Poison et antipoison
Qu’on se tourne de tous les côtés de la planète, il
faut reconnaître une montée très inquiétante des idéologies d’extrême droite et
des systèmes politiques qui les accompagnent, avec des variantes, mais aussi
avec des constantes. La plus centrale est de remettre en cause la démocratie,
ses impératifs, ses principes, ses valeurs comme fondement universel d’une
organisation sociale et politique qui cherche à promouvoir, à préserver, à
accroître la liberté de ses membres et au-delà leurs droits et leur bien vivre.
Haro donc sur la démocratie, même si on se pare de ses plumes pour conquérir le
pouvoir.
Autre constante
La
plus profonde est de se nourrir d‘une ignorance crasse, d’un analphabétisme
politique, qui sont d’autant plus ravageurs que comme toutes les formes graves
d’aveuglements, ils sont au-delà de toute forme de conscience, même la plus sommaire. Comme si la part d’humanité
de groupes sociaux importants s’était dissoute pour ne laisser place qu’à des
réflexes pavloviens où la peur de l’autre, l’étranger, le migrant, le différent
était la référence ultime. Comme si les leçons de l’histoire, même la plus
récente, étaient complètement inefficaces pour faire comprendre que ces
politiques ne sont que des machines d’exclusion, de division, d’enfermement, de
souffrance pour le peuple, d’oppression, de mort lente ou rapide.
Enfin
une dernière constante, bien visible, le
visage avenant dont se parent les acteurs centraux de ces tragédies. Il ne
s’agit plus de donner l’image caricaturale du dictateur, couillu et méchant,
qui hurle des discours violents à des foules galvanisées et hypnotisées. Non la
parole fascisante doit sentir le bon
sens populaire, elle doit être dite sur le ton de la conversation entre gens
qui partagent un même agacement devant les difficultés de la vie, elle laisse
croire qu’il suffirait de peu pour qu’on en sorte, elle désigne des méchants
(les démocrates, les progressistes...et les migrants, bien sûr…)) à qui il faut
faire payer leurs fautes.
La flore microbienne
Et
ne surtout pas croire que quelque peuple que ce soit puisse être imparablement
éloigné de ces tentations nauséabondes. Regardez comment Trump s’en nourrit,
comment le gouvernement italien s’en inspire, comment une majorité de
Brésiliens a mordu à l‘hameçon. Et nous avons chez nous dans notre flore
microbienne des poisons tout aussi malfaisants. Au point qu’à chaque élection
la menace se réveille, comme une maladie incurable : rappelez-vous la
présidentielle, suivez attentivement la préparation des européennes, écoutez ce
qui se dit sur les futures municipales de Perpignan.
En
médecine on parle de centre anti-poisons et il y a des services compétents pour
administrer les substances qui peuvent vous éviter d’en crever. Ne pourrait-on
pas faire de même ? Sans doute ! Dans la vie politique rien n’est
fatal, tout est mouvant. L’engagement des femmes et des hommes de toutes les
cultures, et de toutes les couleurs, y
joue le rôle crucial, leur détermination, leur nombre, leur degré de lucidité
et de courage aussi, leur capacité à dépasser les divisions. Mais il ne
faudrait pas croire qu’il existe un remède magique, qu’il suffise d’un FAUTQUON
ou d’un YAQUA, et le tour est joué.
Des lumières vite !
Aux
impératifs socio-économiques qu’il est impératif de remettre dans le bon
sens d’un travail pour tous, d’un
salaire décent pour tous, de droits sociaux pour tous, d’une solidarité, à la
fois institutionnelle et personnelle pour tous, d’un engagement syndical
élargi, unitaire et déterminé pour tous ( ce sont des passages obligés pour
nous sortir de cette ornière nauséabonde), je crois dur comme fer, de toute la
force de ma vie militante de syndicaliste et de prof, qu’il importe d’y
adjoindre impérativement une bataille éducative, culturelle et idéologique
forcenée qui défende, qui promeuve l’esprit de résistance, les valeurs
démocratiques, progressistes qui vont avec, les lumières (osons le mot)
philosophiques qui leur servent de fondements, parce qu’elles sont l’essence
même de l’humanité.
Jean-Marie
Philibert
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire