les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 11 octobre 2021

l'âme et le corps

 

L’âme et le corps

C’est pas joli-joli ce qu’ils ont fait... Il serait facile d’ironiser sur une institution qui est ce qu’elle est, façonnée par une histoire millénaire, et prétendant conduire femmes, hommes à une vie éternelle et à un surnaturel qui ferait la nique à la mort. Je dois vous expliquer pourquoi je commence par-là : c’est en fonction de ma propre (enfin propre, je crois, j’espère)) histoire avec l’église catholique. Mes seules relations avec elle depuis qu’adolescent je suis devenu lentement, mais sûrement, et fortement athée, se résument aux offices catholiques des obsèques de ceux que je veux accompagner comme on dit « jusqu’à leur dernière demeure ». Là j’écoute attentivement ce que dit l’officiant au cas où (on ne sait jamais). Je comprends presque tout, j’ai de sérieux restes d’une solide formation catholique. Et je suis profondément marqué par cette ambition sans cesse réitérée de permettre à nos âmes errantes d’être plus fortes que le temps, plus fortes que la mort, d’assurer leur salut éternel. Et je me dis que depuis des siècles des hommes d’églises consacrent leur vie  à faire partager une telle foi : quelle santé pour les âmes.

La santé des corps.

Mais pour la santé des corps, c’est un peu plus compliqué : les événements récents illustrent cette difficulté (euphémisme !). Le corps, c’est cette enveloppe qui nous a été donnée, pour vivre notre passage terrestre et qu’il convient de surveiller, il porte une faute originelle. Il ne faut pas le laisser faire ce qu’il veut : il nous ferait faire des bêtises, des péchés, comme ils disent. D’où la surveillance tous azimuts, les sacrements et tout le toutim. Les brides mises sur les désirs, et plus particulièrement ceux liés à la sexualité. Pour les hommes et femmes d’église, les brides seront plus exigeantes encore, le célibat des prêtres est comme l’emblème de ces exigences-là. La vie monastique pousse le bouchon encore plus loin : la règle de l’ordre impose au corps de se soumettre à la vie de solitude, de sacrifice, de contemplation, de prière, voie vers le salut des âmes.

Les ratés

Ça marche ? Jusqu’au moment où on constate des ratés : et là nous en avons un gros qui couvait depuis longtemps. De jeunes garçons avaient dévoilé, souvent des années après les faits, une fois devenus adultes, des abus sexuels dont ils avaient été victimes lors d’activités avec des prêtres qui semblaient se prévaloir de leur mission pour se permettre des actions que tout simplement la morale réprouve, d’autant plus qu’elles visent des mineurs. L’institution a pendant longtemps fait la sourde oreille, a minimisé les faits, malgré l’insistance troublante des victimes.

Les abus

Une commission indépendante sur les abus sexuels dans l’église catholique (Clase) a été chargée d’apporter ses lumières sur le phénomène, de faire un bilan de ce qui s’est passé depuis 1950. Le mardi 5 octobre, elle a rendu son rapport, qui a surpris tout le monde. Il s’agit selon son président Jean-Marc Sauvé d’un état des lieux « particulièrement sombre ». L’Eglise est, après la famille, l’instance où les violences sexuelles subies sont les plus nombreuses. La commission fait état de 216 000 victimes pendant les 70 ans écoulés et note un phénomène « massif » et «  systémique ». Une évaluation du nombre de prêtres ou religieux auteurs  de ce type d’agression pourrait s’élever  entre 2900 et 3200, à mettre en relation avec  les 115 000 prêtres  ayant exercé.

L’église est d’autant plus secouée que la commission parle à son propos d’ « occultation, », de  « relativisation, voire déni ». Les victimes sont satisfaites d’être enfin reconnues pour ce qu’elles ont subi, elles demandent indemnisation, et nouvelle gouvernance de l’institution. Autre donnée avancée par un membre de la commssion « L’église est un observatoire privilégié de la domination masculine… Le fonctionnement patriarcal de l’Eglise favorise la survenue des violences sexuelles » On s’en doutait un peu.

Une vie éternelle qui risque de ne pas être jolie-jolie

Les églises sont ici, laïcité oblige, et c’est très bien ainsi, hors de la compétence des gouvernements, mais pas au-dessus des lois et on doit se satisfaire de voir la société  ne plus laisser en dehors de la loi des actes qui pèsent plus que lourdement sur la vie de ceux qui en sont victimes. La justice des hommes (et femmes) d’abord !

Que penser de ces événements ? La dichotomie absolue entre l’âme et le corps ne serait-elle pas un peu en question ? Vouloir imposer, au nom d’un surnaturel éternel et révélé auquel ils adhérent, aux corps des laïcs, comme des clercs, des contraintes, des interdits, des cuirasses qui sont la négation de leur vie expose leurs âmes à de sérieuses mésaventures et à une éternité qui pourrait ne pas être jolie-jolie.

Jean-Marie Philibert

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