les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 30 septembre 2019

chiracôlatrie


Chiracôlatrie

Je trouve que ce terme que j’emprunte à mon camarade Aschieri décrit parfaitement le déferlement médiatique qui nous assaille depuis que nous avons appris le décès de Jacques Chirac. Le respect des défunts est le signe de notre humanité et il ne s’agit pas de le remettre en cause. Mais l’univers médiatique s’embarque dans une telle hagiographie de l’ex-président qu’il serait possible d’y suspecter, pas seulement une peine légitime, mais aussi quelques soucis politiques. Nous nous réserverons la possibilité de les évoquer.

Le vide et le trop plein

Mais commençons par le vide que laisse celui qui a animé la vie politique française pendant des décennies dans un ancrage à droite  indéfectible, même si on pouvait avoir parfois l’impression que cette droite-là restait présentable. Et c’est sans doute ce vide qui appelle le trop plein au point de saturer de paysage médiatique.

Il a occupé toutes les allées du pouvoir, des plus obscures aux plus prestigieuses et a duré pendant plus de quarante ans, en rebondissant comme il le fallait, chaque fois que sa carrière donnait le sentiment de s’essouffler, y compris en trahissant ses amis du moment. Quoi qu’en disent tous ceux qui veulent faire croire qu’il n’appartient pas exclusivement à cette famille de droite, il a gouverné la France pendant des décennies au bénéfice des possédants de tous ordres et au détriment du monde du travail. Il a mené une politique de classe : il est impossible de lui attribuer la moindre initiative significative en mesure de soulager les difficultés sociales du plus grand nombre.

L’ambition et le plus grand nombre

Et pourtant, nous dit-on, le plus grand nombre garde une bonne image, plus de 70 % d’opinions favorables dit un sondage post mortem. Cela, je pense, n’aurait pas dérangé, bien au contraire, l’ambitieux forcené qu’il n’a cessé d’être  et qui l’avait conduit à ne jamais se couper de ce plus grand nombre  qu’il savait séduire, faute de le satisfaire.

Le « toquemanettes » comme on dit ici, il savait faire et ne rechignait jamais à la tâche pour donner le sentiment d’une proximité qui pouvait avoir l’air vrai, mais qui n’était que feinte. Elle servait le plus souvent à ce que l’essentiel, c’est-à-dire, la prise et la conservation du pouvoir soient les plus efficaces, les plus entières et les plus durables possible. Là il fut très bon. Au point que ce pouvoir, peu contrôlé, a pu le conduire à se servir de ses fonctions pour « quelques » turpitudes qui lui ont valu des démêlés judiciaires et lui ont permis une vie dans l’opulence. Comme il fut le champion de la valse des étiquettes pour faire croire que la droite qu’il incarnait pouvait être autre chose que ce qu’elle est. Comme il sut se débarrasser sans ménagement de tous ceux qui, dans son propre camp, pouvaient lui faire de l’ombre. Comme il sut utiliser la politique étrangère pour brouiller un peu les pistes et apparaître un peu moins réactionnaire qu’il ne l’était.

Les erreurs et l’humanité

Il sut même faire des erreurs grossières, dissoudre une Assemblée Nationale à sa botte et s’imposer une cure de cohabitation. Personne n’est parfait.

Vos erreurs font votre humanité. Comme les difficultés de la vie, de sa fin de vie.

D’où ce sentiment bizarre de perte d’un homme, fût-il un adversaire politique majeur, qui nous a accompagnés, qui n’est pas un étranger, qui fut notre quotidien, qui ne nous est pas totalement indifférent. Et donc la possibilité offerte au monde médiatique, au pouvoir en place, de fabriquer, avec le bourrage de crâne qui va avec, une image iconique d’un président aimant et aimé, d’un politique qui brouille les pistes de droite et de gauche (comme l’autre), d’un homme sympathique qui a aimé la vie …

Même si,  politiquement, (restons lucides !) il nous a copieusement et régulièrement couillonnés.

La chiracôlatrie, ça peut toujours servir… à poursuivre l’entreprise de couillonnage !

Jean-Marie Philibert.

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