les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 22 février 2021

Prades for ever

 

PRADES FOR EVER

 

Il était, au cœur de la vallée de la Têt, à l’endroit où le fleuve impétueux venus des Pyrénées commence à quitter les pentes encaissées qui l’enserrent pour ralentir son débit et prendre le temps de contempler le massif du Canigou qui domine  de toute sa majesté tellurique le Conflent et le Roussillon, il était donc là, une tranquille sous-préfecture qui avait connu quelques heures de gloire, mais qui s’endormait lentement, sûrement, progressivement, inexorablement, dans un train-train quotidien.

Prades du passé au présent

Prades avait connu une circulation fébrile quand la nationale traversait la cité. Prades avait accueilli Pablo Casals qui ne voulait plus voir l’Espagne, mais qui voulait par-delà les montagnes en sentir l’odeur. Prades était devenu un lieu de résistance de la catalanité. Mais Prades s’était mis hors du temps dans une vie paisible que rien ne semblait vouloir troubler. Pas même la venue d’un énarque (de droite), copain de Sarkozy, haut placé, pour prendre les rênes d’une cité qui était habituée à des gestions sans histoire : il était d’ailleurs en partie naturalisé catalan, par alliance, à cause de la conflentoise qu’il avait épousée. La bonhomie du personnage, son phrasé gersois  (donc presque d’ici), son art de se faire oublier (en particulier par la droite locale qui n’appréciait que modérément son pedigree national et l’ombre qu’il pouvait lui faire) avait fait le reste. Prades et Castex ne faisaient plus qu’un.

Prime minister

Quand au cœur d’une pandémie qui a bouleversé nos vies, qui les bouleverse encore, une nouvelle est tombée, qui a mis le Conflent en émoi, qui a fait converger tous les regards sur la sous-préfecture  Macron désigne Castex comme « prime minister ». Jeannot doit partir à Matignon avec femme et enfants, doit laisser la mairie à son adjoint qui tremble devant l’ampleur de la tâche et le poids d’une succession à assurer. Les projecteurs médiatiques font le reste et finissent de tournebouler les consciences locales qui s’étaient endormies, loin des affaires du monde.

 

 

Le Monde à Prades

Un tremblement de terre ! Qui n’en finit pas de produire ses effets. Le Magazine du MONDE du13 février y consacre  de longues pages nourries du pittoresque local, avec un brin de condescendance amusée, et une légère propension à la caricature, sous le titre PRADES SON PREMIER MINISTRE ET SES COMPLOTISTES. A lire nos prestigieuses consoeurs, en dépit du Prime Minister la ville serait devenue un repère de complotistes, toutes tendances confondues, et tous âges mêlés. Le marché serait le lieu d’un happening régulier où une défiance généralisée s’est installée qui peut aller jusqu’à nier les réalités de la pandémie. « On nous manipule, on est en train de faire de nous des moutons … ». La dénonciation de la dictature sanitaire  conduit à mettre l’accent sur la dérive autoritaire du gouvernement. Ça ne s’arrête pas là  « Et si le confinement visait à instaurer le gouvernement mondial », tous les allumés du coin sont appelés à la rescousse, via internet… Et bien sûr dans ce monde-là, on ne peut être qu’anti-masque, remettre en cause l’autorité médicale et surtout rejeter l’étiquette de complotiste, bien sûr !

Suivent quelques lignes pour aborder le trouble des aficionados de Castex qui regrettent de ne plus être écoutés et le constat amer du successeur du Maire « Aujourd’hui, c’est chacun pour soi, le retour à l’individualisme, les gens n’ont plus d’espoir, ni de respect pour rien »

Et le tour est joué. La caricature est devenue la réalité, Prades le Far West, les Pradéens apparaissent un peu perchés, la richesse de notre territoire, sa diversité, ses luttes quotidiennes, à la trappe !

C’était sans doute une leçon de journalisme comme le Monde sait en donner, au détriment d’un réel qu’il est si facile de dénaturer pour jeter le trouble sur un moment difficile. Ça fait vendre sans doute ! Ce journalisme-là n’est pas le nôtre qui reste amoureux de sa terre. Prades for ever. Comme on dit chez nous et ailleurs !

Jean-Marie Philibert

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