, avec les soubresauts du monde, avec la vraie vie, quoi !

Mais le paradoxe de ce contact tient à ce qu’il s’opère dans une société où la jeunesse subit la sclérose d’années de pouvoirs gaullistes, où le poids des idéologies rétrogrades et moralistes semble condamner les issues, où sur tous les continents la révolte, la soif de liberté, de démocratie grondent, où, référence à un article prémonitoire, « la France s’ennuie ».

Cette jeunesse a envahi les amphis, la démocratisation des enseignements supérieurs a commencé ses « dégâts », la révolte des étudiants va parachever la fin d’un monde où le désordre dominant est contesté, où le rôle d’héritiers bien-pensants d’une bourgeoisie en mal de repères ne fait plus recette. L’aspiration à être entendus sera décuplée par la sottise du pouvoir et de ses charges policières.

Les luttes

Depuis des mois, le monde du travail bruit de luttes multiformes. Le feu couve, et sans que l’on comprenne exactement pourquoi, même 50 ans après, les petites étincelles  deviennent un grand incendie : le mouvement voit se rejoindre dans la grève les étudiants et le monde ouvrier, non pas sur la base d’un ralliement, mais sur le besoin d’en finir avec la souffrance sociale, de sortir d’un ras-le-bol généralisé. En effet les inégalités sociales restent fortes, la croissance soutenue n’a pas eu pour effet de les lisser (vous savez qui tire toujours les marrons du feu).  Il y a 5 millions de personnes en dessous du seuil de pauvreté, 8 millions qui vivent avec l’équivalent de 700 euro par mois (Ludivine Bantigny, historienne).

L’utopie ?

Les morts (quoi qu’ait dit et fait le préfet « humaniste » Grimaud), la répression, toutes les provinces en branle, les centrales syndicales dans l’unité, la surdité du patronat font prendre au mouvement une ampleur difficile à imaginer aujourd’hui, jusqu’à une paralysie du pays dans une grève générale où apparaissent des  voies nouvelles vers l’autogestion, le contrôle ouvrier, on veut se parler, décider ensemble. On veut vivre l’utopie. Les cultureux sont dans l’action, ou dans l’inaction plutôt. Le gouvernement, le patronat, négocient : les accords de Grenelle acceptent  d’un coup 10 %  d‘augmentation de salaire, une semaine supplémentaire de congés payés, une véritable reconnaissance syndicale…

Cela va sans doute paraître riquiqui à ceux qui rêvent de « jouir sans entrave », mais le syndicalisme est essentiellement pragmatique, et heureusement…

 Nous vivons encore des acquis de 68. Bien loin des bonimenteurs officiels qui se contorsionnent pour nous détourner des combats de l’histoire.

Ce sont ces deux visages de conquêtes ouvrières soudaines et considérables et d’unité des luttes sociales progressistes qu’il me semble important de mettre en avant dans cette commémoration qui débute. Ces deux visages avec toutes leurs dents ! Des visages vivants !

Jean-Marie Philibert.








dimanche 14 janvier 2018

la science et la magie


C’est magique !



Pendant des décennies vous avez enseigné à des jeunes d’un peu tous les milieux le français : vous avez eu largement le temps de mesurer les difficultés du métier, les obstacles que vous rencontriez, la très grande richesse des adolescents qui vous entourez. Vous avez ressenti l’évolution de la relation pédagogique qui était étroitement dépendante de l’évolution des jeunes et des contextes sociaux dans lesquels  ils étaient engagés à conquérir leur autonomie. Vous avez très vite compris que la crise sociale dans laquelle nous étions embarqués allait compliquer leur vie, leur avenir et vous rendre la tâche plus ardue. Mais un certain sens de votre engagement  vous a incité à poursuivre la tâche, à maintenir votre niveau d’exigence, à ne jamais céder à quelque forme que ce soit de renoncement, même ténu, même partiel.

Vous ne vous êtes pas laissé prendre au chant des sirènes  des ministres successifs qui trouvaient qu’il fallait vous moderniser, vous adapter et en rabattre sur vos ambitions… d’un autre âge.

Vous rendre la vie difficile

Ils ont pourtant tout fait pour vous rendre la vie plus difficile : ils vous ont confié plus d’élèves dans des classes plus lourdes, dans les collèges ou lycées souvent pléthoriques. Ils ont tenté de mettre l’institution au pas en imaginant de petits chefs dociles … pour enseignants indociles. Ce travail n’a séduit que quelques hurluberlus en mal de promotion.

Parce que vous étiez les fauteurs de trouble, ceux qui empêchaient la réussite du plus grand nombre, ceux qui bloquaient la démocratisation de l’école, ceux qui ne savaient pas suffisamment dialoguer avec les parents, parce que vous étiez corporatistes, fonctionnaires et même parfois, horreur !, syndicalistes, tous les pouvoirs politiques, y compris ceux pour lesquels vous aviez voté ont voulu vous faire la leçon, vous mettre au pas, décider pour vous de presque tout, en multipliant les directives en tous genres qui ne servent à rien… Avec un résultat très mitigé ! Vous êtes parvenus à préserver des pans entiers de l’institution au point d’en avoir protégé le niveau d’exigence et de la garder comme maillon encore tangible de la construction du lien social, y compris dans des zones où il se tend dangereusement.

Les manœuvres vazelinesques

Vous avez eu parfois l’illusion que vous n’étiez pas loin de vous faire comprendre, que certains ministres pouvaient revenir sur les projets les plus nocifs… Vous avez fait l’expérience qu’il ne s’agissait encore une fois que d’une manœuvre vazelinesque : vous cajoler pour… sois correct, Jean-Marie.

Eh bien ! Encore une bonne nouvelle, avec Macron, avec Blanquer et leur premier ministre transparent, ça continue comme avant. On vous zen…tourloupe ! Quelques mesures  qui ne coûtent rien pour revenir sur les bêtises de l’équipe de branques précédente, du redéploiement de quelques postes pour faire croire que l’on va enfin s’attaquer aux difficultés dans les CP des zones difficiles. Avec l’espoir d’endormir la vigilance et puis l’attaque frontale : elle a deux visages, la préparation de la prochaine rentrée avec une nouvelle et massive chasse aux postes (nous aurons l’occasion d’en reparler) et surtout l’arme absolue contre toutes les difficultés que vous avez rencontrées, que vous rencontrez, que vous rencontrerez, le Conseil Scientifique.

La pierre blanche

C’est un truc que le Ministre veut marquer d’une pierre blanche, qui réunit de grands savants, spécialistes des sciences cognitives, qui savent tout sur le cerveau, ses mécanismes, ses forces, ses faiblesses. Ils en savent tellement qu’ils vont régler tous les problèmes, décider des protocoles à suivre en classe, des manuels, de la formation des enseignants, du traitement du « handicap, des inégalités », termes curieusement rapprochés. Il travaillera, ouvrez vos oreilles,  sur la « métacognition », Dehaene dixit. C’est le chef de la bande, la coqueluche du Ministre…et un petit copain de l’Institut Montaigne, officine de droite pour nous empapaouter profond.
Et voilà la messe est dite, l’avenir est à la science… ou au renouveau imparable de la pensée magique.

Vous prenez alors conscience que vous avez été un couillon pendant quarante ans ! Mais vous vous jurez de le rester.

Jean-Marie Philibert


lundi 8 janvier 2018

la politique la mort la vie


La politique, la mort, la vie…



Paradoxe de cette drôle d’époque : on s’escrime au TC, et sans doute aussi dans quelques autres officines, à faire de la politique et à penser politique, et l’observation du monde, l’écoute attentive de ce que les gens disent, le comportement de nombre d’élus sembleraient indiquer que la politique est morte, qu’elle n’intéresse plus grand monde, que les jeunes ont d’autres chats à fouetter, que les plus anciens n’y croient plus, que tous les exclus n’en attendent plus grand-chose, que la gauche et la droite ont fait leur temps, qu’il faut passer à autre chose. Les temps changent, pourquoi la politique échapperait-elle à cette mort programmée ?

Leur œuvre

La question doit d’autant plus nous inquiéter que les acteurs de cette mort programmée se recrutent dans le personnel politique lui-même qui, par ce qu’il dit, par ce qu’il fait, par ce qu’il programme, creuse la tombe de la démocratie. Le NIDROITE-NIGAUCHE de Macron et En Marche avec sa bande de piénikelés a réussi à brouiller copieusement les pistes, et avec d’autant plus de facilité que  les politiques de gauche très-très molle précédentes ressemblaient à s’y méprendre à des politiques de droite dont on avait le sentiment qu’on ne se débarrasserait jamais. Hollande a tout fait pour qu’on n’y comprenne plus rien et Valls a fini d’embrouiller les pistes.

Le décervelage en œuvre 24 Heures sur 24 dans la petite lucarne et ailleurs rajoutait sa touche délicate à cette confusion généralisée pour définitivement nous persuader qu’il n’y avait pas d’alternative, si ce n’est une souillon du nom de Marine qui sentait tellement mauvais le racisme et la sottise qu’elle  ne pouvait que nous entraîner vers du plus pire encore. Elle était parfaite dans le rôle de repoussoir et pouvait ainsi finir de nous désespérer de la politique. Beurk ! Beurk !

Le peuple dans la…

L’irréalité des discours gouvernementaux ne manifeste qu’une incapacité à faire face aux difficultés sociales de tous ordres, chômage, précarité, exclusion, ségrégation, les salaires bloqués…  qui s’enkystent au détriment du plus grand nombre. Et vas-y que je te déquille encore un peu plus le code du travail. Les milliers de manifestants dans les rues se sont heurtés à des murs. Les murs, c’est très bon pour la désespérance

Le doute s’empare du social. Comme si toutes les issues étaient bloquées !

Pendant ce temps ne vous faites pas de souci, les affaires continuent et Gattaz est content.

Même eux…

 La capacité à faire émerger à gauche une force unitaire, pluraliste, progressiste aussi bien aux présidentielles, qu’aux législatives a fait chou blanc, alors que le courant qui s’est porté sur Mélenchon, la France insoumise, le PCF… était loin d’être négligeable, mais la stratégie d’isolement, la volonté suprématiste du parti de gauche de rafler la mise à son seul profit partisan, à jouer le rôle d’opposant officiel ont bloqué une situation où tout est à reconstruire.

RE-NAI-SSAN-CE

Y compris la politique, la vie politique, les valeurs de la politique, celles qui permettraient d’organiser la cité sur des valeurs de justice, de solidarité, de progrès social, de transformations, de partage équitable des richesses, de véritable démocratie. Y compris les forces pour exprimer ce besoin, pour l’organiser, pour le structurer. Le PCF prépare dans son congrès de 2018 quelque chose qui pourrait ressembler à ce sursaut du politique, à une renaissance ; c’est urgentissime pour sortir  d’un marasme mortifère pour la démocratie et la société.

La vie de la politique est entre nos mains, j’ai bien dit nos mains, pas seulement celles des adhérents du PCF, mais aussi celles de tous les citoyens de ce pays nourris de justice à partager, de démocratie à inventer, de pluralisme à faire vivre.   Celles de tous les acteurs engagés dans la vie collective pour la transformer. Il y faut, il y faudra du courage, de la persévérance, une volonté unitaire forte, une solide santé, le rejet de toutes les simplifications trompeuses, l’aspiration à être heureux ici et maintenant largement partagée. C’est tout ce que je nous souhaite pour 2018. Bougeons le monde !

Jean-Marie Philibert.


lundi 1 janvier 2018

les voeux de macron


Le vrai et le faux



Quand parler « vrai » sonne faux... L’attention assidue aux propos de notre fougueux président m’amène à retrouver ce que je crois être une constante de la comm, comme on dit aujourd’hui : l’obsession d’être écouté, pris au sérieux, cru, va  inciter l’orateur à tout faire pour avoir l’air le plus vrai possible, le plus proche possible de tous ceux qui lui prêtent une oreille attentive. Il va jouer la carte magique, celle de  la sincérité absolue, du bon sens incontournable, de l’évidence imposée que l’on ne peut que partager à moins de passer pour le dernier des imbéciles ou pour un asocial indécrottable.

La comm est devenue une science avec ses gourous, ses faiseurs de rois et ses escrocs. Mais patatrac ! Il arrive plus souvent qu’on ne le croie, que la cible soit ratée et parler vrai sonne faux.

Nous rouler dans la farine

Quoiqu’il en ait dit, vous vous êtes aperçu que le Macron, même s’il n’utilise pas exactement les mêmes recettes que ses prédécesseurs, met tous les atouts de son côté pour rouler dans la farine ceux qui l’écoutent, c’est-à-dire les bons français que nous sommes. Les vœux 2018 en apportent une nouvelle preuve éclatante !

Reprenons quelques péripéties de la  stratégie médiatique de ces derniers mois pour en percevoir les constantes.

Le soir de l’élection, la promenade au Louvre, haut lieu de la monarchie s’il en est,  accompagnée de quelques manants, dans la perspective de la pyramide de verre qui chapeautait l’impétrant comme un signe tombant du ciel, a donné le la : nous sommes avec du surnaturel, nous sommes avec Jupiter soi-même, nous sommes au-delà des partis. La grandiloquence, la symbolique du cérémonial seront tempérées par le convenu du propos, avec le souci de gagner les législatives qui vont suivre. Macron joue régulièrement sur les oppositions.

Quand la victoire fut totale, la droite et la gauche en partie atomisées, Jupiter est remonté sur son Olympe pour dire qu’il serait avare de ses propos, qu’il ne parlerait qu’avec parcimonie, qu’il fallait faire attention avec les journalistes. Pour cela il s’est empressé de choisir… les plus dociles. Et de profiter de sa nouvelle fonction, de la complaisance de journaux pipoles multipliant les unes à son sujet (sans politique bien sûr !) pour exister.

Pour notre bien

Mais la côte de popularité a très vite donné des signes de fatigue, d’où un changement brutal de stratégies, le muet est devenu bavard, au point de s’inviter de façon très impolie dans la petite lucarne, donc chez nous, pour nous expliquer que le peuple l’ayant élu, il est le peuple, il peut donc casser le code du travail, supprimer l’impôt sur la fortune, réduire les APL, taxer les retraités,  et rester ce qu’il n’a jamais cessé d’être un parvenu au service des tous les parvenus. Le tout accompagné de quelques méchancetés pour les fainéants qui n’aiment pas les réformes et qui contestent son autorité. Pour notre bien bien sûr !

Parce qu’il n’aime pas du tout qu’on regimbe. Sous le sourire lisse, il y a le regard dur de celui qui veut être obéi et la réplique alerte de celui qui veut être écouté. Le caporalisme n‘est pas loin. La constitution de la 5° république lui ouvre toutes grandes ces portes-là. Pour nous endormir et faire moderne, il ne lui reste plus qu’à nous balader dans l’Elysée en compagnie de Laurent Delahousse, tout miel, pour nous expliquer que tout ce qu’il fait est plus que bien et qu’il va continuer. Merci les communicants !

En 2018

Les bons vœux 2018 sont du même acabit avec une légère inflexion sociale. Il faut sortir de l’image de président des riches, réactivée par ce qui me semble être d’une outrecuidance impensable, les quarante ans fêtés dans le château de Chambord. Donc sobriété, sous un tableau vantant la fraternité, une référence répétée à la cohésion, à l’unité du pays, à l’efficacité, à l’humanisme, à l’Europe, à l’engagement de tous et chacun pour la France. Ça ne mange pas de pain ! Mais la poursuite des « réformes » est réaffirmée avec force, les opinions contraires seront entendues, mais écoutées ? Rien n’est moins sûr. Il a promis un toit pour les sans-abri et la reconduite à la frontière les immigrés illégaux Rien de nouveau. Les promesses et les coups de bâton. La justice sociale, la solidarité,  le progrès social sont des notions qu’il ne connaît pas. Il a beaucoup dit : « Je… Je… Je… ». Ça il connaît ! Il a fait le job, comme on dit en Rotschillie. Il a sonné creux et faux ! Ça vous étonne ?

Jean-Marie Philibert.