Petite balade au
Perthus
Si l’heure était moins lourde, la petite
balade de notre président au Perthus aurait pu nous amener à ironiser sur un
besoin pressant de Ricard à l’Elysée, ou sur une subite envie d’oranges de
Bribri, tant un tel déplacement peut sembler hors sol, à des Roussillonnais
confinés qui imaginent qu’il y a tant à faire à Paris.
El Nostre
Prrrésident
En fait peut-être du fait des accords de
Schengen, l’avait-on oublié ?, mais le Perthus est une frontière. El Nostre
prrrésident avait sans doute besoin pour illustrer sa démarche de lutte sur
tous les fronts, national, européen, international, immigration, terrorisme et
sécurité d’un terrain propice : le col du Perthus passage historique des
troupes d’Hannibal, des armées romaines, des hordes d’envahisseurs en tous
genres, aujourd’hui touristes et poids lourds,
le lui a fourni pour faire de l’image comme on dit dans la com moderne
et illustrer son propos qui ne change guère : je prends toujours la bonne
décision, que de bonnes décisions.
Des passoires et
un drone
Lesquelles donc ? Vigipirate oblige,
prégnance de la menace terroriste : “nous avons décidé d’intensifier très
fortement nos contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen” et
d’aligner les chiffres : les effectifs policiers passeront de 2400 à 4800. Pour
le Perthus deux unités mobiles, une compagnie de CRS et un escadron de
gendarmes mobiles... avec même un pilote de drone. Faisons donc moderne. Reste
que depuis Schengen les frontières intérieures ne le sont plus tout à fait et
qu’elles sont devenues de véritables passoires où les trafiquants en tous
genres s’en donnent à cœur joie, et sans doute aussi les terroristes potentiels
(lisez quotidiennement votre journal local). Reste que des services publics
(douanes et police) ont été réduits à la portion congrue. IL s’agit donc de
courir après l’événement, après les événements tragiques des assassinats
aveugles pour donner le sentiment que ce qu’il fallait faire a été fait, ou va
l’être incessamment sous peu.
Brouillons les pistes
Et il faut donc mettre en scène
l’intervention présidentielle sur un poste frontière emblématique, qui relie le
sud et le nord, l’Afrique et l’Europe, qui est une voie d’accès depuis des
lustres à toutes les formes d’immigration, même si ce n’est pas une porte de
Schengen. Cela permet de brouiller un peu plus les pistes et d’inciter le bon
peuple à assimiler immigration, terrorisme, islamisme et de rejoindre
l’idéologie nauséabonde et raciste qui se répand et dont de l’extrême droite à
l’extrême centre ils sont nombreux à faire leurs choux gras. Cette visite est à
l’image de la loi contre le séparatisme que le gouvernement prépare : c’est un
leurre !
Pour rien ?
Elle a aussi indéniablement une dimension
européenne. Macron prêche... dans le désert et sur la frontière... pour une
réorganisation de l’Europe...”pour intensifier notre protection commune … pour
un espace qui soit plus cohérent”... Pour le moment en dehors du plan de
relance, à la vertu essentiellement économique, en Europe, c’est, avant tout,
chacun pour soi et c’est porte close aux étrangers... pauvres. Je crains que le
déplacement au Perthus ne change en rien la donne. Je pense même que sur ce
terrain-là comme sur les autres l’initiative est improductive. Il est venu pour
rien et il a oublié le ricard et les oranges.
Peut-être que grâce à nostre prrrésident
des barrières vont faire leur réapparition sur l’autoroute et sur la nationale
et rappeler aux anciens qu’une frontière reste une frontière même si elle ne
sert pas à grand-chose, si ce n’est à séparer les humains que nous sommes.
Jean-Marie Philibert
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