Gâté-pourri !
Le patronat français est comme un enfant gâté ; vous
connaissez, tous, ces enfants insupportables dont des parents irresponsables se
croient obligés de satisfaire les moindres désirs capricieux. A l’expression
fantaisiste et insistante de mes désirs (le rêve de tout enfant étant d’être le
plus gâté possible), je n’obtenais de ma mémé adorée (dont je ne vous avais pas
parlé depuis longtemps), cette sentence irrévocable et définitive « gâté
un jour, pourri toujours ! » J’ai compris qu’il fallait aussi vivre
avec certaines insatisfactions et cela a contribué à forger ma personnalité.
Gattaz n’a pas eu de mémé raisonnable et modeste :
patron et chef des patrons, il est fils de patron qui, lui aussi, fut chef de
patrons, donc habitué depuis sa plus tendre enfance à voir ses désirs, ses
rêves, ses délires et ses couillonnades prises très au sérieux par des
courtisans appointés et sans scrupules, très-très loin des réalités difficiles
d’une société en crise. C’est peu dire qu’il fut gâté, Gattaz, il fut pourri et
peut-être l’est-il toujours, selon l’adage de mémé !
Reculons !
Quand on entend les dernières propositions du Medef en
échange de la création d’un million d’emplois, on n’a plus de doute. Selon le
saint patron, il faut « revoir le principe d’une durée légale imposée à
toutes les entreprises … prendre en compte la diversité des situations … et
permettre la fixation négociée d’une durée du travail, au niveau de l’entreprise… »
Et comme cela serait largement insuffisant pour satisfaire notre saint homme,
il préconise aussi « un recul de l’âge légal de départ à la retraite pour
tenir compte de l’allongement de la durée de la vie… »
Reculons ! Reculons ! Reculons ! Nous prendrons
ainsi beaucoup plus d’élan pour nous jeter directement dans le fleuve des
enfers … sans avoir à passer par la case retraite qui met les patrons en transe
et qui vide les caisses. Plus de retraite donc ! Plus de 35 heures !
Plus de jours fériés ! Plus de dimanche, peut-être une petite demi-heure
négociée avec le Vatican pour aller à l’office ! Plus de seuils sociaux
pour imposer des contraintes d’un autre âge ! Plus de smic ! Plus de
code du travail qui représente pour l’entreprise et ses chefs vénérés l’horreur
absolue ! Tous les codes du travail traînant dans les bibliothèques seront
rassemblés et brûlés en place publique lors d’une grande cérémonie expiatoire,
tous les patrons sauteront au-dessus ce feu avec l’allégresse de ceux qui
pensent devenir ainsi encore plus ego que les autres.
Foi de Gattaz !
« A ce prix-là, peut-être, si nos économistes ne se
sont pas trompés, si la météo est bonne, si le CAC 4O est content, si la droite
se rapproche du pouvoir, si le social libéralisme se porte toujours aussi bien,
si la bourgeoisie le veut, si la classe ouvrière est
zentille-zentille-zentille, moi Gattaz 2 je créerai des emplois !
Oui ! Vous avez bien entendu, je créerai des emplois, Foi de Gattaz !
J’ai dit un million, ça c’est pour les médias et les naïfs. Combien ? Je
ne sais pas, vous vous en doutez, ce n’est plus tout à fait de ma compétence.
Nous basculons là dans un autre ordre, celui de la providence divine qui sait
tout et peut tout. Je n’ai pas eu dieu au téléphone, mais son saint-esprit de
secrétaire m’a dit qu’il a besoin de bien observer ses ouailles pour décider de
ce qu’elles méritent ! ».
Lecteur du TC, vous savez donc ce qu’il vous reste à faire,
ou bien croire aux élucubrations d’un enfant gâté-pourri qui n’a de cesse de
nous prendre pour des imbéciles, ou bien prendre-reprendre-continuer-à-prendre-
ensemble-déterminés-résolus et têtus le chemin de la lutte sociale, hasta la
victoria !
Jean-Marie Philibert.
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