les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 12 avril 2021

SUR L'ENA

 

Tromper son monde

Le paradoxe me submerge : mes longues activités syndicales  m’ont assez souvent donné l’occasion de fréquenter ceux que l’on appelle des hauts fonctionnaires (d’une hauteur avant tout symbolique), donc entre autres et les plus prestigieux, des énarques, princes de l’énarchie et anciens élèves de la prestigieuse école. Devant leur suffisance, la raideur de leurs propos enrobés d’une apparente politesse, parfois obséquieuse, un  discours d’une lumineuse obscurité pour vous rouler dans la farine, je me suis dit souvent : « Ils me prennent pour un C…. ». Il pouvait arriver que le C…s’énervât, et balançât à son tour quelques perfidies bien éduquées qu’ils faisaient mine de traiter par le mépris qu’à la fameuse école on leur avait appris.

Défendre l’ENA

Eh bien, paradoxe : mon humeur va me conduire à défendre cette école-là au moment où un de ses prétentieux rejetons tente de lui donner le coup de grâce. Il va me falloir m’expliquer. La tâche est ardue.

Créée après la seconde guerre mondiale, l’ENA avait l’objectif de former les grands serviteurs de l’état à partir d’un recrutement dans le cadre d’un concours très sélectif qui respecte les règles démocratiques de tout concours. La haute fonction publique, auparavant, était issue de multiples voies où les influences les plus occultes pouvaient jouer à plein, où l’entre soi aristo-politique jouait à plein et où l’attachement à la défense de l’état passait bien après  la soif d’une promotion et d’un fromage, bien sûr mérités. On a vu ce que cela a donné pendant les temps d’occupation où une grande partie de la haute fonction publique s’est glorieusement assise sur les valeurs républicaines, allant jusqu’à servir sans qu’ils le demandent les intérêts allemands. Voir le rôle de Papon à la préfecture de Bordeaux ! L’attitude de Jean Moulin, préfet choisissant la Résistance fut malheureusement très minoritaire. L’ENA a donc été faite pour reconstruire un état que l’on voulait démocratique, dans le même temps le gouvernement d’alors créait pour l’ensemble des fonctionnaires un statut spécifique (Merci Maurice Thorez qui en fut l’artisan) qui garantissait leurs droits et qui perdure, malgré les coups que n’ont cessé de lui porter les gouvernements successifs. Merci Anicet Le Pors de l’avoir défendu.

Un rôle positif

L’ENA d’alors a joué un rôle positif  dans la reconstruction d’un pays et dans la mise en en oeuvre de réformes qui feront notre force, la santé, la protection sociale, les retraites, l’aménagement du territoire, les nationalisations, les entreprises publiques, les transports, l’énergie. Je me permets encore de rappeler aux plus jeunes qu’on vit encore (un peu) sur cet élan-là, issu du travail du Conseil National de la Résistance qui donne encore de l’urticaire à tous les réactionnaires (dont Macron).

D’où la décision, prise tout seul, d’enterrer l’ENA, en plein milieu d’une pandémie, où il n’est pas foutu de fournir l’élémentaire (masques, tests et vaccins) : l’ENA, symbole insupportable d’une élite, dont il a, en personne, accumulé dans sa carrière toutes les tares.

Dérives

En effet l’ENA, dans son histoire, au cours des ans a dérivé de l’administratif au politique, une proportion importante d’anciens élèves occupant beaucoup des postes de pouvoir, pas toujours avec une grande efficacité (Voir Hollande), mais aussi vers l’économique et le financier (voir Macron et son épisode banque Rothschild et bien d’autres PDG nantis). Une constante, cette évolution a été marquée par un conservatisme de classe qui occultait les divisions sociales sous les valeurs « supérieures » d’un intérêt général, par une résistance obstinée à une vraie démocratisation. Les effets de la crise, l’exacerbation d’une situation de plus en plus difficile pour le peuple, le refus des pouvoirs d’entendre la colère sociale ont focalisé sur le personnel politique et sa formation le rejet d’un symbole que récupère aujourd’hui l’énarque-jupitérien pour faire croire aux gilets jaunes et aux autres qu’il va fermer une école qui est responsable de tous leurs maux.

Une nouvelle fois il trompe son monde pour préserver sa classe et leurs profits

A sa place je garderai l’ENA et mettrai un peu de Karl Marx au programme, je pense que ce serait plus efficace pour le pays et sa population.

Jean-Marie Philibert

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