Dans la république des enfants ...
Dans la république des enfants ça s’agite beaucoup à
l’approche des présidentielles. Les discussions sont très animées dans les
cours de récréation.
-Sarko, il est nul ! il ment comme il respire : il
veut rien changer, mais il dit qu’avec lui ça va changer. Il est bête : il
a pas compris que c’est lui qu’on veut changer. A la maison, dès qu’il est à la
télé, avec ma sœur, on tire la langue et on tourne le dos. Ma sœur même, elle
dit que sa petite Giulia est à plaindre parce que, dans son palais de l’Elysée,
elle a pas de copines, et qu’entre une grande duduche et un petit agité,
nerveux et plein de tics, elle s’ennuie. Son frère aussi il s’ennuie tellement
à l’Elysée qu’il tire des fléchettes sur les gendarmes qui sont devant la porte.
Moi, si je tirais des fléchettes sur la voisine, mon père il m’en mettrait une trempe.
Ouais ! Mais mon père il a des principes. Et il est pas président
bling-bling. Mon père, il est de gauche, même qu’il dit « plus à gauche
que moi y a pas ». Ma mère aussi elle est de gauche, mais elle gronde
souvent mon père, parce que quand il fait des choses pour le ménage, elle le trouve trop gauche.
On se marre à la maison, même si l’on a pas beaucoup de sous. Ma grande sœur,
elle aimerait qu’on en ait davantage, ma mère aussi d’ailleurs.
Un bateau ou
un pédalo ?
-C’est pour ça que vous êtes de gauche chez vous, c’est parce
que vous n’avez pas de sous. Pour en
avoir il faut être de droite ! Moi, mon père et ma mère ils sont riches.
Ils ont plein de voitures et de bijoux en or. Mon père il a même une Rolex
comme le président. Ils m’ont dit qu’avec Sarkozy ils étaient devenus encore
plus riches et qu’ils ont envie de continuer à s’enrichir encore un peu pour
nous mettre mes frères et moi dans l’enseignement privé et pour se payer un bateau…
-Un bateau ! Même pas vrai… ta mère, elle a dit à ma
mère que ton père, il sait pas nager et que ses affaires, c’est pas
brillant-brillant. Si tu crois que Sarko il va te payer un bateau…
-Hollande, à toi, il pourra te payer qu’un pédalo, parce que
lui, c’est le roi des pédalos. C’est Mélenchon qui l’a dit.
-Moi, ma mère, mon père, mon grand frère, c’est pas un bateau
qu’ils veulent. Ils disent que les galères, ils les connaissent toutes. Ils
veulent un vrai boulot. Ils disent qu’avec un vrai boulot on peut s’acheter
autre chose que des patates, des nouilles ou des conserves. Même que mon grand
frère, il m’a dit que la nuit, il fait des rêves d’une chambre où il aurait
plein de téléphones portables et d’ordinateurs, alignés comme dans les grands magasins…
Il faut bien
travailler à l’école !
-Moi, ma mère elle dit que pour avoir tout ça, il faut bien
travailler à l’école….
-Ouais, mais pourquoi qu’avec Sarkozy, il y en a plein qui
travaillent bien à l’école, et qui n’ont rien…
-Même qu’il y en a qui travaillent bien, qui n’ont rien, même
pas des papiers, et qu’il veut les renvoyer en Afrique ou ailleurs…
-Moi, je suis petit, je comprends pas bien toute la politique, mais
à la télé, il y a ceux que j’écoute, qui m’intéressent, parce que je sens que
je peux avoir confiance, et les autres, ceux qui veulent nous embrouiller, nous rouler dans la farine.
A droite, ils ont beaucoup trop de farine. Et puis la farine, il faudrait pas
la gaspiller comme ça parce qu’il y en a qui n’en ont pas assez. Même qu’ils
vont au resto du cœur. Ma mémé, elle dit que c’est une honte et elle a raison.
Ma mémé, elle est bonne comme le bon
pain que l’on fait avec la bonne farine, et elle ne supporte pas que l’on
manque de pain. Elle est généreuse, ma mémé, c’’est elle qui me garde, qui me
protège, qui m’élève comme ils disent les grands. Je crois qu’elle m’élève
bien, comme ça je vais grandir-grandir … Et ma mémé je sais que vous avez
deviné pour qui elle va voter… Pour celui qui, comme elle, est généreux et pas
égoïste pour deux sous. Pour celui qui veut que ça change pour de vrai !
Pour celui qui ne veut plus que l’on gaspille la farine, mais qui veut qu’on la
partage.
Jean-Marie PHILIBERT.
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