les billets d'humeur de Jean Marie Philibert dans le Travailleur Catalan

Jean Marie PHILIBERT ( c'est moi ) écrit toutes les semaines un billet d'humeur dans le TRAVAILLEUR CATALAN, hebdomadaire de la fédération catalane du PCF.
Je ne peux que vous conseiller de vous abonner à ce journal qui est aujourd'hui le seul organe de presse de gauche du département des Pyrénées Orientales.
J'ai rassemblé dans ce blog quelques uns de ces billets d'humeur en rappelant brièvement les événements qu'ils évoquent

lundi 30 mars 2020

plus jamais ça


« Plus jamais ça ! Préparons le jour d’après »

Sur un appel de personnalités à propos de la situation actuelle

C’est sous ce titre, qui ne devrait plus cesser de résonner et de raisonner dans nos consciences, en ces temps de confinement pour cause d’épidémie mondiale, que dix-huit responsables d’organisations syndicales, associatives et environnementales ont publié un appel qui nous projette dans l’après. C’est salutaire, nécessaire.

Ils terminent par ce rendez-vous : « Lorsque la fin de la pandémie le permettra, nous nous donnons rendez-vous pour réinvestir les lieux publics et construire notre jour d’après. Nous en appelons à toutes les forces progressistes et humanistes, et plus largement à toute la société, pour reconstruire ensemble, un futur, écologique, féministe et social, en rupture avec les politiques menées jusque-là et le désordre néolibéral. »

Passé, présent, futur

Les auteurs de cet appel sont, entre autres, des dirigeant(e)s  connu(e)s et reconnu(e)s d’Attac, de Greenpeace, d’Oxfam, d’Alternatiba, du Droit au Logement, de la FIDL, de la Fondation Copernic, du Syndicat de la Magistrature, de l’UNEF, de l’UNL, de la Confédération paysanne, de l’Union syndicale Solidaires, de la FSU, de la CGT. Beaucoup de ceux qui ont été au cœur des batailles syndicales, sociales de ces derniers temps et qui veulent relier ce passé de lutte contre les dérives manifestes et coupables des pouvoirs politiques et économiques en place, ce présent de… (évitons de la qualifier) et un avenir que l’on ne voit qu’en rupture profonde avec le désordre existant.

Illustration immédiate : la santé, les hôpitaux, les Ehpad dont on paie aujourd’hui le saccage organisé. Ils/elles plaident pour des mesures de justice sociale, interdiction des licenciements, inadéquation du plan d’urgence sanitaire, aide aux plus démunis dans ces temps de confinement. Aider les entreprises, mais suspendre, puis encadrer le versement des dividendes et le rachat d’actions. Contrôler les marchés financiers, et les pratiques des banques. Des prêts directs  de la BCE et des banques publiques aux Etats et collectivités locales. Lutter contre l’évasion fiscale.
Tout faire pour rétablir les grands équilibres écologiques : « il s’agit de soutenir les investissements et la création massive d’emplois dans la transition écologique et énergétique… d’opérer un vaste partage des richesses… » Soutenir massivement tous les services publics. Relocaliser les productions pour éviter notre vulnérabilité. Inventer une nouvelle régulation internationale.


Autant de causes qui ne sont pas inédites dans les colonnes du TC, et qu’il serait plus que temps de voir mises en œuvre. Aujourd’hui les temps l’imposent et nous avec.

JMP

vendredi 27 mars 2020

maison

 

Un effet du confinement

ma maison a des jambes, 

une âme, une vie 

et je lui parle, 

je l'appelle.

MAI-SON

Les fenêtres s'éclairent, les fantomes sont là.


Confiné(e)s

Je pensais avoir une expérience ancienne du confinement. Mes études m’avaient confiné de longues heures dans des salles de classes où tout en faisant mine d’écouter attentivement je passais le plus clair de mon temps à rêver. A la faculté je fus aussi confiné, mais là, l’écoute devait être supérieure au rêve  pour faire de moi le prof qui, à longueur d’années scolaires, se fera confiner, heure après heure, dans des salles de cours qui ne sentaient pas nécessairement la rose. Le confinement était fort limité et chaque heure la cloche nous libérait. Mais c’était du confinement : interdiction de sortir à moins d’un souci majeur !

Il se trouve aussi que dans les activités syndicales qui ont accompagné ma vie de prof, je me suis alors aussi copieusement confiné, auto-confiné, faudrait-il dire, parce que nous nous enfermions, pour de longues heures,  souvent nombreux, dans des salles petites enfumées, pour débattre d’un avenir souvent sombre.

Un autre confinement

J’ai donc en matière de confinement une expérience certaine, mais le confinement actuel sort totalement de mes habitudes parce qu’il est global, universel, pourrait-on dire, policier, vide, parce qu’il nous appartient seuls de nous y occuper à rien, à quelque chose, à ce que nous voulons, parce que nous ne savons pas du tout quand la cloche va retentir, parce qu’il est médical, qu’il doit nous permettre de vaincre une cochonnerie qui nous fout la trouille.

D’où les troubles et des comportements qui, soit respectent scrupuleusement le cadre, soit ont du mal à y entrer. Et qui peuvent prêter à sourire sur notre humanité pleine de surprises.

Sourire dans le confinement

Commençons par ceux qui n’y entrent pas du tout ; ces deux catalans, tellement habitués à faire leurs courses en Andorre, prennent la 116, sans savoir qu’elle est coupée depuis des semaines. Bloqués, ils cherchent à passer par les Garrotxes, se cassent la gueule, partent à pieds, se perdent, se séparent. Il y faut le secours en montagne pour les sortir de leur galère et les renvoyer en confinement. Un autre couple d’amis du Tech, amateurs de champignons, tout à leur passion irrésistible, partent en montagne, tombent d’un pont et ont recours aux gendarmes et à l’hélico pour revenir au confinement. Dans quelques coins de Perpignan il semble aussi que l’on ne connaisse pas le sens exact du mot confinement et qu’on ait besoin des gendarmes et du couvre-feu pour une explication de texte.

Ne pas réveiller la bête

Mais disons que globalement malgré la difficulté de la chose, le civisme du plus grand nombre est manifeste ; la ville est vide, silencieuse, morte, traversée par des individus, souvent masqués qui, même s’ils vous connaissent et reconnaissent, à votre simple vue et bien avant de vous croiser, vont s’écarter de votre route, pour vous adresser du plus loin possible, un timide salut amical, et s’il osent, un très timide « ça va ? » en veillant scrupuleusement à ce que les postillons qu’ils émettent ne dépassent pas la limite règlementaire d’un mètre définie par les autorités. Ils s’éloigneront aussi furtivement qu’ils sont venus. Comme si la ville avait peur par les bruits qu’elle pourrait faire de réveiller une bête féroce que l’on souhaite voir endormie.

Tout cela est certes pénible, mais nous n’avons pas le choix. La raison doit être notre référence. Et la solidarité. Ayons une pensée, et plus si nécessaire, pour ceux qui dans ces conditions ont à affronter maladies et difficultés de tous ordres. Protégeons-nous et protégeons les autres.

Ayons la plus grande des reconnaissances pour ceux qui ne sont pas confinés, qui soignent, qui font marcher ce qui doit marcher, qui pour cela prennent de nombreux risques. Ils sont l’honneur quotidien de notre humanité.

Puis restons lucides sur les choix politiques en cours. Ceux de la période d’avant le corona étaient des plus critiquables, ceux des premiers temps du corona le sont restés. Ceux d’aujourd’hui me laissent perplexes, la preuve, par les masques qui manquent toujours et l’incapacité à mettre en œuvre un dépistage systématique. Mais il y aura obligatoirement une suite à l’histoire.

Jean-Marie Philibert

dimanche 22 mars 2020


« En commun »

Je ne pense pas qu’il soit urgent et important de s’occuper et de disserter sur le deuxième tour des municipales, sur un indispensable (pour moi) front républicain, appelez-le comme vous voulez. L’heure a d’autres exigences, celles en particulier de nous faire comprendre qu’aussi riche, intelligent et costaud qu’on soit on ne se sortira pas tout seul de cet affrontement sans pitié avec une petite bête, appelée virus, et qui nous rappelle la fragilité physiologique, psychologique, sociale, culturelle, scientifique, médicale de notre humanité. Nous avons ensemble une humanité « en commun », comme on dit maintenant souvent, c’est en commun qu’il faut la préserver  avec tous ceux qui ont le sens « du commun ».

Je viens d’entendre une déclaration du Docteur Philippe Klein qui dirige une clinique internationale à Wuhan et qui nous dit ce que les Chinois ont mis en œuvre pour stopper l’épidémie : il nous dit sa compassion pour ce que nous subissons. Pour lui, en dehors d’un confinement très sévère,  nous laisserons le virus proliférer. Il n’y a pas d’autres choix. Il s’adresse à toute notre communauté humaine.

Tergiverser

Toutes les tergiversations sont coupables, et c’est peu dire que depuis les premiers signes nous n’avons cessé de tergiverser. La plus splendide de ces tergiversations : l’organisation du premier tour des municipales, alors que tous les lieux de rassemblement étaient fermés. Tergiversation est un doux euphémisme, pour taire les responsabilités du pouvoir de mettre en danger la vie d’autrui. Des fautes graves. L’heure n’est pas à la polémique politique, mais l’impréparation des décisions à prendre, le délabrement dans lequel on a contraint les services publics, et en particulier les hôpitaux, à fonctionner, la fuite en avant dans des réformes sociales (droit du travail, chômage, retraites) qui avaient entre autres buts de fragiliser le tissu social, de mener une guerre de classe contre les travailleurs de ce pays, nous ont conduits dans un mur dont il faudra, à un moment, dire les responsables. Buzin a déjà compris, elle s’empresse de dire : « c’est pas moi ! ». Ils croient s’en sortir par les mots. « C’est la guerre » qu’il dit le Macron. Mais dans une guerre il faut des armes, nous,  nous n’avons même pas de masques. Personne n’est responsable.

Emblématique de cette incurie : les masques !

Quoi qu’il (lui) en coûte

Alors il fait semblant d’avoir un peu compris quelque chose à ce que le pays est en train de vivre, il « suspend » les réformes, seulement suspendre, il est prêt à payer ce qu’il faut « quoi qu’il en coûte ». Il joue au chef de guerre. Il ferait même un peu dans le social. Il vante les fonctionnaires après leur avoir bavé dessus. Tout ce qui était impossible il y a quelques mois, s’exonérer des impératifs de limitations des déficits budgétaires devient possible avec la bénédiction européenne. Son ministre des finances évoque même la possibilité de nationalisations. Mais ces guêpes-là ne sont pas folles : bousculer la répartition des richesses, remettre en cause la toute-puissance financière qui a mis le pays en coupe réglée et a conduit les fragiles à l’être encore plus, et à être de plus en plus nombreux, on n’en parle pas. Cela a-t-il un rapport avec la maladie d’ailleurs ?

Confinés et confrontés

Les temps de crise nous confrontent à l’inquiétude, à la menace, peut-être à la souffrance, mais aussi à l’essentiel. Ce que nous affrontons par le confinement nous confronte à nous-mêmes, à nos interrogations et à nos réponses incomplètes, parcellaires, à nos capacités de résistances-persistances (les sœurs jumelles) que l’expérience de nos vies a forgées. Il y a là un temps précieux à prendre, à utiliser pour aller vers tous ceux qui nous entourent (et même confinés les outils dont nous disposons nous relient aux autres) et faire en sorte de développer ce sens du « commun » qui est plus nécessaire que jamais dans un monde que, quoi qu’il en coûte, nous voulons solidaire et juste.

Jean-Marie Philibert.

lundi 16 mars 2020

profusion et paradoxe


Profusion et paradoxe...

Mais où il s’embarque encore avec ces mots à la noix ? Le corono-machin l’aurait-il atteint ? Au TC on ne les a pas mis à l’arrêt et confinés au 44, route de Prades ? Ça leur aurait fait des vacances et à nous aussi. Parce que nous alerter semaine après semaine des turpitudes-malheurs-injustices du monde, ça doit leur taper sur le ciboulot.

Notre lectorat peut être sans pitié, même s’il partage beaucoup de nos valeurs, comme il partage ce qui fait notre destin, cette semaine, marqué par la profusion et le paradoxe.

Une zizanie de tous les diables

La profusion, c’est celle d’une actualité complètement folle où un virus inconnu vient semer une zizanie de tous les diables : il se répand sans respecter les frontières, les classes sociales, les continents et provoque une épidémie qui remet en cause les certitudes les mieux ancrées, les comportements que l’on croyait intangibles, les perspectives les plus sûres. On est en pleine période électorale, pour choisir les équipes municipales qui vont diriger les communes : la bataille politique fait rage, les prétendants s’entredéchirent, font valser les étiquettes, les cachent, jouent les cadors, se croient le centre du monde. Et puis patatrac, à cause de la petite bébête, de la fermeture des commerces, des cafés, des cinémas, de l’interdiction des compétitions sportives et de la trouille légitime qui s’ensuit, bien des électeurs restent à la maison, fragilisant l’exercice démocratique que le pouvoir macronien en place ne semble pas mécontent de voir passer au second plan, compte tenu de la déculottée prévisible annoncée.

Le jamais vu

Ce dimanche soir, j’avais l’impression d’une soirée électorale hors sol, dans un pays fantomatique, avec des commentateurs à l’électro-encéphalogramme plat. Du jamais vu ! Mais avec quand même des résultats, des élus, des gagnants et des perdants. Des rapports de force politiques qui au fond ne bougent pas beaucoup. Et avec une incompréhension générale : pourquoi, alors qu’on sait que l’épidémie se nourrit de la multiplication des contacts, avoir maintenu ce premier tour, d’autant plus qu’on n’est pas en mesure de dire ce que l’on prévoit pour le deuxième tour. Et l’on peut être amené à tout recommencer.

Une fois de plus Macron nous a plantés !

Mais peut-être que dans quelques jours, il reconnaîtra son erreur, comme pour les services publics auxquels il a rogné les crédits, comme pour les fonctionnaires sur lesquels il a dit pis que pendre, comme pour les déficits publics qu’il fallait impérativement réduire, comme pour les grèves qu’il fallait arrêter. Les services hospitaliers sont l’objet de tous les éloges, les fonctionnaires sont parés de tous les dévouements, les déficits publics, on s’en tape, « quoiqu’il en coûte », et quant aux grèves, c’est toute la France ou presque qu’on met en grève… payée. Quant à la critique des méthodes fortes du régime chinois (dictatorial puisque communiste), on fait pareil. La petite bête nous rendrait-elle moins couillons ?

De la profusion au confinement et au paradoxe

Toutes les semaines ne sont pas aussi agitées, heureusement, et il est certain que nous vivons quelque chose de difficile, où chaque jour apporte sa « nouveauté » pas nécessairement réjouissante. Ainsi alors que j’écris ces lignes, ce lundi,  les infos en continu qui nous empêchent souvent de penser, bruissent de rumeurs persistantes de confinement généralisé. La profusion en tous sens avec l’inquiétude qui va avec.

Et avec le paradoxe qui l’accompagne. Plus les temps s’agitent, plus les infos prolifèrent, plus les craintes montent, plus nous sommes confrontés au repliement sur soi,  à l’enfermement, peut-être à l’oisiveté, sans doute à l’observation du monde depuis les fenêtres de notre maison protectrice, et au face à face solitaire avec les écrans de la téloche, ou de l’ordi qui par-delà les discours, les images, les paroles lénifiantes ou les propos catastrophiques, nous apprennent, nous réapprennent, sans le vouloir sans doute, que notre destin commun mérite que l’on s’en occupe davantage ensemble. La profusion et le paradoxe nous conduiraient ainsi à la solidarité.

Jean-Marie Philibert.




lundi 9 mars 2020


La démocratie malmenée

Les coups portés à la démocratie, par Macron, ne sont pas sans risques.

Il y a un lien direct entre les coup de matraques répétés lors des nombreuses manifs qui ont eu lieu depuis 2017, ici, dans notre pays,  entre la panoplie policière  mise en œuvre, en particulier contre les jeunes ( rappelez-vous ces jeunes lycéens alignés les mains sur la tête sous les yeux de quelques robocops), contre les femmes aussi ( pas plus tard que samedi dernier)… et le 49/3 avec le refus de laisser le parlement jouer son rôle.

Ce lien s’appelle la phobie démocratique.

Comme si la démocratie n’avait plus tout à fait sa place dans notre organisation sociale : des contraintes inutiles, inadaptées, des lourdeurs d’un autre âge, de la parlote dans le vide. Comme si l’air du temps, les contraintes de l’heure appelaient un autre comportement et le retour des chefs, petits et grands, comme gages d’une efficacité absolument nécessaires. Pas la peine de faire de tous ces droits des données intangibles. Pas la peine d’égalité, de justice. Il suffit de s’asseoir sur ces vieilleries. Vive l’efficacité.

Incapable d’entendre les voix qui discordent

De toutes les façons, en glorifiant les « premiers de cordée » et les « riens » qui forment une société, Macron avait annoncé la couleur et son amour limité du peuple. Et il a fallu quelques remontages des bretelles un peu rudes pour qu’il comprenne que le peuple ne se laisserait pas faire. Mais, même s’il a tu les petites phrases assassines, il n’en a pas pour autant découvert les mérites de la démocratie et la dérive dans laquelle le quinquennat s’enferre ne laisse pas augurer un changement significatif. Des propos insipides sous l’œil des caméras, avec des agriculteurs, des personnes âgées, des médecins font office de débat public, d’autant que les caméras ont bien cadré les choses et placé hors champs les discours qui pourraient déranger. Merci les valets de la téloche.

Le pouvoir est incapable d’entendre les voix qui discordent, c’est pourtant le B.A.BA de la démocratie. Quant à les écouter… vous n’y pensez pas.

Comme à la cour, le monarque ne recherche que les mots complaisants, sinon il fait la leçon.

Observez la façon dont sont traitées les organisations syndicales. Selon que vous serez réformateurs mous façon CFDT, ou contestataires virulents façon CGT, l’attention, l’écoute et les réponses seront profondément différentes. Les prébendes et les faveurs pour …  devinez qui …

Enfin, cerise … acide sur le gâteau : la démocratie se nourrit d’humanité, de chaleur humaine, d’empathie pour tous ceux qui vous ont confié un pouvoir qui ne vous appartient pas, il est à eux. Avec Macron et sa bande, l’humanité est aux abonnés absents.

Au-delà des coups à la démocratie, les fachos sont aux aguets, ne soyons pas naïfs.

JMP

les soeurs jumelles


Les sœurs jumelles

Il est réjouissant pour la santé d’un pays de voir lors de chaque élection municipale l’intérêt des citoyens, dans les grandes agglomérations comme dans les plus petites communes. Les candidats sont nombreux, les listes sont diverses et la campagne peut battre son plein avec ses grands moments et peut-être aussi ses coups bas. Les projets peuvent passer du réalisme le plus sommaire au rêve éveillé, mais peu crédible. Ainsi l’homme à la zigounette, candidat malheureux à Paris, voulait faire à la gare de l’est un Central Park parisien qui a bien fait rire. Mais il est bon que dans les équipes qui prétendent gérer une ville, les idées foisonnent. Et même à Perpignan, où nos édiles nous ont habitués depuis des décennies à être bas de plafond, ils ont eu des idées.

Cet intérêt pour la chose publique est essentiel dans une démocratie : on pourrait avoir des craintes au moment où, sous des angles divers, elle est attaquée. Nous en parlons ailleurs dans ce numéro du TC.  Il est un signe.

La résistance

Nos concitoyens font de la résistance, j’ai même envie de dire une résistance tous azimuts.

Après l’épisode Gilets Jaunes qui a répondu à l‘arrogance du pouvoir et qui lui a rabattu le caquet au point de le contraindre à quelques concessions, la bataille des retraites, en cours, a remis en selle une activité syndicale unitaire pour arracher le masque d’une réforme « juste et universelle », comme ils disaient, et pour qu’elle apparaisse pour ce qu’elle est, un projet réactionnaire qui aboutira nécessairement à ce qu’on travaille plus longtemps, pour des pensions amputées, dans l’incapacité d’en connaître le montant, avec le risque de la voir systématiquement remise en cause. Une attaque sans précédent de droits chèrement conquis.

Créativité, sérénité

Une résistance qui n‘en finit pas de résister comme toute résistance qui se respecte. Nouvelle preuve, à Perpignan,  la mise en œuvre du flash mob anti macron une nouvelle fois lors de la manif féministe du 7  mars. Une des caractéristiques du mouvement en cours est l’extraordinaire créativité à laquelle il a donné lieu, dans les formes, dans les slogans, dans les initiatives. Par exemple une manif revendicative aux flambeaux à Céret : il y a belle lurette qu’il n’y en avait pas eu. Les paroles qui accompagnent ces initiatives disent toutes l’insupportable de la situation actuelle, du pouvoir en place, du manque criant et généralisé de démocratie. Etrangement, paradoxalement, le tout dans un climat de sérénité… relative certes… mais de sérénité quand même.

Des traces durables

Parce que le peuple s’y voit rassemblé et soutenu. L’opinion publique tient bon, elle soutient l’action en cours, quels qu’en soient les aléas, actuellement le 49/3 pour empêcher l’opposition parlementaire de faire son travail d’opposition. L’unité d’action des organisations syndicales est porteuse d’avenir et contribue à clarifier les stratégies, entre ceux qui luttent et ceux qui se couchent. Le mouvement est aussi fait pour laisser des traces durables qui peuvent aider à élargir son assise, qui peuvent permettre d’amener à agir tous ceux qui regardent avec sympathie le mouvement, mais sans le nourrir de leur participation effective. Il y a une hégémonie populaire à gagner sans laquelle la lutte gardera un goût d’inachevé.

Certes les élections municipales  dans le paysage, certes le corona-machin-chouette, certes les bourrages de crânes médiatiques, certes les embrouillaminis idéologiques qui voudraient nous voir dériver vers la droite et son extrême, vers les formes d’exclusion dont elles rêvent, vers la remise en cause des valeurs républicaines qui fondent notre histoire… certes tout cela n’est pas sans effets. Mais nos capacités de résistance sont à la hauteur des enjeux : peindre-repeindre le monde en humain, tel que nous l’entrevoyons quand la soif de justice est la plus forte.

Résistance et persistance sont sœurs jumelles. Nous persisterons !

Jean-Marie Philibert

mercredi 4 mars 2020

Lettre à Franco... et à César.


Lettre à Franco… et à César…

Sur les écrans perpignanais, le film d’Alejandro Amenàbar, la « Lettre à Franco » peut troubler, parce qu’il fait référence au soutien qu’un grand écrivain espagnol Miguel de Unamuno a accordé, en 1936,  à la rébellion militaire qui s’est mise en marche. Elle vise à détruire une République qu’il a pu auparavant soutenir. Mais il a peur des Rouges et il aime l’Espagne. Est-ce suffisant pour justifier ce ralliement dont il semble tarder à voir le sens, malgré Lorca assassiné à Grenade ? Pas à mes yeux ! Comme quoi un grand écrivain n’a pas nécessairement toujours la lucidité qu’il faudrait. Mais il se rattrapera en découvrant la réalité du fascisme et du franquisme naissant : il prononcera à Salamanque lors de la Fête de la Race (blanche, bien sûr) une condamnation ferme et définitive de Franco et de sa clique devant une salle de fascistes, décidés à le trucider. Pour deviner qui lui a évité ce triste sort, il faut voir un film qui ne nous cache rien des méandres de l’Histoire.

C’est une des fonctions du cinéma. Il peut lui arriver de se heurter lui-même en tant qu’institution à l‘Histoire.

Comme lors de la cérémonie des Césars. Refuser de faire aux femmes une légitime place 50/50 (c’est le nom de leur association) dans la création cinématographique, d’entendre leur colère et leur souci de dignité à propos de comportements intolérables, faire du sulfureux Polansky un lauréat de la soirée, ne pouvaient que provoquer une colère légitime. L’Histoire bouge et avance : le cinéma ne saurait l’ignorer.

JMP

mardi 3 mars 2020

l'épidémie et l'absurdité


L’épidémie et l’absurdité

Ils ont l’air de quoi, nos grands sachems du capitalisme mondial, qui pour s’en mettre chaque jour un peu plus plein les fouilles, ont fait de la Chine et des Chinois-et-noises les petites mains de l’industrie mondiale. A eux la sueur sur les fronts, les salaires de misères, les protections réduites à pas grand-chose, à eux la pollution qui va avec, à eux la croissance anarchique.

A nous grands patrons du grand marché mondial, les dividendes comme s’il en pleuvait. La finance internationale prête à nous élever une statue, à Wall Street, à Francfort, à Londres. Certes nos industries locales, ici en Europe,  ont bu le bouillon, les chômeurs d’ici ont chômé, normal ! C’est le désordre des choses, mais avec tous les droits qu’ils avaient acquis, ils ne sont pas à plaindre, il leur reste assez pour acheter les produits de pacotille que leur fournit l’industrie chinoise, et avoir le sentiment qu’ils ne sont pas les plus malheureux.

Le saut dans le vide

Ce sont, ce furent les charmes discrets de la mondialisation qui nous a été présentée comme une fatalité imparable et un grand pas en avant… Dans le vide ! Et dans l’absurde !

La preuve par le coronavirus : que fait-on maintenant que l’industrie pharmaceutique  a transplanté en Chine ses usines ? Depuis des décennies les labos ont délocalisé  leur production dans les pays à bas coût (60% s’effectue désormais en Chine et en Inde). La Chine, qui est peu à peu paralysée par l’épidémie en cours n’est pas loin de ne plus être en mesure de nous fournir les médicaments qui nous font besoin, qu’on a trouvés , développés, expérimentés dans nos instituts de recherches, dans nos universités, dans nos hôpitaux,  ici, avec nos savoirs, nos expériences, avec l’ambition d’un système de santé performant pour tous.

 Cupidité sans frontière

On est comme des couillons, parce que les tenants de l’industrie pharmaceutique, d’ici, comme  d’ailleurs, ont remplacé cette ambition par celle d’une cupidité sans frontière où la recherche de la plus-value maximum pour un investissement minimum est la règle indépassable.

Et pas seulement dans l’industrie pharmaceutique.

Avec cette affaire, le piège se referme sur les thuriféraires de la mondialisation qui prenaient les défenseurs d’une production locale pour de doux attardés : il ne me déplait pas qu’ils aient quelques sueurs froides en pensant à l’immensité de leur aveuglement. Encore que leur cynisme et leur prétention (que je ne sous-estime pas)  sont suffisants pour qu’ils tentent de nous démontrer que ce qu’on ne peut plus faire en Chine, on pourra essayer de le faire ailleurs. Les peuples à exploiter sont légions.

Des misères qui font du bien

Et puis en attendant des temps meilleurs pour la mondialisation sauvage, la seule qu’ils soient en mesure de concevoir. Ils peuvent avoir le toupet de tenter de nous montrer que les petites misères du corona peuvent faire du bien à l’écologie, moins de pollution, un réchauffement climatique freiné, des transports réduits, moins de CO2. Grands patrons et écolos, main dans la main.

Mais ce n’est pas tout, grâce au corona, on peut être incité, amené, contraint à rester à la maison, à ne pas aller au turbin, à glandouiller, à s’ennuyer certes un peu, à découvrir les charmes du télétravail. L’exploitation des travailleurs entravée par l’épidémie. Et là, pour l’enrayer vraiment, cela ne concernera pas que la Chine. Des moments mondiaux de liberté gagnés sur l’exploitation quotidienne des salariés. Merci la mondialisation et le corona. Patrons et travailleurs unis dans l’oisiveté.

Les épidémies sont des révélateurs de l’absurdité de notre humanité. Dans « La Peste », Albert Camus nous avait prévenus. Relisez « La Peste » !

Jean-Marie Philibert.