N’ayez pas
peur du Redoutable
J’appartiens à une génération qui a appris le cinéma avec la
nouvelle vague, avec Godard, c’est dire la curiosité qu’a pu susciter chez moi
le dernier film de Michel Hazanavicius, intitulé « Le Redoutable » et
qui raconte le tournant de la vie et l’œuvre de Godard en 1968. Après les
succès d’A bout de souffle, de Pierrot le Fou, du Mépris, il tourne la
Chinoise, où il met en scène Anne Wiazemsky, sa cadette de vingt ans. Il
commence sa conversion au maoïsme, il aime Anne, ils sont heureux, ils se
marient. Et affrontent ensemble un monde qui se délecte à se vautrer dans LA
révolution de 68 dans laquelle, tel Le Redoutable sous-marin célèbre de ce
temps, il se laisse submerger, sans la crainte des ratages, au point de ne plus imaginer qu’un cinéma
révolutionnaire, à travers le groupe Dziga Vertov. Le metteur en scène reprend
dans son scénario le récit distancié et amusé fait par Anne Viazemski de cette
période, de leur vie, de leur séparation dans un livre « Un an
après » au moins aussi captivant que le film. L’amour partagé d’Anne est
sacrifié sur l’autel d’un cinéma en ébullition que Godard rêve de
réinventer : les films qui suivront illustreront la difficulté de la
tâche. Son impossibilité ? Et bien sûr parce qu’Hazanavicius adore le
pastiche (rappelez-vous The Artist où il nous renourrissait des plaisirs du
cinéma muet), ici, c’est la camera de Godard qui lui sert de modèle, les gros
plans, les adresses directes aux spectateurs, les plans séquences, un récit
haché, mais construit. Une vie réinventée, mais qui a la richesse d’un moment
de l’histoire où tous les possibles étaient à portée de la main. Un réel
plaisir auquel tous les acteurs apportent leur contribution !
Jean-Marie Philibert.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire